Le nouveau marché numérique

Publié le 01/07/2011 à 09:17, mis à jour le 08/07/2011 à 09:17

Le nouveau marché numérique

Publié le 01/07/2011 à 09:17, mis à jour le 08/07/2011 à 09:17

Par Premium

Grâce à la convergence numérique, exit l’ancienne lutte à finir entre les créateurs et les diffuseurs de contenu. Mais cette tendance émergente ne va pas sans susciter la réflexion avant l’action. Démonstration.

Auteurs : Gianvito Lanzolla et Jamie Anderson, Business Strategy Review

Il n’y a pas si longtemps encore, les entreprises travaillaient avec des technologies qui étaient propres à leur secteur d’activité. Les éditeurs utilisaient des méthodes d’impression sur papier ; les maisons de disques gravaient la musique sur du vinyle ; les fabricants d’appareils photo utilisaient des procédés liés aux lois de la physique et de la chimie ; etc. Mais cette époque est aujourd’hui révolue.

L’omniprésence des technologies numériques a permis de rompre le lien fusionnel entre les technologies et les industries. À titre d’exemple, il est maintenant courant de convertir différents types de produits ou services — une émission de radio, un livre, un magazine, une chanson ou un appel téléphonique — en données numériques. Du coup, des industries qui, autrefois, n’avaient aucun lien, utilisent les mêmes technologies ; et, désormais, il n’y a plus de distinction entre les produits ou services offerts par une entreprise du secteur des télécommunications (comme un appel téléphonique) et une autre de l’industrie musicale (comme une chanson ou un opéra). Ils se présentent tous sous la même forme, c’est-à-dire une série de 0 et de 1 transmis par voie numérique.

Plus encore, quantité de produits ou services numériques peuvent maintenant être regroupés, d’où l’émergence de ce qu’on appelle la convergence numérique. Cette dernière se traduit notamment par l’apparition de nouveaux produits qui résultent justement de la convergence de plus d’une plateforme, toutes ces dernières étant maintenant de plus en plus numérisées. Bref, l’ère de la convergence numérique est lancée — et elle ne fait que commencer.###

Pour l’instant, le succès des entreprises qui ont choisi d’ajouter à leur offre des produits ou services qui étaient autrefois l’apanage d’autres secteurs (les entreprises de téléphonie qui proposent maintenant de la musique, par exemple) est mitigé. Pourquoi ? C’est la question que nous avons étudiée, et nos recherches nous ont permis de tirer quatre grandes leçons.

1. Oubliez la convergence maximale

Les compétences et les capacités requises pour produire du contenu (créativité, recherche d’idées, gestion d’artistes, marketing), gérer un réseau de télécommunications (couverture, qualité et fiabilité, service à la clientèle) et développer des technologies de l’information ou des appareils électroniques grand public (R et D, tests, design, fabrication) ne sont pas les mêmes. Et, si la structure sous-jacente des technologies numériques devient de plus en plus uniforme, on ne trouve aucun exemple dans le monde d’une seule entreprise capable d’exceller dans tous ces domaines.

Dans l’industrie des médias, notamment, les avancées des technologies numériques influencent les modalités de production, de diffusion et de consommation du contenu, mais pas le contenu lui-même. Par exemple, un concepteur de logiciels n’est pas en mesure de produire un bulletin de nouvelles télévisées ou une émission de divertissement : acquérir l’ensemble des compétences nécessaires pour y arriver est très difficile. Bref, la convergence maximale est impossible à réaliser.

2. Élaborez des priorités stratégiques dans votre champ de compétence

En regardant de près le domaine du commerce numérique, on découvre deux champs de compétence de base : l’un est associé au contenu, et l’autre, à la technologie. Dans le premier, on trouve des sociétés comme Disney, EMI et Fox ; elles produisent de la musique, des émissions de télévision, des films, des reportages sportifs, des jeux vidéo et tout ce qui fait le Web 2.0 (communautés en ligne, wikis, blogues, etc.). Quant au deuxième, il comprend cinq types d’entreprises, qui diffusent et transmettent du contenu, ou y donnent accès d’une manière ou d’une autre :

Les distributeurs de contenu traditionnels, comme les clubs vidéo et les librairies ;

Les fournisseurs d’accès au contenu, comme Google et YouTube ;

Les fabricants d’appareils numériques, comme Sony, Apple et Nokia ;

Les opérateurs de télécommunications (télécom), comme Vodafone et Sky Telecom ;

Les développeurs de technologies numériques, comme Ericsson, Microsoft, Siemens et IBM.

Bien sûr, certaines de ces catégories se chevauchent ; Apple, par exemple, fabrique des appareils numériques (iPod) et donne accès à du contenu (iTunes). Toutefois, le principal avantage de les distinguer est de mettre l’accent sur les priorités associées au champ de compétence de chacune d’entre elles, pour que les entreprises de chacun des secteurs puissent tirer le meilleur parti des débouchés qui se présentent en matière de convergence numérique. D’après nos recherches, deux stratégies s’offrent aux entreprises désireuses d’établir leurs priorités : se concentrer sur leurs forces principales et nouer des liens de confiance.

Les forces principales. Dans le champ de compétences technologiques, les entreprises tentent actuellement de s’accaparer les réseaux de distribution en devenant la principale passerelle d’interaction numérique. Ces passerelles peuvent prendre différentes formes (un réseau de communication, un appareil numérique ou un portail Internet), et différents acteurs — provenant de l’électronique grand public, des TI et des services de télécommunications — se font concurrence dans ce domaine. Les entreprises spécialisées dans Internet, par exemple, tentent d’établir leur portail comme la meilleure référence sur le plan du contenu (et des services) ; c’est le cas de Google, par exemple, avec Google Maps, Google Books, Gmail, etc. L’objectif consiste alors à tenter de fidéliser la clientèle d’internautes dans un univers où il est aisé de papillonner. De leur côté, des opérateurs télécom ont essayé, par le passé, de positionner certains de leurs services comme étant le meilleur moyen d’avoir un mode de vie cool, mais avec des résultats généralement décevants : pensons simplement à la croissance extrêmement lente de Vodafone Live !, qui tente de s’établir sur le marché depuis 2003.

Les liens de confiance. Qu’il s’agisse du domaine de la création ou de celui du réel, de musique ou de nouvelles, de films ou de sports, les données numériques sont faciles à copier et à partager : rien de plus simple que de diffuser instantanément des informations grâce à Twitter ou à Facebook. Le hic ? Qui peut dire si ces informations viennent de sources entièrement fiables ? Par conséquent, il est de plus en plus difficile de gagner la confiance des consommateurs.

Cela dit, quand cette relation de confiance est établie, elle permet d’assurer de bons revenus. À titre d’exemple, le Wall Street Journal et le Financial Times — des sources d’information on ne peut plus crédibles — connaissent beaucoup de succès avec leurs services d’abonnements, malgré l’abondance de nouvelles gratuites dans le domaine financier.

Pour ce qui est des entreprises dont les principales compétences sont plutôt de l’ordre du contenu, elles doivent surtout s’en tenir à leurs activités principales et mettre l’accent sur les domaines dans lesquels elles excellent (le talent des journalistes, la qualité de la recherche ou des textes, par exemple), tout en s’efforçant constamment de renforcer la valeur de la marque — ce n’est pas par hasard que Rupert Murdoch a défini la gestion de la marque comme le premier objectif stratégique du Wall Street Journal…

3. Visez de nouveaux débouchés

Si, comme nous l’avons dit, la convergence maximale est impossible à réaliser, l’évolution des technologies numériques, dans certains domaines, ouvre quand même de nouveaux débouchés fort prometteurs, dont les trois principaux consistent à fournir des services numériques qui serviront à : 1) faire de la publicité en ligne ; 2) gérer des droits ; 3) effectuer des transactions financières.

La publicité On le sait, les dépenses publicitaires sur les canaux numériques croissent très rapidement chaque année, et cette tendance est là pour durer : c’est donc assurément un créneau porteur.

Les droits d’auteur La numérisation rend la protection de la propriété intellectuelle de plus en plus difficile ; les entreprises, pour défendre cette propriété, ont donc besoin de systèmes bien adaptés de gestion numérique des droits d’auteur (GNDA). Ces systèmes influenceront ainsi beaucoup les futurs modèles d’affaires des producteurs de contenu.

Les transactions financières. Les besoins en infrastructures solides de paiement en ligne deviennent de plus en plus évidents. Des systèmes comme PayPal sont désormais bien établis et font maintenant concurrence à ceux qui dominaient autrefois le marché, comme ceux de Visa et de MasterCard. Toutefois, dans le domaine des services financiers, c’est probablement sur les marchés émergents qu’on verra les effets les plus importants de la convergence numérique. Un exemple ? Smart Communications, qui, en 2003, a lancé aux Philippines Smart Money, le premier service bancaire et commercial mobile. Aujourd’hui, ce service compte plusieurs millions d’utilisateurs, donne accès à des comptes courants et permet d’effectuer des micro-paiements grâce à la Banco de Oro, l’une des plus grandes banques du pays. D’autres entreprises de télécom ont par la suite créé de tels systèmes, dans des pays comme l’Afrique du Sud, le Kenya et l’Inde, pour fournir des services aux personnes n’ayant pas de compte bancaire.

4.Ouvrez-vous aux autres

Avec Android, Google a mis en place un environnement propice à l’invention de produits, en fournissant notamment aux développeurs de logiciels les outils nécessaires pour créer de nouvelles applications Web. D’autres ont emboîté le pas — Cisco, Motorola et Microsoft — et tentent également de tirer profit de ce créneau.

L’industrie des télécommunications est intéressante de ce point de vue. Les entreprises qui y évoluent s’appuient généralement sur un seul service (par exemple, les services de transfert de données) qu’on peut difficilement considérer comme un produit distinctif sur le marché. C’est pourquoi, dans leur recherche de rentabilité et de pouvoir accru de négociation, les principaux opérateurs télécom utilisent trois grandes stratégies, qui conjuguent souvent matériel, logiciels et autres services.

Créer un jeu de convergence technologique. Plusieurs entreprises de télécom ont commencé par faire converger des réseaux autrefois séparés, afin d’offrir un service intégré et triple (téléphonie fixe, téléphonie mobile et Internet) ou quadruple (en ajoutant la télévision). Cette stratégie consiste à réduire les coûts grâce à des économies d’échelle, à fidéliser la clientèle et à favoriser la croissance grâce à des ventes croisées et en utilisant la technique de la montée en gamme (upselling) — pensons au changement de stratégie de Vodafone qui, de simple opérateur de téléphonie mobile, est passée à fournisseur multiréseau.

Devenir un partenaire de premier plan. Pour augmenter sa clientèle et renforcer son image de marque, et ainsi vendre des services supplémentaires, une entreprise de télécommunications peut s’allier à un partenaire susceptible de lui fournir du contenu ou des services appropriés. À titre d’exemple, Deutsche Telekom s’est associée à Yahoo ! pour offrir la possibilité de faire des recherches efficaces sur Internet à partir d’un cellulaire.

Conjuguer des stratégies. C’est par exemple le cas quand une entreprise de télécommunications se concentre sur la vente en gros de bande passante, pour tenter ainsi de se positionner comme étant le meilleur moyen d’offrir davantage de mobilité ou un accès plus rapide à différents services proposés par d’autres entreprises.

La principale chose à retenir de tous ces phénomènes, c’est qu’une révolution numérique a bel et bien eu lieu et qu’elle a bouleversé le monde que nous connaissions. Finie l’ancienne bataille entre les créateurs et les distributeurs de contenus. Bien entendu, la logique de base n’a pas changé : les producteurs de contenus doivent s’efforcer de créer des contenus attrayants, et les distributeurs, d’attirer les utilisateurs ; mais chacun doit maintenant se demander comment il se positionnera dans ce nouveau monde.

Par ailleurs, si les options qui s’offrent pour atteindre cet objectif peuvent paraître nébuleuses a priori, nos recherches permettent d’y voir un peu plus clair. L’important, ce n’est plus tant de s’intéresser aux scénarios de l’avenir que de se concentrer sur l’exploitation des nombreux débouchés qui, déjà, sont en train de voir le jour. Les entreprises qui tireront leur épingle du jeu seront celles qui s’adapteront le plus rapidement. La révolution numérique est terminée. Vive la révolution numérique !

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