Bombardier-Mitsubishi : une liaison dangereuse

Publié le 17/04/2011 à 10:41, mis à jour le 25/06/2019 à 12:20

Bombardier-Mitsubishi : une liaison dangereuse

Publié le 17/04/2011 à 10:41, mis à jour le 25/06/2019 à 12:20

Dire que les relations sont tendues entre Bombardier et Mitsubishi Heavy Industries (MHI), autrefois de grands partenaires d’affaires, est un euphémisme.

Les directions des deux entreprises ont beau le nier, les deux anciens grands partenaires d'affaires ont vu leurs rapports se détériorer énormément ces dernières années.

Le refroidissement a connu son paroxysme en juin 2007, au Salon international de l'aéronautique du Bourget, où MHI a annoncé au monde et à la barbe de Bombardier sa décision d'aller de l'avant dans la fabrication de son propre avion régional, le Mitsubishi Regional Jet (MRJ).

Bien que toujours à l'état de projet - son premier vol est prévu pour 2012-, cet avion régional est déjà assuré d'entrer en féroce concurrence avec la brésilienne Embraer, bien sûr, mais également et surtout avec le Canadair régional Jet (CRJ) de Bombardier, un avion que Mitsubishi connaît on ne peut mieux.

Et pour cause. C'est au constructeur japonais que la haute direction de Bombardier avait confié la fabrication de l'ensemble des ailes de ses CRJ, au début des années 1990. Une relation qu’elle ne peut que regretter aujourd’hui étant donné la tournure des événements. Une liaison devenue dangereuse.

«À l’époque, ils (Mitsubishi) voulaient apprendre, nous a confié un ancien haut dirigeant de Bombardier, désireux de garder l’anonymat. Ils cherchaient une expérience internationale, obtenir une visibilité sur un programme à succès. C’était très clair pour nous ; autant qu’ils en viendraient un jour ou l’autre à vouloir fabriquer leur propre avion. Exactement, ce qui se produit aujourd’hui.»

Des poursuites ?

Depuis trois mois, la haute direction de Bombardier a refusé net toute entrevue avec Les Affaires au sujet de Mitsubishi et de ses intentions de la concurrencer sur son terrain. Impossible également de savoir si la direction de Bombardier envisage de poursuivre Mitsubishi pour bris de clause de non-concurrence.

Au printemps 2009, le président de Bombardier, Pierre Beaudoin (alors président de sa division aéronautique), nous avait confié son agacement vis-à-vis des agissements de Mitsubishi. Bombardier, avait-il dit, " va prendre toutes les mesures nécessaires pour faire respecter les ententes de non-concurrence qui nous lient ". Il favorisait la négociation, mais n'excluait pas les mesures judiciaires.

" Nous avions des ententes de non-concurrence, avait alors confirmé M. Beaudoin. Si un fournisseur nous dit qu'il ne deviendra pas un concurrent dans le domaine des avions régionaux et qu'il décide (par la suite) de le devenir malgré l'existence d'ententes (le lui interdisant), je pense qu'on doit avoir un minimum de discussions. "

Est-ce que ces discussions ont eu lieu? Impossible de le savoir. Bombardier refuse d’aborder le sujet de quelque manière que ce soit.

Représailles de Bombardier

Toujours est-il que depuis décembre 2009, Mitsubishi s'est vu retirer toute participation dans la fabrication des avions régionaux, Q400 et CRJ de Bombardier. Pourquoi? Officiellement, Mitsubishi était débordée par les mandats de Boeing et devait se départir d'autres contrats. Plusieurs observateurs croient cependant que cette décision en était une de représailles.

Quoi qu’il en soit, en outre, le fuselage arrière des CRJ700 et CRJ 900 ont été transférés à la suisse RUAG Aerospace, une filiale du consortium du même nom, actif surtout dans le secteur de l’armement.

De même manière, le fuselage de l'avion Q400 a été transféré de Mitsubishi à la chinoise Shanghai Aircraft Corporation (SAC), alors que les tâches liées aux commandes de vol du Q400 ont été intégrées à celles de son usine de Querétaro, au Mexique.

La contribution de MHI aux activités de production de composants pour  Bombardier se limite maintenant qu’au fuselage et aux ailes de sa gamme d’avions d’affaires Global, ainsi qu’aux ailes du Challenger 300. Et Dieu seul sait pour combien de temps encore.

Lisez la suite de notre dossier sur l'aérospatiale au Japon la semaine prochaine.

Ce reportage a été réalisé grâce à la Bourse Québec-Japon, décernée à Martin Jolicoeur par la Fédération professionnelle des journalistes du Québec, le Foreign Press Center of Japan et le ministère des Relations internationales du Québec.

À lire aussi : L'aérospatiale, la carte cachée du Japon

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