Que nous réservent l’économie américaine et les marchés en 2024?

Publié le 07/12/2023 à 10:00

Que nous réservent l’économie américaine et les marchés en 2024?

Publié le 07/12/2023 à 10:00

Sept titres n’ont jamais représenté une part aussi importante de la capitalisation boursière de l’indice depuis au moins 1980. (Photo: Getty Images)

À l’horizon 2024, beaucoup d’entre nous sont sur le qui-vive. Une récession mondiale se profile-t-elle encore à l’horizon? Qu’adviendra-t-il de la dette fédérale américaine, qui s’élève à plus de 33 000 milliards de dollars (G$)? Ce chiffre sera-t-il un jour plus facile à concevoir?

Au Canada, le gouvernement s’est engagé, dans sa récente déclaration économique d’automne, à limiter les déficits budgétaires et à éviter d’exacerber les efforts de la banque centrale pour ramener l’inflation à l’objectif de 2% qu’elle privilégie. Le gouvernement libéral a déclaré qu’il veillerait à ce que le déficit budgétaire pour l’exercice en cours, qui se termine le 31 mars 2024, ne dépasse pas 40,1G$, et qu’il réduirait le ratio de la dette par rapport au produit intérieur brut après un sommet de 42,7% en 2024-25. Le Canada devrait enregistrer des déficits budgétaires annuels de l’ordre de 40G$ jusqu’en 2026-27.

Pour l’avenir, les marchés canadiens devraient également être influencés par le principal partenaire commercial du pays, et Jurrien Timmer, directeur principal, Macroéconomie mondiale chez Fidelity Investments, présente aux investisseurs quelques tendances clés à surveiller aux États-Unis.

 

Qu’est-ce qui attend les marchés américains?

«Les marchés parient sur un atterrissage en douceur. L’économie américaine a bien résisté. Nous sommes en fin de cycle et lorsque les taux d’intérêt augmentent, la croissance a tendance à ralentir, explique M. Timmer. Il est plus que probable que nous n’aurons pas de récession, mais un ralentissement, ajoute-t-il. Et comme la situation de l’emploi reste serrée, j’ai l’impression qu’un atterrissage en douceur, phénomène rare, est l’attente par défaut.»

 

Les propriétaires de logements américains résistent aux hausses de taux

«Aux États-Unis, les propriétaires ont bloqué les taux à un bas niveau [au cours de la pandémie] pendant longtemps, ce qui signifie qu’ils sont immunisés contre les mesures prises par la Fed», explique M. Timmer. De nombreux Américains sont passés d’un prêt hypothécaire à taux variable à un prêt hypothécaire à taux fixe.

Le boom de refinancement COVID, qui s’est produit du deuxième trimestre 2020 au quatrième trimestre 2021, a été stimulé par une baisse des taux d’intérêt hypothécaires de près de 200 points de base entre novembre 2018 et novembre 2020.

Les 14 millions de personnes qui ont exécuté cette stratégie continueront à bénéficier de taux d’intérêt historiquement bas, et ils affecteront les marchés hypothécaires dans les années à venir.

 

Les dépenses des consommateurs américains soutenues par la gestion de la dette

Les dépenses de consommation représentent environ 70% du PIB américain. Et comme le souligne M. Timmer, tout le monde a un emploi. Les niveaux d’endettement sont en baisse. Les consommateurs ont géré leur endettement et ceux qui se situent dans les tranches de revenus les plus élevées disposent encore d’une certaine épargne constituée lors de la pandémie. «Les gens voyagent et dépensent — il n’y a aucune preuve de récession ici», affirme-t-il. M. Timmer voit le verre à moitié plein.

Tout au long de l’année 2023, il y a eu quelques cas où l’indice de base de dépense personnelle à la consommation (DPC), mesure de l’inflation qui exclut les prix de l’alimentation et de l’énergie, a augmenté plus que prévu, et à un rythme plus rapide d’une année sur l’autre que le mois précédent.

Il reste à la Fed une chance de relever ses taux en décembre, et elle tiendra compte de l’indice des prix de DPC pour prendre sa décision. Entre-temps, les investisseurs devront intégrer le surclassement relatif de quelques titres dans un environnement incertain.

Les sept mercenaires (Alphabet, Amazon, Apple, Meta, Microsoft, Nvidia et Tesla) ont dominé le marché boursier en 2023 et représentent 29% de la capitalisation boursière du S&P 500. Ce groupe est responsable de près de 70% des gains de l’ensemble du marché boursier cette année, note David Sekera, stratège en chef de Morningstar pour les États-Unis.

 

Les sept mercenaires représentent 70% des gains

Sept titres n’ont jamais représenté une part aussi importante de la capitalisation boursière de l’indice depuis au moins 1980.

«Si l’atterrissage en douceur se produit, que la Fed a presque fini de relever ses taux et que la participation au marché s’élargit, c’est un bon scénario pour 2024, et l’on n’a plus à tout miser sur les sept mercenaires, qui ont dominé pendant si longtemps. Les sociétés à petite capitalisation et les firmes non américaines auront alors par bonheur de bonnes chances de s’en sortir.»

 

La domination des finances publiques

Un autre thème évoqué par M. Timmer est celui de la domination des finances publiques. Il pense que cette nouvelle ère où le gouvernement américain continue d’afficher un déficit persistant va se poursuivre.

«Il est rare de voir des déficits aussi importants en dehors d’une crise», explique-t-il, citant la Seconde Guerre mondiale et la guerre du Vietnam comme exemples de périodes où les États-Unis se sont lourdement endettés.

La dette nationale des États-Unis s’élève actuellement à un peu moins de 34 000 milliards de dollars. En 2024, le déficit devrait augmenter de 1 846 milliards de dollars. «Maintenant, qui va acheter la dette? demande M. Timmer. Le Canada, le Japon et le Royaume-Uni sont tous en déficit. Pour l’instant, la question est de savoir qui a le moins de choses à se reprocher.»

 

Les perspectives des obligations

Pour évaluer les perspectives des déficits nationaux et des investissements dans la dette, il faut garder à l’esprit la durée, explique M. Timmer. Le plus gros de la courbe est un endroit attrayant pour les obligations. Il n’y a pas lieu de s’inquiéter de l’augmentation des primes de terme à longue échéance ou du risque de réinvestissement plus immédiat. Et il y a un réel potentiel de hausse si le cycle de la Fed pivote.

 

M. Timmer nous laisse quelques données mathématiques à ruminer:

L’indice Bloomberg Agg (obligations américaines de qualité supérieure) a une durée de 6 ans et un rendement de 5,5%. La durée mesure la variation du prix des obligations pour chaque variation de 1% du rendement. Ainsi, si les rendements baissent de 1%, l’investisseur gagne 6% en plus du rendement de 5,5%, soit 11,5%. Si les rendements augmentent de 1%, l’investisseur gagne -6% + 5,5%, soit -0,5%. À l’heure actuelle, le rapport risque/rendement des obligations est donc de +11,5% contre -0,5%.

 

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