Premier appel à l'épargne: Lumenpulse ne fait pas exception à la règle


Édition du 14 Juin 2014

Premier appel à l'épargne: Lumenpulse ne fait pas exception à la règle


Édition du 14 Juin 2014

Par Carl Simard

Photo: Shutterstock

Un premier appel public à l'épargne (PAPE) permet à une entreprise de solliciter des capitaux auprès du public pour financer ses différents projets. En échange de son placement, l'investisseur reçoit des actions cotées à la Bourse. À notre avis, la dynamique d'un PAPE l'expose à de forts risques de payer trop cher les actions offertes. Prenons le cas de la récente émission publique de Lumenpulse (Tor., LMP, 18,75$) pour illustrer ce phénomène.

Une belle histoire

Le titre de Lumenpulse a fait son entrée en Bourse le 15 avril à la suite de la diffusion d'un prospectus de 257 pages, une campagne médiatique réussie et de nombreuses rencontres avec des investisseurs potentiels. L'émission a connu un franc succès après avoir écoulé 7,2 millions d'actions ordinaires à 16 $ chacune, totalisant une somme de 115 millions de dollars. Le montant net reçu par l'entreprise montréalaise a été d'environ 105 M$ après une déduction de 6,9 M$ en commissions aux institutions financières agissant comme preneurs fermes (6 % du produit brut du placement) et de frais juridiques d'environ 3 M$. Dès la clôture de la transaction, le placement, comme c'est généralement le cas pour un PAPE, avait déjà perdu environ 9 % de sa valeur en raison de ces frais.

Lumenpulse, fondée il y a huit ans, conçoit, développe et fabrique une large gamme de solutions d'éclairage architectural basées sur la technologie DEL. Ses revenus ont crû d'environ 45 % par an au cours des dernières années, pour atteindre 56 M$ au 31 janvier 2014. La PME dirigée par François-Xavier Souvay mise sur ses avantages concurrentiels et un marché en pleine croissance afin de continuer à croître au même rythme.

Que vaut Lumenpulse ?

Comme c'est souvent le cas au sujet d'un PAPE, plusieurs épargnants ont été emportés par l'euphorie du moment et ont acquis son titre sans avoir déterminé la véritable valeur de l'entreprise. Pourtant, comme pour tout placement, la valeur intrinsèque de Lumenpulse est dictée par les bénéfices qu'elle générera au cours des prochaines années. Plus ceux-ci seront prévisibles et en forte croissance à l'avenir, plus sa valeur intrinsèque sera élevée. L'action de la PME montréalaise se négocie actuellement à plus de 50 fois les bénéfices prévus de 2016, c'est-à-dire un ratio d'évaluation d'environ quatre fois supérieur à la moyenne des entreprises.

Pourtant, cette société d'éclairage n'était pas encore profitable lors de son dernier trimestre clos le 31 janvier 2014, et a accumulé des pertes d'environ 30 M$ depuis sa fondation.

Pour justifier son évaluation, Lumenpulse devra faire croître ses revenus d'au moins 40 % par année, améliorer ses marges brutes de 25 % d'ici quelques années et réduire ses frais de vente et marketing d'au moins 20 %. Ce défi est d'autant plus ambitieux qu'il devra être atteint uniquement grâce à des gains significatifs de productivité et un contrôle serré des coûts. Puisque la firme obtient ses contrats à la suite d'appels d'offres structurés et concurrentiels, il lui sera difficile d'augmenter ses prix de vente. La justification de son évaluation marchande actuelle nécessite donc le port de lunettes roses.

Lumenpulse n'est pas l'exception à la règle. Plusieurs investisseurs emportés par l'euphorie d'un PAPE ont tendance à croire que le prix auquel les actions sont offertes constitue la juste valeur marchande de la société. Pourtant, ce prix a été fixé par la direction de l'entreprise alors qu'elle a à sa disposition plusieurs leviers : le contrôle du moment opportun ; un prospectus éloquent ; l'absence d'analyses publiques effectuées par des tiers objectifs ; et le support de puissantes institutions financières pour promouvoir le titre. Personne ne s'étonnera d'apprendre que plusieurs bons dirigeants et investisseurs, tel Warren Buffett, refusent de participer à des négociations qui font l'objet d'enchères, car celles-ci peuvent faire grimper les prix de façon irrationnelle.

Carl Simard est président de Gestion de portefeuille stratégique Medici, une firme de Saint-Bruno spécialisée dans la gestion de portefeuille privée.

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