Investissement: tout est une question de nuances

Publié le 14/10/2016 à 13:00

Investissement: tout est une question de nuances

Publié le 14/10/2016 à 13:00

Au cours des dernières semaines, quelques événements touchant à des titres que nous détenons en portefeuille m'ont rappelé une chose: il n'y a jamais de certitudes en bourse. Ce n’est jamais, ou très rarement, tout blanc ou tout noir, mais presque toujours une nuance de gris.

De façon générale d’abord, il n'est jamais clair si la Bourse est surévaluée ou sous-évaluée. Même en 2009, qui aurait pu dire avec certitude que la Bourse était une occasion exceptionnelle? Rappelez-vous à quel point les perspectives économiques paraissaient alors sombres. Et en 2000? Était-il évident que la Bourse était globalement surévaluée et sur le point de connaître une sévère correction? Si c'est le cas, comment expliquer que tant d'investisseurs se soient fait prendre les pantalons baissés? Tout paraît évident après les faits, mais rarement dans le moment présent.

Le même constat s’applique à un titre boursier. Pouvez-vous franchement dire que vous ayez déjà investi dans un titre boursier avec une totale certitude d’obtenir un rendement substantiel? Pour ma part, en plus de 26 ans dans le monde de l’investissement, je ne crois pas que ça me soit encore arrivé. Quelle que soit l'entreprise dont vous convoitiez le titre, il y a toujours des doutes, des incertitudes. La route vers le succès boursier n'est jamais clairement tracée.

Quelques sociétés parmi celles dont nous détenons le titre en portefeuille m'ont rappelé cette évidence au cours des dernières semaines.

Premier exemple: le gouvernement canadien a annoncé récemment un resserrement des règles dans le marché immobilier canadien. Comme dans bien des cas, je vois cette annonce comme étant teintée de gris: d'une part, je crois qu’elle est positive à moyen terme pour l'industrie immobilière canadienne, car elle devrait éliminer les excès qui semblent toucher le marché immobilier de certaines régions du pays; mais, d'autre part, ces règles pourraient aussi avoir pour effet de ralentir sensiblement le marché immobilier et mener à des baisses de prix à travers le pays.

Deuxième exemple: nous avons appris qu'une des sociétés dont nous détenons le titre aurait versé des pots-de-vin en Inde pour faciliter la construction de certaines de ses installations dans ce pays. Peu importe l’endroit dans le monde où elles font des affaires, de telles malversations sont illégales pour les entreprises américaines. D'un autre côté, aucune information n'a été divulguée quant à la teneur de ces versements. En outre, à la défense de la société, ses dirigeants auraient eux-mêmes divulgué ces méfaits aux autorités américaines. Encore une fois, on est en zone grise...

Enfin, depuis quelques semaines, une des plus grandes banques américaines a fait les manchettes parce que certains de ses employés auraient ouvert illégalement jusqu’à deux millions de comptes bancaires à l’insu de ses clients. C'est certainement une faute grave que je ne voudrais pas minimiser. Mais il y a lieu à mon avis de se demander si cette fraude aurait été autant médiatisée si elle n'était pas survenue en pleine campagne présidentielle. Gris foncé?

Si comme moi vous cherchez à investir dans des titres sous-évalués, il vous faudra inévitablement vous pencher sur ces zones grises. Si un titre se vend à rabais, c’est probablement parce qu’il y a de bonnes raisons pour expliquer cette sous-évaluation. Le travail de l'investisseur est de faire la part des choses, de se demander si les facteurs négatifs qui pèsent sur le titre sont temporaires ou s’ils sont plus que compensés par les facteurs positifs.

Si vous cherchez à investir seulement dans des titres de sociétés qui semblent à l'abri de tout facteur négatif (je doute que cela existe), attendez-vous à payer le gros prix. Les titres des sociétés les plus admirées s’échangent la plupart du temps à prime par rapport aux titres des autres sociétés.

Le chasseur d'aubaines doit constamment évoluer dans un monde teinté de diverses nuances de gris.

Philippe Le Blanc, CFA, MBA

À propos de ce blogue : Philippe Le Blanc est président et chef des placements chez COTE 100, une boutique de gestion de portefeuille. Il est également éditeur de la Lettre financière par COTE 100, publiée mensuellement depuis 1988.

Blogues similaires

Bourse: Meta Platforms victime de son succès

26/04/2024 | Denis Lalonde

BALADO. À son niveau actuel, le titre de Meta Platforms est intéressant, estime François Rochon, de Giverny Capital.

Encore trop tôt pour sauter dans l’arène

Édition du 14 Juin 2023 | Dominique Beauchamp

ANALYSE. Les banques canadiennes pourraient rester sur le banc des pénalités quelque temps encore.

Productivité: les entreprises doivent investir davantage

22/04/2024 | Pierre Cléroux

EXPERT. Depuis 2019, le Canada a enregistré le plus faible rythme de croissance de productivité parmi le G7.