La loi de l'offre et la demande chez Uber

Publié le 16/10/2016 à 10:00

La loi de l'offre et la demande chez Uber

Publié le 16/10/2016 à 10:00

(Photo: Bloomberg)

Hier, le groupe de musique Coldplay mettait en vente ses billets pour son spectacle de Montréal, qui sera produit en août 2017. Peu de temps après la mise en vente, il n’y avait plus de billets disponibles. Pourtant, à peine quelques minutes plus tard, on pouvait en trouver sur des sites servant d’intermédiaires, permettant la revente à des prix bien plus élevés! Cela survient constamment, et froisse les consommateurs qui n’ont pu faire preuve d’assez de rapidité pour saisir l’opportunité, surtout lorsque l'on sait que les revendeurs raflent un gain rapide.

Il y a un mois, une explosion avait lieu à New York, créant une certaine panique chez les gens qui tentaient de fuir les lieux. Certains d’entre eux auraient tenté d’utiliser Uber, et à leur grande surprise, les tarifs s’avéraient nettement plus élevés qu'en temps normal. La demande pour le service surpassait temporairement l’offre, ce qui est tout naturel lors d’un tel événement. Or, plusieurs utilisateurs ont été outrés de la situation, faisant allusion au fait qu’Uber ne doit pas profiter d’une catastrophe pour s’en mettre pleins les poches!

Comprendre le pouvoir des incitatifs

N'oublions pas que la majeure partie du tarif est gagnée par le conducteur. Si Uber ne haussait pas les prix, les chauffeurs seraient-ils enclin à aller près des scènes de catastrophe afin d’offrir du transport aux personnes en détresse? Imaginez le tableau: vous êtes chauffeur chez Uber et vous entendez parler d’une explosion pas loin d’où vous êtes. La circulation est soudainement dense, car beaucoup de gens tentent de s’éloigner du lieu en question. Vous recevez une multitude d’offres de transport (clients à prendre). Lequel choisir? Pourquoi prendre le risque de s’approcher d’un endroit potentiellement dangereux? Ne sachant pas vraiment ce qui se passe, aurez-vous envie de risquer votre vie pour la rémunération usuelle?

Et si en tant que chauffeur régulier, vous n’étiez pas en train de travailler à ce moment précis, allez-vous être incité à joindre le réseau pour répondre à la demande soudaine si les prix sont de toute façon les mêmes que d’habitude? N’allez-vous pas faire un petit effort supplémentaire si vous voyez que votre rémunération pourrait doubler ou tripler?

Uber a compris l’enjeu des incitatifs, qui exercent un impact puissant sur le comportement des gens. Nous en avons vu un bel exemple chez Wells Fargo (N.Y., WFC). À noter qu’un incitatif peut-être positif ou négatif. L’important consiste à l’utiliser sagement et de la bonne façon. Par exemple, dans bien des institutions financières et dans d'autres domaines, on récompense trop les nouvelles ventes, mais pas la fidélisation des clients. Il suffit de penser aux rabais consentis aux assurés par les compagnies d’assurance lorsqu’ils changent de fournisseur, ou encore, aux escomptes quand on passe de Bell à Vidéotron, ou vice-versa.

Uber pourrait annoncer demain matin qu’elle renonce à sa part de profits sur les courses dont le tarif grimpe. Comme elle perçoit environ de 20% à 25% de la facture, cela ne changerait pas grand-chose pour l’utilisateur. Cependant, le message serait clair à l’effet que les hausses existent pour «inciter» plus de chauffeurs à joindre le réseau pour répondre à la demande. Va-t-on blâmer de tels travailleurs de vouloir gagner plus?

L’inconvénient de cet incitatif, c’est le prix. L’inconvénient de ne pas en avoir, c’est la pénurie! La question à se poser: préfère-t-on avoir le choix entre payer plus ou moins cher, ou préfère-t-on se faire imposer systématiquement une pénurie?

Si l’on veut satisfaire la demande adéquatement, on doit permettre les incitatifs pour que l’offre s’ajuste. Il s’agit d’un principe de base en économie.

Au sujet des auteurs du blogue: Patrick Thénière et Rémy Morel sont analystes financiers et propriétaires de Barrage Capital, une firme montréalaise de gestion d'actifs. www.barragecapital.com

À propos de ce blogue

Patrick Thénière et Rémy Morel sont associés et gestionnaires de portefeuille chez Barrage Capital, une firme montréalaise de gestion d'actifs. www.barragecapital.com

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