BLOGUE. Ainsi, le premier vol du CSeries est reporté au mois de juin. Il n’y a pas matière à panique, mais il est souhaitable que la prochaine échéance ne soit pas ratée.
Allons-y avec quelques interrogations en cascades.
1-Y a-t-il un risque que Bombardier manque d’argent?
En début d’année, la direction avait indiqué qu’il lui en coûterait 2 G$ d’investissements en capital dans ses projets aéronautiques (CSeries et Learjet 85) pour 2012 et que cette somme serait épongée à même ses flux de trésorerie (l’argent qui entre moins celui qui sort).
La direction a prévenu mercredi qu’il allait finalement rentrer en 2012 pas mal moins d’argent qu’elle ne l’anticipait initialement. Elle tablait sur 2G$, il en rentrera finalement 1,2 G$. C’est 800 M$ de moins, qui doivent être épongés par l’encaisse. L’écart avec le pronostic est principalement attribuable au fait que l’on attendait des commandes d’avions (de toutes sortes) qui ne sont pas venues et qu’en conséquence moins de dépôts et de paiement d’étape ont été reçus. En clair, le marché a nettement moins rebondi que ce à quoi s’attendait Bombardier.
Avec le report du premier vol, Bombardier s’attend pour 2013 à encore devoir injecter 2 G$ en dépenses en capital dans l’aéronautique. Elle n’était malheureusement pas prête mercredi à donner un aperçu de ses flux de trésorerie pour l’an prochain (elle le fera plutôt après les résultats de son quatrième trimestre).
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Postulons une année identique à celle qui se termine, avec 1,2 G$ de flux. C’est encore conséquemment un manque à gagner de 800 M$ qui viendra diminuer les liquidités en 2013.
Bombardier devrait avoir à la fin de 2012 pour près de 4,5 G$ de liquidités. Ses conditions de crédit stipulent qu’elle doit en conserver pour 1,2 G$ à la fin de chaque trimestre. Les liquidités réelles sont donc de 3,3 G$. Il y a aussi d’inclus dans ce montant pour 1,4 G$ de lignes de crédit non utilisées. Par conservatisme, on ne les comptera pas. Au cas où, en 2015, lors de leur renouvellement, les banques soient hésitantes face à une situation aéronautique difficile. On est finalement à 1,9 G$.
On le voit, il y a assez d’espace pour accueillir le nouveau 800 M$ de manque à gagner. Il ne semble pas y avoir de danger que Bombardier manque d’argent à cause du délai.
2-Qu’en est-il pour la rentabilité du projet?
Un certain nombre de questions ont porté sur cet aspect au cours de la conférence téléphonique.
Pierre Beaudoin a estimé que le plan d’affaires prévoyait déjà des postes d’imprévus et qu’un retard de cinq ou six mois ne changeait pas l’économique du projet.
Évidemment, tout le monde aura compris que le projet coûtera plus cher à Bombardier, mais celle-ci a encore une bonne espérance de rendement sur celui-ci.
Au point où on en est, cette question n’est plus vraiment pertinente. Le CSeries est maintenant à ce point avancé (2,6 G$ investis) que même si de nouveaux retards venaient enlever à peu près tout rendement au projet, il serait vraisemblablement complété. On chercherait toujours à faire de l’argent avec les avions, mais on conviendrait que le projet a été une erreur et que l’argent aurait dû dès le départ être affecté ailleurs ou redistribué aux actionnaires.
3-Quelles seraient les conséquences d’un nouveau retard?
Question difficile.
Côté financier, comme on l’a vu précédemment, les liquidités de l’entreprise semblent être en mesure de digérer un deuxième report (on s’approcherait du niveau d’encaisse minimum, mais avec encore 1,4 G$ de lignes de crédit).
En Bourse, le cours de l’action de Bombardier reculerait cependant assez fortement. On se rapprocherait en effet des premières dates de livraisons (2014). Il y aurait probablement des pénalités qui s’exerceraient en raison de retards, si ce n’est des annulations de commandes. Et les investisseurs se mettraient à douter de l’accouchement et de la présence même d’un marché.
4-Quelles seraient les conséquences d’un vol dans les temps?