Le bréviaire de l'investisseur

Publié le 10/09/2011 à 00:00, mis à jour le 13/09/2011 à 14:22

Le bréviaire de l'investisseur

Publié le 10/09/2011 à 00:00, mis à jour le 13/09/2011 à 14:22

BLOGUE. Plus ça baisse, plus le marché devient attrayant. Avec Jarislowsky et Buffett qui disent ouvertement être acheteurs de ce marché baissier pour le long terme, l'idée nous est venue de partager avec vous notre bréviaire.

Beaucoup sont appelés, peu sont élus. Il y aura peut-être des occasions formidables dans les prochains mois. Il y aura aussi beaucoup d'ivraie. Comment naviguer dans tout cela ? Des années d'observation et d'erreurs (fort bon rendement en cette matière...) nous ont amené à adopter quelques règles très personnelles pour mieux naviguer en période de creux et de bulle. Voici nos 10 commandements.

Tu penseras par toi-même

Trop d'investisseurs suivent le troupeau et ne prennent pas le temps de se forger leur propre opinion. Ainsi, ce n'est pas parce qu'un titre chute de moitié et que tous se lancent à ses trousses qu'il faut faire de même.

Un jour, dans une salle d'attente, la conversation s'engage avec un analyste qui étudie toutes sortes de graphiques. "Nortel, c'est bon à 66 $, regarde...", dit-il. À l'époque, le titre revenait des 120 $.

"Achète", dit immédiatement le chroniqueur à son courtier.

Deux ans plus tôt, ce même chroniqueur écrivait pourtant : "À 66 $, le titre de Nortel est beaucoup trop cher. Pour justifier un tel prix, il faudrait à la société un marché non pas international, mais interplanétaire..."

On connaît la suite.

Tu te méfieras des tuyaux

"Surveille ça, la grosse nouvelle qui sortira lundi. Je vais être riche, c'est sûr. J'ai parlé au président et tout misé là-dessus. Je suis même allé sur marge", nous dit un jour un ami croisé au cinéma.

Le lundi, rien. Ou plutôt, effondrement.

Les seuls qui se sont enrichis ont été les sociétés de spaghetti, dont l'ami devint pour longtemps un fidèle client. C'est tout ce qu'il mangeait afin d'épargner et de redresser sa situation financière. Les petits investisseurs n'ont jamais de tuyaux.

Toujours rester au fondamental.

Pour la clôture, tu ne t'élanceras pas

C'est la sempiternelle histoire de ne pas mettre tous sesoeufs dans le même panier. L'exemple qui précède parle par lui-même. Les prochains mois risquent d'amener certaines aubaines qui, finalement, n'en seront pas.

Si l'on mise sur un seul frappeur de puissance, on se fait sortir en même temps que lui. Il ne s'agit pas de placer son avoir à trop d'endroits (sinon on ne parvient pas à accumuler une masse critique), mais il vaut mieux compter sur quelques acteurs.

La spéculation, tu ne toucheras pas (et si tu touches, tu vendras rapidement !)

Un tiens vaut mieux que deux tu l'auras. Immanquablement, la loi de la moyenne a fini par nous ramener à la maxime.

Si vous désobéissez au commandement, êtes dans le junior minier, à profit, et pensez partir deux semaines en Europe, ce n'est pas une bonne idée de se dire qu'on avisera au retour sur l'à-propos de vendre. Il s'en trouve au moins un à qui ça a déjà coûté le prix d'un deuxième voyage...

Des forts multiples, tu t'éloigneras

Acheter Coca-Cola à 36 fois les bénéfices en 2000 n'était pas une bonne idée. Même si, historiquement, la société avait toujours affiché un multiple élevé. Il a fallu près de 10 ans pour récupérer la mise, malgré une modeste croissance des bénéfices. Et, encore, on ne tient pas compte du taux de change. Généralement, un multiple devrait s'aligner sur le taux de croissance des bénéfices.

Tu ne tomberas pas amoureux d'une société

Se mettre à boire du Coke pour soutenir les activités déclinantes de votre investissement est révélateur que quelque chose ne fonctionne pas dans la relation... Il faut surveiller les fondamentaux, et si quelque chose a évolué depuis, il faut être prêt à reconnaître que l'on a pu se tromper et à vendre.

Tu n'investiras que dans ce que tu comprends

Cela veut dire comprendre comment la société fait son argent. Ne pas juste savoir dans quel secteur elle évolue. Enron et WorldCom étaient vraiment des machines à imprimer de l'argent. Mais combien d'investisseurs pouvaient expliquer une telle croissance ?

Aucune question tu n'esquiveras

Malgré le potentiel apparent d'une entreprise, il ne faut pas avoir peur de sonder ses faiblesses. Par exemple, la biotech Oralife avait développé un produit révolutionnaire pour faire baisser la carie dentaire. Les assureurs collectifs s'y seraient sûrement intéressés. C'était toutefois un antibiotique. Les assurés voudraient-ils le prendre ? "Personne ne pose la question, ce doit être secondaire. Embarquons." Deux ans plus tard, la firme était en liquidation, et notre mise, perdue.

Avec l'échappatoire fiscale, doublement tu calculeras

Il est souvent étonnant de voir avec quelle rapidité des investisseurs envoient leur argent dans des placments dotés d'avantages fiscaux. Si l'avantage existe bel et bien, c'est généralement signe d'un risque très élevé ou d'un faible rendement. Doublement, il faut calculer.

De tes erreurs, tu apprendras

Certainement le plus difficile de tous les commandements.

À propos de ce blogue

Diplômé en droit de l'Université Laval, François Pouliot est avocat et commente depuis plusieurs années l'actualité économique et financière. Il a été chroniqueur au Journal Le Soleil, a collaboré au Globe and Mail et dirigé les sections économiques des différentes unités de Quebecor Media, notamment la chaîne Argent. Au cours de sa carrière, il a aussi fait du journalisme d'enquête ce qui lui a valu quelques distinctions, dont le prix Judith Jasmin. La Bourse Southam lui a notamment permis de parfaire son savoir économique à l'Université de Toronto. François a de même été administrateur de quelques organismes et fondation. Il est un mordu des marchés financiers et nous livre son analyse et son point de vue sur diverses sociétés cotées en bourse. Québec inc. sera particulièrement dans sa mire.

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