Électeurs, électrices, électricité

Publié le 02/08/2012 à 09:23, mis à jour le 02/08/2012 à 09:23

Électeurs, électrices, électricité

Publié le 02/08/2012 à 09:23, mis à jour le 02/08/2012 à 09:23

BLOGUE. Ça y est: nous irons aux urnes le 4 septembre. Temps de parler électricité.

On voulait venir sur le sujet depuis quelques jours, mais l'actualité s'est chaque fois bousculée, forçant le report de la discussion.

Deux choses ont été particulièrement étonnantes ces dernières semaines dans le blitz d'annonces préélectorales du gouvernement du Québec. L'arrivée d'une autre usine de cogénération à la papetière White Birch de Québec, et un nouvel appel d'offres pour de l'éolien au Québec. "Bonnes nouvelles" ont semblé unanimement convenir les différents acteurs politiques (le gouvernement par son discours, l'opposition par son silence). Pourtant…

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L'annonce d'une nouvelle usine de cogénération à la Stadacona de Québec nous a d'abord fait sourciller. Attention, on ne dit pas qu'une intervention gouvernementale n'était pas nécessaire sous une forme ou une autre pour rétablir (à tout le moins partiellement) ce qui apparaît une carence de système pour les retraités de l'entreprise. L'intervention visait toutefois beaucoup plus largement, avec l'objectif de préserver le plus possible d'emplois.

Le soupir de soulagement (tout à fait normal) accompagnant l'annonce a curieusement emporté avec lui une question tout de même assez pertinente: à quel coût opère-t-on ce sauvetage?

C'est Hydro-Québec qui achètera l'électricité produite par la Stadacona. Une forme d'appel d'offres pour 150 MW était déjà en cours avec des paramètres prédéterminés. L'électricité sera normalement acquise au coût de 10,6 cents le kilowattheure.

À quel prix sera-t-on capable de la revendre sur le marché américain? Au dernier trimestre, Hydro-Québec a réussi à obtenir 4,7 cents pour ses exportations, grâce notamment à ses transactions sur le marché à terme. Sinon, elle aurait reçu 3,8 cents.

C'est ça, vous voyez tout de suite que quelque chose ne fonctionne pas. Hydro-Québec est assurée de faire une perte avec cette électricité, et qui dit ponction dans son bénéfice, dit aussi transmission automatique aux finances publiques du gouvernement du Québec et obligation de combler la différence à quelque part (généralement en coupant dans les coûts ou un programme ou en haussant tarifs et impôts).

-Bof, il ne s'agit que d'un contrat de 9 MW avec la Stadacona, dira-t-on.

Pas vraiment. Il y a quelques jours on s'est par hasard mis à recenser le nombre d'usines et de projets d'usines de cogénération au Québec. Il y a celle de Fibrek (33 MW), celle de Tembec dans le Témiscamingue (50 MW), celle de Thurso (18,8 MW), celle de Lebel-sur-Quévillon (26 MW), celle de Dolbeau (26 MW), et les autres que l'on ne connaît pas. Bien plus de mégawatts demandés que les 150 de l'appel d'offres.

"Vous savez monsieur Pouliot que la Régie de l'énergie vient d'autoriser un deuxième appel d'offres de 150 MW pour répondre à la demande", a dit Hydro, lorsqu'on lui a présenté le calcul.

Constat: nous sommes en train de pousser la consolidation d'emplois encore plus loin. Et d'ajouter des opérations déficitaires chez Hydro.

Un geste d'autant questionnable, que l'on n'a pas besoin de cette électricité, le Québec étant en surplus pour bien des années encore (sous cet angle, l'électricité achetée à 10,6 cents peut aussi être vue comme n'étant même pas revendue…).

Même question pour l'éolien

À propos de ce blogue

Diplômé en droit de l'Université Laval, François Pouliot est avocat et commente depuis plusieurs années l'actualité économique et financière. Il a été chroniqueur au Journal Le Soleil, a collaboré au Globe and Mail et dirigé les sections économiques des différentes unités de Quebecor Media, notamment la chaîne Argent. Au cours de sa carrière, il a aussi fait du journalisme d'enquête ce qui lui a valu quelques distinctions, dont le prix Judith Jasmin. La Bourse Southam lui a notamment permis de parfaire son savoir économique à l'Université de Toronto. François a de même été administrateur de quelques organismes et fondation. Il est un mordu des marchés financiers et nous livre son analyse et son point de vue sur diverses sociétés cotées en bourse. Québec inc. sera particulièrement dans sa mire.

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