La qualité architecturale mise en péril

Publié le 20/06/2009 à 00:00

La qualité architecturale mise en péril

Publié le 20/06/2009 à 00:00

Par Claudine Hébert

Plusieurs architectes dénoncent la formule des partenariats public-privé (PPP) privilégiée par le gouvernement Charest pour la construction d'édifices publics. Les PPP sacrifient la qualité architecturale, déjà souvent pauvre au Québec, au profit des considérations financières, ont dit plusieurs professionnels interviewés pour la rédaction de ce cahier.

L'architecte François Dufaux est de cet avis. Ce chargé de cours qui enseigne la pratique professionnelle à l'École d'architecture de l'Université Laval est pourtant prêt à donner une chance à un modèle qui a fait ses preuves en Europe. « Les PPP pourraient fort bien répondre aux besoins du Québec. Mais pour le moment, il y a beaucoup trop d'improvisation de la part de l'administration gouvernementale, ce qui a pour effet de disqualifier le processus », soutient-il.

Le manque de transparence est en cause

Selon M. Dufaux, il n'est pas normal que la qualité architecturale et les coûts des projets soient jugés conjointement par des comités qui comptent rarement des architectes parmi leurs membres.

Les projets sont généralement accordés à de grands consortiums d'ingénierie au sein desquels la voix des architectes compte peu.

En fait, les architectes reprochent au processus de sélection actuel des PPP de manquer de transparence.

« Que ce soit pour la salle de l'Orchestre symphonique de Montréal [dont la construction vient d'être annoncée au coût de 259 millions de dollars], le Planétarium ou tout autre projet en PPP, ne serait-il pas normal que le grand public soit consulté avant la prise de décision finale ? » demande André Bourassa, président de l'Ordre des architectes.

« Il s'agit après tout d'un bâtiment construit en partie grâce aux fonds publics. Pourquoi nos gouvernements camouflent-ils les différentes propositions mises sur la table ? » ajoute-t-il.

Selon M. Bourassa, voilà une autre occasion ratée de parler d'architecture sur la place publique. L'évaluation architecturale d'un immeuble appartenant au gouvernement devrait être expliquée sur la place publique dès le départ. « Il s'agit d'infrastructures appelées à franchir les décennies. Québec devrait imiter les Allemands et faire de ses projets des édifices exemplaires », souligne pour sa part M. Dufaux.

Se doter d'une politique architecturale

Au Royaume-Uni, pays considéré comme le berceau des PPP, on estime que les collaborations public-privé ne conviennent pas toujours aux bâtiments dits évolutifs, c'est-à-dire appelés à être modifiés à long terme.

Un constat qui a amené les Britanniques, tout comme les Français, à doter leur agence des PPP d'une politique architecturale qui impose au gouvernement des exigences formelles. L'Agence des PPP du Québec tarde à faire de même, dit M. Dufaux.

« Les Britanniques reconnaissent que les PPP fonctionnent bien dans certains usages simples et constants, comme les autoroutes, par exemple. Mais la formule connaît des ratés lorsque les bâtiments sont appelés à être rénovés, notamment les hôpitaux », indique M. Dufaux, qui précise que les centres hospitaliers doivent s'adapter aux technologies régulièrement.

La semaine dernière, la coalition CHU sans PPP, formée de médecins et d'autres professionnels de la santé, a justement dénoncé ce manque de flexibilité du modèle appliqué à la construction des hôpitaux universitaires. Des institutions qui doivent constamment être à l'avant-garde des technologies médicales.

Le Québec en a-t-il pour son argent ?

En somme, plutôt que de se concentrer sur le prix d'un projet, le gouvernement devrait davantage s'interroger sur la valeur que la société obtiendra pour ce prix.

« C'est un peu comme aller dans un restaurant-minute. On prend un hamburger, des frites, une boisson gazeuse et un chausson. Et que constate-t-on au moment de payer ? Que le prix est similaire à celui d'une table d'hôte dans un meilleur resto », conclut M. Dufaux.

dossiers@transcontinental.ca

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