" Nous allons faire sauter les barrières qui se trouvent entre nous et les clientes "

Publié le 09/10/2010 à 00:00

" Nous allons faire sauter les barrières qui se trouvent entre nous et les clientes "

Publié le 09/10/2010 à 00:00

Par Diane Bérard

Caryn Lerner a tenu la barre dans la tempête. Sous sa direction, Holt Renfrew a fermé des magasins, dont celui du Centre Rockland, à Montréal. En janvier dernier, cette Américaine a cédé sa place au Canadien Mark Derbyshire. Jeune quadragénaire, il occupait le poste de " chef des talents " (chief talent officer) chez Wittington Investement, propriétaire de Holt. Mme Lerner n'a pas eu la partie facile, mais le défi de Mark Derbyshire, piloter la sortie de crise, n'est pas gagné d'avance. Il possède les ingrédients - les marques, la réputation, un investisseur aux poches pleines - mais réussira-t-il la recette ? Nous l'avons rencontré lors de son passage au magasin-phare de la rue Sherbrooke, à Montréal.

Diane Bérard - Vos clientes avouent être infidèles. Que comptez-vous faire pour qu'elles n'aillent plus voir ailleurs ?

Mark Derbyshire - Combler tous leurs besoins ! Holt Renfrew a longtemps été le lieu où dénicher le vêtement ou l'accessoire unique, celui que les fashionistas (N.D.L.R. 70 % de la clientèle de Holt Renfrew se compose de femmes) ne trouvaient nulle part ailleurs. Nous avons d'ailleurs élaboré notre publicité autour de cette image en mettant de l'avant les pièces uniques que nous offrons à notre clientèle. Cependant, cela ne suffit plus. Depuis que j'occupe ce poste, toutes les clientes et ex-clientes me répètent le même message : " Je veux aller chez Holt pour ma robe de bal, mais je désire aussi y trouver mes vêtements, mes accessoires et mes chaussures pour le week-end, le travail, les voyages... "

D.B. - Peut-on s'attendre à des changements radicaux de votre offre ?

M.D. - Non. Nous conservons la même cible, la cliente amoureuse de la mode et du luxe. Nous allons simplement lui offrir plus de tout : plus de tailles, plus de modèles, plus de gammes de prix, plus de variété.

D.B. - Holt Renfrew est-elle prisonnière de son image ?

M.D. - Disons que nous allons consacrer beaucoup d'efforts à faire sauter les barrières qui se trouvent entre nous et les clientes. Prenons le prix, par exemple. Ce mois-ci, nous lançons deux produits conçus sur mesure pour Holt Renfrew, une tuque de marque Canada Goose à 50 $ et un sac du designer Marc Jacobs à 48 $. Ces articles, bien en-dessous de 100 $, serviront à attirer en magasin les clientes hésitantes. Quant à celles qui sont intimidées lorsqu'elles franchissent le seuil de nos magasins et qui ne savent pas où se diriger, elles pourront compter sur nos nouveaux ambassadeurs pour venir à leur rescousse. Nous avons recruté sept employés, habillés par la designer torontoise Pink Tartan, pour sillonner les étages à la recherche de clients " égarés " à qui venir en aide. Notre offensive de rapprochement engage aussi le reste de notre personnel : désormais, chaque vendeur porte une jolie broche rose sur ses vêtements où apparaît son nom. Impossible de la manquer !

D.B.- Vous envoyez vos vendeurs dans les grandes capitales de la mode voir ce qu'on y offre. N'est-ce pas plutôt le rôle des acheteurs ?

M.D. - Plus maintenant, c'est une autre barrière qui saute. Désormais, nos vendeurs échangent régulièrement avec nos acheteurs, car chaque groupe possède un morceau du puzzle. Les vendeurs côtoient les clientes tous les jours, ils savent ce qu'elles achètent et n'achètent pas, et ce qu'elles aimeraient bien acheter mais ne trouvent pas. Les acheteurs, eux, parcourent le monde. Ils savent ce qui est offert et ce qui va l'être. Maintenant que nos vendeurs vont flairer l'air de Milan, Paris et New York, ils peuvent déterminer ce que les clientes voudraient acheter. Cette information supplémentaire nous permettra d'ajuster notre offre.

D.B. - Votre père et votre grand-père étaient des franchisés Canadian Tire. Que vous ont-ils appris du commerce de détail ?

M.D. - À me rapprocher de mes fournisseurs. Nos discussions du souper m'ont enseigné l'importance de savoir ce que mes fournisseurs préparent et à quoi ressemblera leurs prochaines collections. Je dois aussi comprendre où ils veulent mener leur marque pour pouvoir les accompagner. Plus je suis proche de mes fournisseurs, mieux je peux exploiter le pouvoir d'attraction de mes marques.

D.B.-Quel est le principal défi d'une boutique de mode comme Holt Renfrew ?

M.D. - Le même que celui de n'importe quel commerce de détail : moduler sa vitesse. Trop avant-gardiste, on perd sa pertinence. Le client ne suivra pas. Si on ne le surprend pas suffisamment, il ira voir ailleurs. Il faut oser juste assez, sentir jusqu'où on peut repousser les limites. Cela suppose d'offrir les articles que la cliente voit ce mois-ci dans les pages de Vogue et d'Elle, mais aussi ceux qu'elle y trouvera demain. D'où la nécessité d'une connaissance parfaite, et en temps réel, de sa clientèle.

D.B. - La cliente de Holt Renfrew achetera-t-elle bientôt en ligne ?

M.D.- Vous voulez savoir où nous allons ? Visitez le site de Selfridges (N.D.L.R. Holt Renfrew, Selfridges et Brown Thomas appartiennent à Wittington Investments, la société privée de la famille Weston. Les Weston sont aussi propriétaires du Groupe Weston, une société du TSX qui détient Loblaw). Selfridges a inauguré son site le printemps dernier. Nous suivons l'expérience de près et prévoyons lancer notre plateforme de commerce électronique d'ici 18 à 24 mois. D'ailleurs, la vente en ligne du sac Marc Jacobs à 48 $ constitue un premier test. Dans ce dossier, notre défi est de reproduire en ligne l'expérience Holt vécue en magasin. Je ne veux pas qu'acheter sur notre site soit l'équivalent de se procurer un produit banal.

D.B.- Ouvrirez-vous des boutiques Holt Renfrew à l'étranger ?

M.D.- Non. L'ambition de la famille Weston est d'offrir l'expérience de magasinage la plus extraordinaire de chacune des sept villes canadiennes où nous sommes présents. C'est là que je concentrerai mon énergie.

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