La biométrie tuera-t-elle le mot de passe?


Édition du 07 Mars 2015

La biométrie tuera-t-elle le mot de passe?


Édition du 07 Mars 2015

Karl Martin, pdg de Nymi.

Julien Blin, pdg de Gizworld, une firme californienne de consultation spécialisée en ordinateurs vestimentaires, attache pour sa part une seconde condition à la popularité de la biométrie : «On s'en va vers la biométrie, mais il faut que ce soit très simple. Les technologies qui s'imposeront sont celles qui ne demandent aucun effort, comme la technologie de reconnaissance de battements cardiaques des bracelets de Nymi ou la technologie d'identification vocale de Sensory, qu'on retrouve dans la montre intelligente de Motorola.»

Fondée en 2011, l'entreprise torontoise Nymi, qui fait partie de la FIDO Alliance, semble ainsi réunir les conditions gagnantes. Sans surprise, elle a obtenu 15,4 millions de dollars de financement à ce jour et compte MasterCard parmi ses investisseurs.

Son bracelet doté d'un électrocardiographe permet d'identifier la signature unique du battement cardiaque de chaque individu. Le bracelet mesurant le battement constamment, la technologie permet de s'assurer que l'utilisateur est bien celui qu'il prétend être en temps réel, ce que ni les lecteurs d'empreintes digitales ni les mots de passe ne peuvent faire.

La technologie de Nymi est déjà fonctionnelle, mais elle n'a pas encore été commercialisée à grande échelle. On peut toutefois commander son bracelet sur son site Web sous la forme d'un kit destiné aux développeurs au prix de 149 $.

À terme, Karl Martin, pdg de Nymi, croit que son bracelet pourra remplacer le mot de passe pour effectuer des paiements en magasin ou pour accéder à divers services en ligne. À court terme, il mise sur le marché des entreprises, où le mot de passe peut être supplanté plus rapidement que dans la société dans son ensemble. Malgré tout, Karl Martin considère que la mort du mot de passe va de soi : «Je déteste faire des prédictions, mais je pense que ce serait très prudent de dire que d'ici 10 ans, le mot de passe ne sera plus la norme.»

Jean-Loup Le Roux, consultant en cybersécurité chez I&I Strategy, ne croit pas que le mot de passe disparaîtra de sitôt. «Il n'y a pas d'approche miracle, mais c'est clair qu'on va assister à une multiplication des facteurs d'identification, qu'on combinera en fonction des différents cas d'utilisation», reconnaît-il néanmoins. L'authentification à deux facteurs, qui est déjà la norme pour de nombreux services, devrait ainsi évoluer au-delà de la combinaison mot de passe-téléphone cellulaire. Par exemple, la reconnaissance faciale pourrait être combinée à un mot de passe, mais aussi à une carte à puce, par exemple.

Un combat partagé

Même si elle se déroule dans l'ombre, la course au remplacement du mot de passe ne laisse personne indifférent. En effet, même les géants qui ne font pas partie de la Fido Alliance, comme Intel et Apple, ont réalisé d'importantes acquisitions dans le créneau de la biométrie et travaillent sur leur solution de rechange.

Intel, qui a acheté la montréalaise PasswordBox en décembre dernier, a dévoilé son jeu en janvier en lançant True Key. Le produit, qui n'est offert qu'à un nombre limité d'utilisateurs, permet aux consommateurs d'accéder à leurs services en ligne préférés grâce à la reconnaissance faciale. Loggr, une autre start-up montréalaise, propose pour sa part un service similaire, mais destiné aux entreprises. Même si la société ne fait pas partie de la FIDO Alliance, son pdg Julien Denaes nous a expliqué que son service se conformait à ses normes.

Si autant d'entreprises semblent être intéressées par ce changement de paradigme, c'est qu'il s'agit d'une affaire de très gros sous. À lui seul, le vol d'identité occasionnerait des pertes de 221 G $ US, selon la firme de recherche Aberdeen Group. Par ailleurs, pour les géants du Web, dont plusieurs vivent de la publicité, le fait de pouvoir identifier ses utilisateurs pourrait aussi valoir son pesant d'or : «Ces géants ont bâti leurs modèles d'entreprise et de sécurité sur une quantité monstre de données, mais ils ne savent pas vraiment qui se trouve de l'autre côté de l'écran», dit Karl Martin, pdg de Nymi.

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