Recrutement et rétention: avez-vous un problème de langue?

Publié le 29/09/2023 à 14:00

Recrutement et rétention: avez-vous un problème de langue?

Publié le 29/09/2023 à 14:00

Par Anik Pelletier

Les choix stylistiques et terminologiques dans les communications peuvent être déterminants dans le recrutement et la rétention. (Photo: 123RF)

EXPERTE INVITÉE. Qu’est-ce que la langue a à voir avec le développement durable, l’attraction et la rétention du personnel, l’ÉDI (équité-diversité-inclusion), la responsabilité sociale et la gouvernance? Tout! Vous ne me croyez pas? Au cours des prochains mois, je vous ferai découvrir comment la langue peut non seulement appuyer les efforts des entreprises dans ces domaines, mais même constituer un pilier sur lequel elles peuvent s’appuyer.

Il est beaucoup question de pénurie de main-d’œuvre depuis quelques années. Les entreprises peinent à recruter et à retenir les talents. Elles ne savent plus où donner de la tête pour mobiliser leur monde. Et si une partie de la réponse se trouvait dans leurs communications, à commencer par leurs offres d’emploi et descriptions de postes? Difficile à imaginer? Regardons-y de plus près.

 

L’impact du choix des mots sur le recrutement

Selon une étude intitulée Language Matters: How words impact men and women in the workplace, publiée par LinkedIn en 2018, les mots qu’utilisent les entreprises et les gens qui y travaillent pour décrire qui ils sont et ce qu’ils font ont des répercussions directes sur les entreprises qui tentent d’attirer les talents. On a analysé les termes que les hommes et les femmes privilégient dans le monde du travail : profils et interactions LinkedIn, processus de recrutement et milieu de travail. 

Parmi les constats, on note que certains termes – souvent attribués au genre masculin – rebutent jusqu’à 33% des candidats et 44% des candidates à un poste affiché. L’étude révèle aussi que le langage dont on se sert durant les entrevues, dans les documents faisant la promotion de la marque employeur et sur les réseaux sociaux a une incidence sur l’attraction et la rétention du personnel. Même la manière dont les leaders s’expriment sur les réseaux sociaux peut influencer la décision de poser sa candidature ou non. 

C’est donc dire qu’avant même que commence la démarche pour postuler, de nombreuses candidatures peuvent échapper aux organisations qui recrutent. Simplement en raison de l’utilisation d’un vocabulaire qui donne l’impression que l’entreprise favorise un genre au détriment d’un autre.

 

Le langage et l’équité

Ces liens entre le langage et la mobilisation de la main-d’œuvre ne datent pas d’hier. De nombreuses études publiées depuis les années 1970 démontrent l’incidence positive de l’utilisation d’un vocabulaire moins genré sur le nombre de candidatures reçues pour un poste affiché. D’autres recherches ont conclu que lorsque des descriptifs de professions utilisent uniquement le masculin (vous savez, la fameuse règle du masculin qui l’emporte sur le féminin en français?), les femmes sont évaluées et s'évaluent elles-mêmes comme moins compétentes que les hommes pour exercer ces métiers. Arrêtons-nous ici un instant. L’utilisation exclusive du masculin pour décrire une profession a des répercussions sur l’évaluation de la compétence des femmes pour exercer ladite profession. On parle de conséquences sérieuses.

Un rapport publié en 2011 dans le Journal of Personality and Social Psychology a démontré que l’usage de termes plus souvent associés au genre masculin – comme leader, compétitif et dominant – dans les offres d’emploi favorisait l’iniquité de genre dans des métiers traditionnellement masculins. Ainsi, le vocabulaire utilisé dans certains secteurs d’activité décourage les femmes d’y faire carrière et, par conséquent, ces métiers demeurent dominés par les hommes. On se retrouve dans un cercle vicieux d’iniquité.

 

La langue pour combattre les biais

Les biais sont malheureusement encore bien présents dans le monde du travail, jusque dans les mots utilisés. Les organisations peuvent combattre ces biais, notamment avec le langage qu’elles privilégient dans leur processus de recrutement et les documents décrivant leurs activités, leurs leaders et leur personnel. Le choix d’un vocabulaire plus neutre s’avère donc un moyen simple de susciter l’intérêt d’un plus grand nombre de candidates et candidats. On agrandit ainsi le bassin de recrues potentielles tout en appuyant les efforts d’équité, de diversité et d’inclusion. Je reviendrai d’ailleurs sur les liens entre la langue et l’ÉDI dans un prochain texte.

Les choix stylistiques et terminologiques dans les communications peuvent être déterminants dans le recrutement et la rétention. Pour citer l’étude de LinkedIn, « bien souvent ce qui compte, ce n’est pas ce qu’on dit, mais bien la manière dont on le dit ».

 

 

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