L'industrie de la construction a subi une baisse des investissements privés de huit à 11 pour cent depuis 2009, en partie à cause de sa mauvaise image, estime le président de l'Association de la construction du Québec (ACQ), Gilbert Grimard.
Toutes les allégations de collusion, de corruption et de surfacturation ont été "dommageables": elles ont tellement nui à l'industrie qu'elle réplique, étude à l'appui, en demandant au gouvernement d'assainir les pratiques commerciales du milieu.
"On a eu des répercussions en 2009 de ce qui a été dit en 2008", a résumé M. Grimard, dans une entrevue à La Presse Canadienne jeudi, en marge du congrès de l'ACQ à Québec.
L'économiste de l'ACQ, Luc Bourgoin, a corroboré ses propos en rappelant que le volume des immobilisations autant que les heures travaillées avaient diminué en 2009, sans pour autant donner de chiffres précises.
"Probablement qu'il y a de multiples facteurs (qui expliquent le recul de l'industrie), a expliqué M. Grimard. Par contre, il ne faudrait pas négliger l'impression qui s'est dégagée dans notre clientèle, dans le secteur des investissements privés. Elle avait l'impression que cela coûtait plus cher de construire au Québec. (...) Cela voulait dire: n'allez pas construire au Québec."
Or, 60 pour cent des sommes investies en construction au Québec viennent du privé.
Les membres de l'ACQ étaient "inquiets" et ont protesté en affirmant que "ce n'est pas vrai", a-t-il poursuivi. L'association a donc publié, jeudi, une étude qui conclut que le coût de construction au pied carré au Québec est supérieur à la moyenne canadienne, mais inférieur à ceux de l'Ontario, de l'Alberta et de la Colombie-Britannique.
L'analyse exclut toutefois les services professionnels, honoraires d'architecte et de d'ingénieur, et le prix des terrains.
L'étude commandée à la firme Secor simule la construction de différents types d'ouvrages, dans plusieurs grandes villes canadiennes, grâce à un logiciel. Par exemple, y sont estimés les coûts d'érection d'un commerce de détail, d'un supermarché, d'un édifice à bureaux, d'un restaurant, etc.
Le coût par pied carré, dans les régions de Québec et de Montréal, est de 5,5 pour cent à neuf pour cent supérieur à la moyenne canadienne. Cependant, si on compare les métropoles de Toronto, Vancouver, Calgary et Montréal, le prix moyen de construction est égal ou légèrement inférieur dans cette dernière.
Dans le domaine des investissements publics, écoles, hôpitaux, bureaux gouvernementaux, les coûts à Montréal et Québec sont supérieurs de 6,3 pour cent à neuf pour cent à la moyenne canadienne.
Dans un autre segment de l'étude, on compare le coût des appels d'offres des succursales de bannières telles que Tim Hortons, Wal Mart et Canadian Tire, dans les quatre provinces les plus populeuses. Le coût est inférieur au Québec, sauf pour les Canadian Tire.
"Cela ne tient pas debout qu'il y ait des coûts de construction qui soient significativement et de manière généralisée plus élevés au Québec", a assuré le responsable de l'étude de Secor, Daniel Denis, en conférence de presse, qui a ajouté que cette opinion avait été "extrêmement dommageable".
"Je pense que c'était important qu'on ramène les pendules à l'heure, a déclaré M. Grimard. Au Québec, nous avons des entrepreneurs honnêtes qui sont très compétitifs."
La construction n'est pas pour autant "à l'abri des voleurs et des bandits, ça, c'est certain", a-t-il reconnu, en répétant que la collusion est ce qui "irrite" le plus son organisme.
En ce sens, l'ACQ a fait plusieurs interventions auprès du gouvernement pour que ses membres aient accès aux appels d'offres et pour promouvoir la transparence des appels d'offres, un marché "ouvert à tout le monde (...) avec des pratiques commerciales honnêtes".
"N'oubliez pas que le secteur de la construction, c'est 40 milliards au Québec. Alors s'il s'en passe un peu...", a-t-il évoqué, en demandant à ses membres de dénoncer des situations irrégulières.
"Notre industrie n'est pas corrompue, pas si pourrie qu'on le prétendait. Mais on n'est pas à l'abri de ça", a-t-il conclu.
