Partenariat ONG-entreprises

Publié le 28/07/2009 à 15:45

Partenariat ONG-entreprises

Publié le 28/07/2009 à 15:45

Par lesaffaires.com

Les partenariats entre ONG et entreprises prennent de plus en plus d'importance en France. Le WWF France, division française de cette ONG mondiale de protection de la nature est à l'avant-garde des partenariats stratégiques.

Carrefour, Orange, Lafuma, Castorama, Pierre et Vacances... De grands acteurs se sont associés à WWF France. Dépassant les traditionnelles relations amour-haine de ces couples contre nature, les motivations des intéressés sont diverses. La stratégie est avant tout celle du donnant-donnant.

« Un partenariat au WWF France, c'est l'engagement d'un mécène », précise Jérôme Dupuis, responsable du Pôle partenariats stratégiques de WWF France. « Le monde de l'entreprise, grâce à ses capacités financières et humaines et à son professionnalisme, peut être aussi un levier de changement rapide et efficace, à condition bien sûr qu'il y ait une réelle volonté de la part de la direction. »

Le pari de WWF France est d'aller chercher les leaders par secteur, afin de créer un effet de vague, de mimétisme. Dans le secteur de la grande distribution, le leader en France, c'est Carrefour. « On a constaté qu'en faisant évoluer Carrefour sur ses pratiques, on faisait évoluer également ses concurrents puisqu'ils se sureillent tous. Si le leader avance, les autres suivent et ce système marche. On arrive à changer le marché de manière progressive en touchant le leader et du coup, en touchant l'ensemble du secteur. »

Carrefour, pionnier
C'est en fait Carrefour qui a sollicité le WWF France dès 1998, afin que l'ONG l'accompagne dans sa démarche de développement durable. La coopération s'est traduite par un partenariat stratégique, axé dans un premier temps sur la protection des forêts : la mise en place d'une politique d'achat de bois exotique responsable (FSC) et la réalisation d'activités de sensibilisation. Puis, le partenariat a été élargi à d'autres thématiques : arrêt de la distribution des sacs jetables aux caisses, accompagnement des fournisseurs dans des actions liées au développement durable, mise en place d'actions sur la pêche responsable, animations de sensibilisation faites par des bénévoles en magasins sur les achats responsables, ou encore calcul de l'empreinte écologique.

Pourquoi avoir choisi la WWF France comme partenaire ? « La WWF est l'association qui en 1998 était réellement capable d'accompagner Carrefour de façon concrète, c'est donc naturellement que l'enseigne s'est tournée vers elle », note Delphine Stroch, chargée de développement durable chez Carrefour. L'ONG dispose à son avis de solides atouts, notamment ses experts en biodiversité (gestion des ressources forestières, eaux douces) et sa reconnaissance auprès du grand public. «La reconnaissance du logo [le panda] est très bonne. Cela permet de sensibiliser plus aisément le plus grand nombre de consommateurs aux thématiques liées au développement durable lors de campagnes de sensibilisation communes », affirme Delphine Stroch. Le partenariat se traduit aussi à l'interne et au quotidien par la mise en place de groupes de travail sur des thématiques précises qui réunissent les différents services concernés (qualité, achats, marketing).

Cette collaboration peut surprendre, admet Jérôme Dupuis, comme la distribution a une lourde empreinte sur l'environnement. « Mais une fois qu'on a dit cela, qu'est-ce qu'on fait ? Malgré ces impacts forts, on peut faire des choses pour les dissiper », dit-il. « C'est très confortable de mettre à l'index les entreprises et de ne pas contribuer à la solution. Je pense que la démarche de partenariat est courageuse, parce qu'on dénonce, mais on essaie aussi de proposer des solutions, sans naïveté, en essayant d'être le plus concret et le plus pragmatique possible. »

Le choix d'Orange
« Ce n'est pas suffisant de dire qu'on donne de l'argent pour sauver des forêts équatoriales. On paie les gens du WWF France pour nous aider à améliorer la façon dont nos produits vont pouvoir être présentés, consommés et utilisés, avec moins d'impacts environnementaux », affirme Alain Liberge, directeur de l'environnement et de la responsabilité sociale chez Orange, marque phare de l'opérateur France Télécom. « Le WWF dit aux entreprises : on va travailler avec vous, on est exigeant, voici les objectifs, voici les indicateurs pour atteindre ces cibles, mais on va vous aider. » Une expertise précieuse qui n'a pas d'équivalent dans le privé, notamment lorsqu'il est question de biodiversité et d'éducation du public et des employés, selon Alain Liberge.

Parmi les actions concrètes qui résultent du partenariat, dont les résultats seront conjointement mesurés chaque trimestre, on compte le recyclage des produits (piles, batteries, terminaux), l'écoconception des boutiques (choix des matériaux, consommation d'énergie), les campagnes pour promouvoir la facture électronique, les actions pédagogiques auprès des clients et des employés, l'étiquetage écologique des produits, etc.

Du mécénat à la réciprocité
« Je pense que le mécénat disparaîtra pour faire place à des logiques d'investissement réciproque. Des logiques où on va chercher des résultats, où on va tenter d'améliorer l'impact social et environnemental de l'entreprise », affirme Jérôme Auriac, fondateur de Be-Linked, une agence-conseil spécialisée dans les relations entreprises-ONG.

Le WWF France s'est donné des moyens importants pour approcher les entreprises. Résultat : leur service de partenariat génère chaque année des revenus d'un peu plus de 6 millions d'euros selon Jérôme Auriac. « En contrepartie de l'argent qu'elle verse, l'entreprise a un bénéfice immédiat qui est un bénéfice de communication, mais un bénéfice qui consiste finalement à acheter une prestation de service. » En effet, les partenariats de WWF en France sont des partenariats d'expertise, de définition d'indicateurs d'impacts environnementaux, d'amélioration des pratiques internes des entreprises et de sensibilisation.

Le WWF France s'est également tourné vers le géant français des résidences de loisirs, Pierre et Vacances, afin de lui offrir ses compétences et ses connaissances pour l'élaboration de son plan d'action en matière de développement durable. « C'est une ONG qui a beaucoup de visibilité auprès du grand public. Le panda, ça parle à tout le monde », affirme Marie Balmain, responsable développement durable chez Pierre et Vacances. « Cela nous permettait de crédibiliser notre démarche. On pensait que cela allait être un levier de force de communication auprès de nos clients. »

Des partenaires parfois aux antipodes
Mais attention, tout n'est pas rose dans cette relation. Plusieurs situations rappellent que la première rencontre s'est souvent faite sur le terrain de la confrontation. « Parfois, ils nous demandent des choses qui sont difficilement atteignables. Leur rôle est de nous poser des défis, et nous, notre rôle est de progresser petit à petit. Mais parfois, on ne va peut-être pas assez vite », souligne Marie Balmair. « Ils nous apportent un avis challenger sur notre stratégie de développement durable et nous donnent une sorte de caution. Cela nous donne de la visibilité, tout en nous motivant à l'interne.»

Les prises de bec sont parfois sérieuses, consent Jérôme Dupuis. « L'entreprise sait très bien que si elle travaille avec nous, c'est aussi pour que l'on lance des alertes dans l'entreprise et qu'on mette le doigt sur des choses désagréables. » La WWF France garde en effet son indépendance et son rôle de surveillance, ce qui est clairement stipulé dans la convention signée entre les deux partis. Autrement, on ne signe pas avec WWF. « En dehors de l'entreprise, nous avons toujours nos campagnes de sensibilisation et d'alerte au public qui sont menées par le programme de conservation et qui se déroule bien sûr de manière totalement indépendante. Nous continuons à militer sur un autre plan. »

« Les entreprises ont très peur des ONG. Elles ont peur de leur pouvoir de communication et de leur capacité à nuire à la réputation de l'entreprise. Mais les éventuels désaccords sont très peu connus », note Jérôme Auriac. Par exemple, la WWF France a lancé l'été dernier un nouveau chantier avec Carrefour concernant les pesticides. L'ONG a carrément dit à Carrefour que les pesticides représentent un problème environnemental grave et qu'elle désire que l'enseigne réduise, voire arrête totalement la vente de pesticides chimiques. Cette campagne a certes donné lieu à certains bras de fer entre les partenaires.

Une tendance
Vu les 332 partenariats annoncés pour 43 entreprises cotées en Bourse figurant dans l'indice SBF 250, dont un partenariat sur deux est qualifié de stratégique, les accords officiels entre ONG et entreprises constituent une tendance de plus en plus marquée, selon une étude de l'Observatoire et baromètre des relations ONG-entreprises, créé en février 2007 par l'agence française Manifeste et le Who's who des ONG.

Selon Jérôme Auriac, ce type de partenariat est appelé à s'amplifier en raison de l'augmentation des contraintes réglementaires et normatives en matière d'environnement qui s'imposent aux entreprises. Beaucoup d'entreprises ne disposent pas des ressources et de l'expertise nécessaires à l'interne pour s'y conformer. Les entreprises ont donc selon lui tout intérêt à travailler avec les ONG. « Les entreprises sont obligées d'aller dans ce sens. La question n'est même pas de savoir si elles doivent le faire. Aujourd'hui, la question est : « comment le faire? » Et dans cette logique, l'ONG devient un partenaire aussi incontournable que l'est l'actionnaire, le collaborateur, le pouvoir public local, le fournisseur ou le client. »

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