L'homme d'affaires qui devient artiste

Publié le 25/09/2010 à 00:00, mis à jour le 24/09/2010 à 11:20

L'homme d'affaires qui devient artiste

Publié le 25/09/2010 à 00:00, mis à jour le 24/09/2010 à 11:20

Par Suzanne Dansereau

" Je suis un artiste, pas un homme d'affaires ", a déjà dit Warren Buffett. Aujourd'hui, ces célèbres paroles pourraient sortir de la bouche de Dick Evans.

L'ex-chef de la direction d'Alcan, qui a pris sa retraite en 2009 à la suite du rachat de l'entreprise par Rio Tinto, vient de fonder In Transit Images, une galerie de photographie en ligne, où sont exposées les photos de plusieurs photographes, dont les siennes. " C'est plus amusant que de siéger sur des conseils d'administration ", dit-il en nous accueillant chez lui. Dans sa majestueuse maison de pierres grises, en bordure du Mont-Royal, l'art est partout : un Miro dans l'escalier, un Chagall et un Dali dans le salon.

Dès notre arrivée, M. Evans nous présente son partenaire, Bob Hendriks, qui dirigera la galerie virtuelle : " L'homme d'affaires, c'est lui ", précise-t-il. Photographe professionnel, M. Hendriks réalisait et réalise encore des mandats pour Rio Tinto Alcan. Aujourd'hui, les rôles sont inversés : c'est Dick Evans l'artiste et Hendriks, le patron !

M. Evans s'adonnait à la photographie alors qu'il était étudiant. Par la suite, occupé qu'il était chez Alcan, il a abandonné son passe-temps favori pendant 20 ans. Il s'y est remis voilà une dizaine d'années, lorsque Alcan a acheté Alusuisse. " Je passais beaucoup de temps là-bas et je ne pouvais pas résister à la beauté des paysages. "

Un bon moyen d'évacuer le stress

La passion rallumée, il s'est servi de son appareil partout sur la planète : Islande, Inde, Japon, Nouvelle-Zélande et Montréal, bien sûr... En voyage d'affaires comme en voyage d'agrément.

" Cela me permettait de me libérer l'esprit et de mieux dormir, dit-il. Pendant la période la plus dure de la tentative de prise de contrôle hostile d'Alcoa sur Alcan, il m'arrivait de m'évader au Jardin botanique avec mon appareil photo ", confie-t-il.

Ses photos étaient assez bonnes pour que M. Evans décide, à la suggestion de son vice-président, affaires juridiques de l'époque, David McAusland, d'en faire un livre offert en guise de cadeau d'entreprise. " J'ai dû donner une centaine de livres de photos, raconte-t-il. Jean Charest en a un, et ma coiffeuse aussi. "

Voyant que les livres remportaient du succès - les gens l'appelaient pour avoir les négatifs et faire des agrandissements à encadrer -, Bob Hendricks et lui ont eu l'idée de fonder In Transit Images.

La vocation commerciale de la galerie ne fait aucun doute. Les photos de Dick Evans sont déjà vendues dans certaines boutiques de photographie de Montréal, de même qu'à San Francisco, où son épouse et lui ont une deuxième résidence. Des pourparlers sont en cours avec la chaîne de librairies Indigo pour la vente de photos, ainsi qu'avec Aéroports de Montréal, pour une exposition qui devrait avoir lieu l'an prochain. Parions que l'artiste n'a pas remisé son sens des affaires.

Photographie et philanthrope

Dick Evans versera les profits de la vente de ses oeuvres au fonds Dick et Gretchen Evans qu'il a lancé l'été dernier en compagnie de son épouse. Ce fonds, destiné à soutenir la recherche en photographie, accorde chaque année trois bourses de 17 000 $ à des étudiants de dernière année de maîtrise en photographie de l'Université Concordia.

M. Evans peut se permettre cette générosité : il a empoché environ 80 millions de dollars en vendant ses actions d'Alcan lorsque la société canadienne a été rachetée par le géant Rio Tinto L'homme d'affaires et artiste versera également la moitié des profits de la galerie au fonds Dick et Gretchen Evans.

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