Pourquoi ouvrir sept jours par semaine si seulement quatre sont rentables ?

Publié le 19/03/2011 à 00:00, mis à jour le 25/03/2011 à 13:38

Pourquoi ouvrir sept jours par semaine si seulement quatre sont rentables ?

Publié le 19/03/2011 à 00:00, mis à jour le 25/03/2011 à 13:38

Par Marie-Eve Fournier

Une petite chaîne de cinq magasins de Portland, en Oregon, a évité la faillite de justesse en utilisant une stratégie pour le moins surprenante : n'ouvrir que les jours rentables. C'est-à-dire quatre jours par semaine seulement, du jeudi au dimanche.

Deux ans après avoir frôlé l'anéantissement à cause de la crise, les affaires de Kitchen Kaboodle vont mieux que jamais. Ses boutiques, spécialisées dans la vente d'articles de cuisine, n'utilisent même plus leur marge de crédit !

" Tous les détaillants se demandent pourquoi ils ouvrent pendant autant d'heures ", observe Richard Outcalt, cofondateur d'une boîte qui conseille les petits détaillants indépendants, le Retail Owners Institute (ROI). Au cours d'une conférence donnée dans le cadre du congrès annuel de la National Retail Federation (NRF), en janvier, il a martelé que l'initiative de Kitchen Kaboodle peut être copiée. Et ce, même si la plupart des détaillants pensent que " ça ne pourrait jamais fonctionner pour eux ".

Baisse des ventes, hausse de la rentabilité

À l'instar de plusieurs détaillants des États-Unis, les magasins Kitchen Kaboodle ont été foudroyés à la fin de 2008 par la crise économique. L'arrivée d'un IKEA à Portland et plusieurs tempêtes de neige pendant le temps des Fêtes ont noirci un tableau déjà sombre. Résultat, la banque a vite réclamé ses 2,2 millions de dollars (M$).

C'est à ce moment que la chaîne appelle le ROI à la rescousse. Comme il se doit, divers scénarios sont évalués. Le but : trouver une solution satisfaisante autant pour les propriétaires de l'entreprise que pour la banque. On envisage de fermer des magasins, de renégocier les baux et de réduire les avantages sociaux. Mais ça ne suffit pas. Kitchen Kaboodle perd encore de l'argent. En se plaignant du fait que seulement quatre jours sur sept sont rentables, l'équipe de sauvetage se dit que la solution est peut-être là. " C'était une idée folle, mais ça fonctionnait sur papier ", relate Patricia Johnson, cofondatrice du ROI.

Les ventes baisseront de 24 %, prévoit-on (de 12,7 à 9,7 M $). Mais les dépenses chuteront encore plus, passant de 20 à 13,9 % des ventes. Les clients pourront donc bénéficier de baisses de prix alléchantes, un scénario résumé par le nouveau slogan " Four days, For savings, For you ". Des employés devront certes être remerciés, mais les autres travailleront à temps plein (quatre quarts de travail de 10 heures par semaine).

La banque accepte ce plan de relance hors du commun et maintient la marge de crédit de l'entreprise.

Un courriel est alors envoyé aux 9 000 clients inscrits dans la base de données de Kitchen Kaboodle pour leur expliquer le nouveau concept du commerce et les attirer par des soldes. Dans les médias, tous les experts affirment que l'idée d'ouvrir quatre jours par semaine est suicidaire : " vous ne pouvez rien vendre quand les portes sont fermées "; " baisser les prix en sacrifiant le service à la clientèle n'a pas de sens "; " je prévois qu'il y aura bientôt cinq locaux à louer pour du commerce de détail à Portland ".

Les résultats ne cessent de dépasser les attentes

" Le premier lundi, la télévision a tourné des images du magasin fermé tellement c'était spécial ", se rappelle Richard Outcalt. Le jeudi, les clients faisaient la file avant l'ouverture des portes pour profiter des bas prix. Tous les mois, les résultats dépassent les attentes et la banque prolonge les facilités de crédit, jusqu'à ce qu'elles ne soient même plus utilisées.

" Ce qui avait l'air normal, en fait, ne l'était pas. Car nous avions besoin d'une marge de crédit pour rester ouvert, observe le propriétaire des boutiques, John Whisler. Il nous fallait un modèle d'entreprise qui fonctionnerait pour nous, à ce moment-là. Mais si le contexte finit par changer, nous changerons nous aussi. "

16 500

Nombre de noms que compte la liste d'envoi de Kitchen Kaboodle. Elle comprenait 9 000 noms il y a deux ans.

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Un seul magasin de la chaîne n'a pu adopter le nouvel horaire, car il est situé dans un centre commercial qui fixe les heures d'ouverture. Pendant les Fêtes de 2010, Kitchen Kaboodle a exceptionnellement ouvert ses portes tous les jours de la semaine.

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