Le Château : autopsie d'une transformation

Publié le 22/10/2011 à 00:00, mis à jour le 12/12/2011 à 12:05

Le Château : autopsie d'une transformation

Publié le 22/10/2011 à 00:00, mis à jour le 12/12/2011 à 12:05

Par Marie-Eve Fournier

[Photo : Le Château]

En amour comme dans la vente au détail, la nouveauté séduit, attire les regards et suscite la curiosité. Les détaillants qui ont du succès l'ont compris et c'est pourquoi ils se renouvellent souvent. Le Château vient de dévoiler son nouveau concept plus haut de gamme, à Saint-Bruno. Concept qui, espère-t-on, résonnera auprès d'une clientèle plus «sophistiquée». C'est un exercice de taille : chaque conversion forcera une fermeture de 6 à 8 semaines et il faudra 10 ans pour que les 243 adresses de la chaîne l'aient toutes adopté. C'est sans compter l'investissement monétaire que l'entreprise refuse de divulguer. Les Affaires a eu droit à une visite guidée des lieux en compagnie de deux acteurs de ce changement de cap.

Look plus raffiné

Exit le plancher en ciment, l'éclairage sombre, le blanc laqué et la musique boom boom. La nouvelle génération de magasins Le Château s'adresse à une clientèle plus sophistiquée, de sorte que des couleurs sobres comme le crème et le gris pâle sont désormais à l'honneur. L'éclairage est plus directionnel, ce qui aurait l'avantage de mieux faire paraître les vêtements.

Bar à bijoux

À l'instar de Forever 21, Le Château présentera désormais une partie de ses bijoux sur une table. Cette stratégie du «buffet» favorise les essayages et encourage les femmes à toucher. De plus, ça donne l'impression que les bijoux qui y sont déposés sont de meilleure qualité. L'assortiment est changé tous les 2 ou 3 jours, pour créer l'effet de surprise.

Les caisses enregistreuses déménagent

«Avant, les caisses étaient au centre pour laisser les murs vides et avoir un fort mur arrière rempli de robes. Mais ça produisait une interruption dans le parcours des clients, dans le magasin. Ça créait, en quelque sorte, deux quartiers : l'un pour les riches [devant, où se trouvent les collections à prix courant], l'autre pour les pauvres [derrière, où se trouvent les soldes]», explique Franco Rocchi. Les caisses ont été déplacées vers l'arrière, devant la cloison qui entoure les robes. Pour favoriser les déplacements jusqu'au fond du magasin - ce qui est toujours un défi dans le commerce de détail -, une série de «messages» ont été alignés (mannequins, tables, présentoirs).

Mur de robes

La plus grande force du Château, ce sont ses robes. D'ailleurs, tout le mur du fond est rempli de modèles et ce, jusqu'au plafond. «Ça rend un peu aveugle. Les gens pensent qu'on vend surtout des robes et ça enlève de l'importance au reste», dit Franco Rocchi. Dans le nouveau concept, ce mur est en partie caché par deux murets, de sorte à créer l'illusion d'une boutique à l'arrière. À Saint-Bruno, compte tenu de la largeur assez réduite du magasin, Konstantin Nifakos trouve que ces murets cachent trop les robes. Dans les prochaines transformations, il promet d'améliorer les choses. Par ailleurs, Le Château cherche une façon d'exposer autant de modèles sans devoir en placer certains si haut qu'il faille une perche pour y accéder. Diverses options sont envisagées, mais la solution parfaite n'est pas facile à trouver. Les journées de grand achalandage, pour éviter que les clientes n'attendent, des employés sont payés exclusivement pour décrocher les robes !

Sacs à main regroupés

«On nous disait qu'il y avait trop d'articles éparpillés un peu partout. Maintenant, les sacs à main et les portefeuilles sont regroupés dans un présentoir. Le sac est un objet important pour l'image d'une marque. D'ailleurs, regardez ce que font les grands designers européens ; ils lancent toujours leurs saisons en présentant leurs sacs dans leurs publicités», raconte Franco Rocchi.

Mannequins moins réalistes

Les mannequins dans la vitrine seront entièrement blancs, puisque «c'est plus facile pour les consommatrices de se voir dans l'abstrait» et que «ça met davantage les vêtements en évidence». Autre changement, ces figures immaculées ne porteront plus de cheveux. «C'est beaucoup d'entretien», justifie-t-on. En magasin, des mannequins pleine grandeur présentent les vêtements. «On crée des messages plus clairs en présentant les vêtements comme ça. Regarder nos mannequins, c'est comme tourner les pages d'un magazine. Ça donne des idées. Un vêtement sur un mannequin, c'est plus convaincant que sur un cintre», dit Franco Rocchi. Bientôt, de tels mannequins seront installés dans tous les magasins de la chaîne.

Marques variées

Pour la première fois de son histoire, qui compte tout près de six décennies, Le Château a laissé entrer en ses murs d'autres marques que la sienne. Et c'est au rayon de la chaussure que ça se passe. Des bottes de l'entreprise Blondo, de Québec, et des escarpins Jessica Simpson, Franco Sarto et Vince Camuto côtoient désormais ceux de la marque Le Château. Les prix atteignent 150 $, ce qui est deux fois plus élevé que l'an dernier. Qu'est-ce qui a convaincu le détaillant d'adopter cette stratégie, inédite pour lui ? «On s'est demandé comment on pouvait faire en sorte que les gens aient un deuxième regard sur notre rayon de la chaussure, répond Franco Rocchi. Et c'est un argument que les vendeuses peuvent utiliser pour amener les clientes à regarder ce qu'on propose.»

Cabines d'essayage

Vous ne l'avez peut-être jamais remarqué, mais les cabines d'essayage sur les côtés servent à marquer des séparations entre les différentes collections. C'est encore le cas dans le nouveau concept. Par contre, à Saint-Bruno, les salles ne peuvent plus changer de place pour mettre en valeur des collections plus grandes ou plus petites que les précédentes. Elles ont été fixées. Selon Franco Rocchi, ce fut l'une des décisions les plus difficiles à prendre, parce que cela réduit la flexibilité. Par contre, ce «sacrifice» améliore l'expérience du magasinage, qui se doit d'être à la hauteur des nouvelles collections, plus haut de gamme. Ainsi, les nouvelles salles d'essayage sont munies d'une banquette, d'un miroir éclairé et de plusieurs supports pour les vêtements. C'est sans compter qu'elles sont 2,5 fois plus grandes qu'avant, ce qui réduit les précieux pieds carrés dédiés à la vente.

NOS DEUX GUIDES

Franco Rocchi, vice-président marketing

Konstantin Nifakos, directeur du design et de la construction

NOUVEAU LOGO

LE CHATEAU

Lorsque Herschel Segal a fondé Le Château, en 1959, le logo était composé de lettres majuscules. C'est en 1981 que les lettres minuscules rouges et bleues ont fait leur apparition sur les magasins. «On voulait retourner à nos racines, mais montrer, en même temps, que nous avons changé. Le noir, c'est plus classique, ça ne se démode pas», explique Franco Rocchi. Quant au petit triangle qui sert d'accent circonflexe sur le «A», le responsable du marketing espère qu'il devienne la signature de la chaîne, comme l'est le crochet pour Nike. Il sera mis en évidence dans les prochaines campagnes publicitaires et sert déjà de poignée de porte.

marie-eve.fournier@transcontinental.ca

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