À moins de 50 kilomètres de Montréal, Gilbert Halde et son frère produisent du lait biologique depuis près de 20 ans. En 1993, quand il a entamé la certification de ses terres, sur le bord du Richelieu, " il y avait moins de 10 producteurs laitiers biologiques au Québec ", dit-il. Aujourd'hui, ils sont 112.
La certification à laquelle M. Halde adhère, Pro-Cert Canada, n'autorise pas l'utilisation d'antibiotiques. Alors que faire en cas de mammite, une infection de la mamelle très répandue ? " Nous travaillons avec l'homéopathie et nous appliquons des huiles essentielles ", dit le fermier de Saint-Marc-sur-Richelieu, qui est également président du Syndicat des producteurs de lait biologique dans ses temps libres.
Ce n'est pas tout. Les producteurs biologiques ne doivent utiliser ni pesticides, ni herbicides dans la culture de leur foin et de leur grain, et leurs vaches doivent sortir quand la température le permet.
Cette pratique est de moins en moins marginale. Si la production de lait biologique représente moins de 1 % du total québécois, elle croît rapidement. La Fédération des producteurs de lait prévoit que leurs membres vendront au-delà de 32 millions de litres d'ici la fin de l'année 2009-2010, soit sept fois plus qu'il y a dix ans !
" Pour nous, c'est un exemple de succès ", dit Alain Rioux, directeur général de la Filière biologique du Québec, une association à but non lucratif, dont la mission est de favoriser le développement de la production, de la transformation et du commerce d'aliments certifiés biologiques. Voyant que les usines de transformation demandaient du bio, la Fédération a poussé pour augmenter l'offre. Aujourd'hui, tous les grands fabricants de produits laitiers ont leurs départements de recherche sur le biologique. "
Les géants de l'industrie multiplient les nouveaux produits. Agropur a racheté en 2008 l'usine de Lamothe, un embouteilleur biologique indépendant de Drummondville. L'entreprise a fermé l'usine fin 2009, après avoir rapatrié cette production à son usine de Québec. Agropur vend maintenant du lait bio sous sa marque Natrel en utilisant son procédé de filtration qui prolonge sa conservation.
Liberté contre-attaque
Liberté, le pionnier des produits laitiers biologiques, se sent à l'étroit dans un marché pris d'assaut par des entreprises de plus en plus nombreuses. " Nous devons nous adapter en conséquence, dit Martin Valiquette, directeur général. Depuis l'arrivée des grands acteurs, nos ventes baissent. "
Liberté continue toutefois de dominer le marché du yogourt biologique, dont elle tire beaucoup plus de revenus. Mais là encore, l'entreprise doit réagir, car d'autres producteurs lorgnent ce marché, dont la multinationale française Danone. Elle fabrique maintenant les yogourts biologiques Stonyfield à Boucherville pour le marché canadien.
Liberté a dû contre-attaquer. " Nous avons lancé des produits en petits pots en novembre, dit M. Valiquette. Au départ, nous ne voulions pas [offrir de tels produits], car nous trouvions qu'ils étaient suremballés et que ce n'était pas notre mission. Mais Danone est arrivée avec cela sur le marché et nous avons réagi. "
