Raconter pour s’en tirer: récit d’une aventure audio
Catherine Charron|Édition de la mi‑septembre 2020SE TIRER D’AFFAIRES. Je ne pensais pas, lorsque j’ai été mandatée, en février dernier, pour créer une série de balados, que je tomberais aussi juste avec le concept de «se tirer d’affaire». À cette époque qui semble si lointaine, nous voulions répondre à des questions de la communauté d’affaires québécoise. Du sondage que nous vous avions soumis, nous avons récolté des témoignages et des questions d’entrepreneurs aux prises avec des enjeux de liquidité, de croissance, de financement d’entreprise, de plan d’affaires et de transformation numérique.
C’est le lundi 16 mars que devait être lancé l’enregistrement de cette série, peu après le début de la diffusion des points de presse quotidiens du premier ministre François Legault, de l’ex-ministre de la Santé Danielle McCann et du directeur général de santé publique Horacio Arruda. «La COVID-19 a fait une victime audiophonique», écrivais-je alors à mes invités.
Les mois qui ont suivi auront été éprouvants. Ils ont toutefois permis à bon nombre d’entrepreneurs de prendre le temps de réfléchir à leurs pratiques. Si cette période d’incertitude vous semble épuisante, vous n’êtes pas les seuls. La temporalité de cette crise n’a rien de normal, répète la professeure et chercheure en management à l’École des sciences de la gestion, Caroline Coulombe : «En général, on gère une crise pendant un certain nombre de semaines, parfois quelques mois. Ces périodes aident les mécanismes, les processus et les humains à régler la situation. Là, pas du tout.»
C’est au cours de l’enregistrement d’un de nos épisodes qu’elle a partagé avec nous cette parcelle qui compte parmi ses observations terrain. Avec elle et Vicky Lefebvre-Vincent, fondatrice de micro-pousses DoSo, nous tentions de déterminer comment l’imprévisible peut devenir un outil de croissance.
Une invitée qui ne décolle pas
Cet épisode aurait dû être le seul où l’on discute un peu du coronavirus, selon le plan de match que j’avais établi avant de peser pour la première fois sur le bouton «REC». Je tentais de donner, peut-être naïvement, un ton intemporel à «cet outil de référence pour entrepreneur pressé», comme je me plaisais à l’imaginer. La COVID-19 est toutefois parvenue à s’y tricoter une place. Lorsque j’ai repris mes entretiens téléphoniques en août dernier, son nom était sur toutes les lèvres. Difficile de ne pas l’inviter à la table de discussion par les temps qui courent, celle-là.
Les questions de liquidités se sont elles aussi immiscées dans mes échanges. Pour certains entrepreneurs, la crise rime avec une pluie d’aide financière. Sous le couvert de l’anonymat, l’un d’eux nous a d’ailleurs demandé s’il pouvait simplement rembourser les avances de ses actionnaires avec ces liquidités, vu les taux d’intérêt avantageux de ce prêt, et puisqu’il ne pensait pas avoir besoin de cette importante aide financière. Maxime Saint-Denis, de la Banque de développement du Canada, voit la chose d’un mauvais oeil. «Pensez à la relation de confiance que vous allez peut-être détériorer avec votre institution financière en faisant cela. Si vous avez d’autres projets, soyez assuré qu’elle aura la mémoire longue», prévient le directeur principal.
Maxime Saint-Denis, la fondatrice de Maïeutyk, Elke Steinwender, et le directeur général de Luxia Innovation, Éric Roberge, se sont affairés à déterminer comment croître grâce à la dette.
Pour d’autres entrepreneurs, le recours au crédit ne semble pas aussi attrayant. C’était le cas d’Annie Contant, PDG de Copie rapide Montréal, qui associait à ses débuts le recours à une marge de crédit à un échec. Elle n’est plus du même avis : «L’entreprise a besoin d’évoluer, et pour évoluer, il faut utiliser le financement à titre de levier, et non à titre d’endettement.» Témoignant de son cheminement, elle s’est jointe à l’expert-conseil en financement d’entreprises chez Bilan inc., Vincent Beaulieu-Demers, et au cofondateur de Cooldel, Vincent Younan, pour déterminer comment amadouer le crédit.
Un projet humain
Au cours de l’élaboration de cette série, des positions pourtant bien campées ont été remises en question, toujours en ayant pour objectif d’offrir un produit qui résonnerait auprès de la communauté d’affaires. Ce brassage d’idées s’est même transposé dans nos échanges au micro, comme dans l’épisode où la fondatrice des aliments Plantago, Sherley Dupuy, l’entrepreneur et mentor Denis Ellefsen, et le maître d’enseignement à HEC Montréal Claude Ananou, se sont demandé si le plan d’affaires était essentiel au bon démarrage d’une entreprise.
Cette série, c’est avant tout un projet humain dans lequel on veut donner une tribune aux entrepreneurs, même lorsque nous tentons de répondre à la question «Est-ce que la transformation numérique n’est qu’un puits sans fond ?» avec le fondateur de Yulex, Frédéric Letendre, le président de Portes Baril, Dany Caron, et le vice-président au marketing et au développement des affaires chez Multidev Technologies, Jamal Boukouray. Ce dernier affirme par ailleurs : «S’il y a une partie de l’angle mort de la transformation numérique qui est restée invisible pendant trop longtemps, c’est le capital immatériel et le capital humain.»
On m’a demandé de présenter cette série de balados en un peu plus de 700 mots. En réalité, tout cela se résume en une phrase : on va se tirer d’affaire. Comment ? Vous le saurez le 23 septembre prochain en écoutant les cinq épisodes de Se tirer d’affaires. C’est un rendez-vous sur Les Affaires, Spotify, Apple Podcasts et Google Podcasts !