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RECRUTEMENT DE CADRES ET DIRIGEANTS. Motivation, rétention, possibilité de découvrir des talents cachés: la promotion interne comporte de multiples avantages. Pour en profiter, il y a toutefois certains défis à relever, parole d’experts et d’entreprises.
Ne pas se montrer assez sélectif
D’abord, pour que la promotion interne devienne partie intégrante de la culture de l’entreprise, il faut que tous s’y engagent, jusqu’à la haute direction, explique Pascale Côté, vice-présidente au partenariat au leadership à Beneva. Au sein de cette mutuelle d’assurance qui compte plus de 5000 employés, près du tiers des gestionnaires est promu en interne. «Le principal défi quand on décide d’aller dans ce sens, c’est de conserver la même rigueur que pour un candidat externe, souligne-t-elle. Car on a souvent tendance à se dire que, comme on connaît la personne, on va la nommer directement.»
Pour éviter cet écueil, l’équipe de Beneva a donc mis en place un processus de recrutement rigoureux. «Nous essayons, dans la mesure du possible, de toujours procéder par affichage interne. Cela permet d’avoir de belles surprises avec des candidats que nous n’aurions peut-être pas ciblés, explique Pascale Côté. Après la sélection, il y a une ou deux entrevues et un test psychométrique.» Ce qui permet d’identifier les forces du candidat et les aspects à améliorer en lien avec les exigences du poste.
Ne pas définir correctement ses besoins
Devant l’impression d’avoir le candidat parfait sous la main, plusieurs entreprises oublient de définir leurs besoins réels, observe Caroline Ouellet, CRHA, consultante, coach et présidente de Pratiq Ressources humaines. Elles doivent pourtant prendre le temps de cerner les compétences essentielles liées au poste. Pour définir ce portrait-robot du candidat parfait, «on peut “brainstormer” avec l’équipe qui aura cette personne comme gestionnaire, qui pourra expliquer quel type de dirigeant elle aimerait, quels sont ses besoins», cite-t-elle en exemple. Les compétences en informatique, en gestion du temps et la capacité à déployer des plans d’action que requièrent le poste — des aspects souvent négligés — sont aussi à évaluer.
Une telle vérification permet aussi d’offrir des outils au nouveau gestionnaire. C’est la stratégie adoptée par Ray-Mont Logistiques. Dans cette entreprise nord-américaine du secteur logistique comptant 350 travailleurs, la grande majorité des cadres proviennent de l’interne. Un journalier peut par exemple devenir directeur des opérations. Il aura alors besoin de formation et de soutien dans ce nouveau rôle, explique Olivier Charron, CRHA, vice-président et directeur des ressources humaines de la PME. «Nous avons développé une série d’outils très simples pour les aider dans certaines tâches, comme l’évaluation des employés.»
Négliger l’intégration du nouveau gestionnaire
Plusieurs pensent aussi qu’un nouveau gestionnaire issu de l’entreprise volera de ses propres ailes dès le premier jour. «Même quand il s’agit d’une promotion latérale, dans un autre service, c’est un apprentissage, ne serait-ce que parce que la personne travaille avec une nouvelle équipe», explique Pascale Côté. D’où l’importance de créer des moments pour vérifier que son intégration se passe bien et d’offrir un accompagnement, un mentorat ou une formation au besoin.
Un accompagnement à ne pas négliger, renchérit Caroline Ouellet. «On pense que la personne va se développer naturellement. C’est vrai pour certains profils très autodidactes, mais ce n’est pas toujours le cas», rappelle-t-elle.
Ce processus prend du temps, note Olivier Charron. «Nous embauchons plusieurs travailleurs qui n’ont pas d’expérience, mais qui partagent nos valeurs, explique-t-il. On les initie au rôle petit à petit, pour les faire progresser. Mais il ne faut pas aller trop vite, pour éviter de rendre la personne inconfortable.» Ray-Mont Logistiques offre donc un accompagnement spécialisé à ces travailleurs en transition.
Éviter les déceptions
«Si j’ai cinq candidats pour un poste, j’ai quatre déceptions, illustre Pascale Côté. Le défi, c’est de s’assurer que ceux-ci ne se démobilisent pas et qu’ils gardent l’espoir de progresser.» Pour cela, il faut bien expliquer les raisons derrière son choix. À Beneva, le deuxième candidat s’étant le plus démarqué passe aussi un test psychométrique, en plus d’avoir une rétroaction de la part d’un spécialiste qui analyse ses résultats. Une façon pour lui, et pour l’entreprise, de préparer un plan de match pour sa prochaine tentative.
À Ray-Mont Logistiques, les nouveaux gestionnaires sont entre autres sélectionnés à l’aide d’une «évaluation 360», c’est-à-dire effectués par leur supérieur et leurs pairs, décrit Olivier Charron. «Cela nous permet d’identifier les employés les plus performants, ceux qui ont gagné l’équipe et qui incarnent les valeurs de l’entreprise. Ça permet aussi de déceler ceux qui ont un certain leadership.» C’est donc un peu comme si c’était le reste de l’équipe qui faisait le choix du nouveau cadre.
Les travailleurs promus ont toujours l’option de revenir en arrière s’ils ne sont pas à l’aise, précise le directeur des ressources humaines. «Personne ne voit cela comme un échec. On peut même leur offrir des postes intermédiaires, avec certaines responsabilités, pour les aider à se développer.» Une façon de conserver ses talents dans cette industrie où les spécialistes ne courent pas les rues.