Je ne parle pas très souvent du fait qu’il soit important « d’écouter » ce que le marché nous dit. Et le fait de ne pas être d’accord avec le marché n’empêche pas que je suis très à l’écoute, tant pour savoir ce que les investisseurs croient que pour avoir des signaux « contrarian ».
Les signaux contrarian sont les plus significatifs car ils nous montrent ce que fait la masse irrationnelle. Il n’y a pas tant de tels signaux véridiques que l’on voudrait croire, mais lorsqu’il y en a, il faut absolument être au courant.
Depuis quelques semaines il y a énormément de signaux d’ébullition dans les marchés et de « distribution », opérations qui consistent à convaincre le public d’acheter pour que les initiés puissent vendre. Un peu ce de quoi Goldman Sachs est accusé d’avoir fait à ses clients … mais de manière plus intime que lorsque c’est fait au grand public..
Ces signaux ne sont pas le sujet de mon blogue.
Le sujet est véritablement de lire très simplement ce que le marché nous a dit aujourd’hui.
Je ne sais pas si vous vous souvenez de la journée du 27 février 2007 ? Pour vous rafraîchir la mémoire, vous pouvez lire ma chronique écrite du 2 mars 2007.
Depuis cette date, lorsque Monsieur marché a peur d’un ralentissement économique, à cause de la possibilité de récession, dépression, ralentissement en Chine, ou déflation, il se passe les choses suivantes :
Actions baissent
Obligations des grands gouvernements montent (taux baissent)
Toutes les autres obligations baissent (taux monte)
Dollar US monte ($CDN baisse)
Et l’or Baisse.
Lorsque Monsieur marché a peur d’une crise de dévaluations de monnaies accompagnée d’une crise de crédit, il se passe les choses suivantes :
Dollar US baisse
Commodités montent
Or monte
Dollars canadien et australien montent
Mais aujourd’hui, c’est une des premières fois où durant une journée importante, parsemée de diverses nouvelles qui dans une autre période auraient été jugées absolument extraordinaires et semant la panique, voici la réaction de Monsieur Marché :
Actions baissent
Obligations des grands gouvernements montent (taux baissent)
Toutes les autres obligations baissent (taux monte)
Dollar US monte ($CDN baisse)
Et jusqu’ici c’est exactement la même chose que lorsque le marché a peur de la récession et de la déflation.
Mais en plus, l’OR a monté de 25$ avec un mouvement de panique dans la deuxième partie de la journée !!!
Cela signifie que les investisseurs institutionnels et les spéculateurs institutionnels ont peur à la fois d’une crise de crédit, de la récession et d’une déflation qui serait désastreuse, au point de pousser nos béotiens gouvernements à imprimer encore plus d’argent, déstabilisant ainsi la confiance des investisseurs, consommateurs et institutions. Le résultat ultime d’après ces gens serait une hyperinflation. L’autre alternative que je crois plus probable serait une très forte et persistante déflation comme celles du Japon et de la Grande Dépression. Ces deux scénarios, s’ils sont assez extrêmes, sont bons pour le prix de l’or.
J’ai ouvert ici, ni vu ni connu, quelques parenthèses que je désire refermer.
Parenthèse Une :
Béotien : petit Larousse : adj.; Inculte, grossier. Ignorant. Mais en plus, nos politiciens dans l’ensemble sont corrompus ou tout au moins intéressés en tout premier lieu à leurs intérêts personnels ou de parti à court terme … au prix de mettre la société à risque. Il est évident que c’est ce que le résultat de leurs actions démontre :
Ils ont laissé cette crise se produire alors qu’ils auraient dû la voir venir.
Ils ont alimenté la crise en tentant de repousser l’inévitable, uniquement dans le but de s’attirer l’approbation des électeurs et des bailleurs de fonds électoraux.
Ils continuent de ne pas attaquer de front les causes fondamentales de cette crise financière et économique. Obama semble tenter de faire accepter des loi qui « feraient la job », mais il se fait saboter de part et d’autres.
Ce n’est certes pas nouveau dans le monde que des peuples soient mal dirigés, mais ce n’est pas une raison pour l’accepter. Et ce n’est pas une raison pour se laisser traîner vers une faillite collective inévitable si nous ne changeons pas de cap.
Parenthèse Deux :
Il y a eu des nouvelles aujourd’hui et depuis quelques jours qui auraient créé de véritables paniques en d’autres temps. Vous n’avez peut-être pas remarqué mais voici ce qui se passe aujourd’hui le 27 avril 2010 :
Deux pays industrialisés faisant partie de l’union européenne (Grèce et Portugal) ont vu leur cote de crédit abaissée (et ce n’était pas la première fois).
La plus grande banque (investment bank) des États-Unis est accusée de fraude et publiquement exposée.
Les votes et tentatives de faire accepter la réforme de l’industrie de la finance présentée par Obama a été refusée. Ils devront recommencer le processus (déjà en marche)
Une émission d’obligations de 2 ans par le Trésor américain a dû être faite un peu au-dessus du taux normal (selon certains)
L’indice de prix des maisons Case-Shiller montre que les prix continuent de baisser.
Tout ceci étant dit, je continue de vous offrir la même recommandation :
PRUDENCE EXTRÊME
Et pour ce qui est des titres risqués, je continue de ne détenir que des titres qui font de l’argent lorsque le marché des actions baisse. Notez aussi que certains sont en monnaie US. Je considère encore acheter des obligations de 10 ans du gouvernement américain car je crois que les États-Unis seront tout de même la plus grande puissance en temps de crise pour l’instant.
Le reste du monde ne se porte pas mieux et la Chine n’est pas prête à prendre ce leadership. La Chine n’a pas le militaire, le système de lois, le degré d’industrialisation et le système financier structuré pour devenir le leader. Ça arrivera possiblement de mon vivant, et très graduellement, mais pas à court terme. Pas pour cette crise-ci.
"For the record" : Je surpris que les marchés boursiers ne transigent pas au moins 50% plus bas qu'aujourd'hui d'ici 18 mois. Je crois que ce prix représenterait mieux leur valeur économique véritable.
Paul Dontigny Jr, M.Sc., CFA
