Jusqu'à 70 % des projets informatiques capotent, rapporte les différentes études sur le sujet. Face à ce taux d'échec insoutenable, un nombre grandissant d'entreprises québécoises s'en remettent aux méthodes agiles, qui auraient un taux de succès plus élevé et déboucheraient sur des produits de plus grande qualité. Même la Caisse de dépôt et placement du Québec mise depuis peu sur cette approche.
Les méthodes agiles consistent à démarrer avec une version minimale du produit et à l'améliorer progressivement en réagissant rapidement aux demandes du client et aux tests en cours de développement.
La Caisse, qui a modernisé son parc technologique en misant sur l'approche agile, a économisé quelque 20 millions de dollars durant le processus. Pierre Miron, premier vice-président, opérations et TI, de la Caisse, présentait les résultats de cette transformation dans le cadre des Rendez-vous Les Affaires, le 3 mai : «Les grands projets informatiques de trois ans, personne n'y croit plus aujourd'hui. Il faut les segmenter en plusieurs petits projets de trois à six mois», a-t-il expliqué.
Malgré le succès de la Caisse avec l'approche agile, rares sont les projets gouvernementaux qui en adoptent les principes. Il faut dire qu'un projet réalisé en développement agile démarre généralement avant qu'on n'ait évalué son coût, une pratique difficilement conciliable avec les appels d'offres. En effet, dans le secteur public québécois, tout contrat public dont la valeur dépasse 100 000 $ doit être attribué par appel d'offres.
S'adapter au prix fixe
Malgré ces contraintes, le Groupe LSI, qui est spécialisé dans le développement agile, s'efforce d'adapter l'approche agile en fonction d'un prix fixe lorsqu'elle fait des soumissions. «Il faudrait changer cette mentalité de toujours vouloir des contrats à forfait ; souvent, c'est le client qui y gagne, dit Luc Séguin, associé principal chez LSI. Par exemple, un projet réalisé pour un client du secteur de l'énergie a fini par coûter 66 % moins cher, tout en livrant plus de fonctionnalités.»
Du côté de la Caisse, la question des appels d'offres ne se pose pas, puisque la plupart des projets d'importance sont réalisés à l'interne. De plus, tous les projets ne respectent pas en tous points l'une ou l'autre des méthodes de développement agile : «Dans un projet de business intelligence, on n'hésitera pas à y aller sans estimer les coûts, de manière à développer le projet par itération, tandis que d'autres projets feront l'objet de plus de planification», explique Pierre Miron.
«Il faut faire attention lorsqu'on s'inspire des méthodes agiles, car ce sont des systèmes cohérents ; par contre, plusieurs de ses principes, notamment l'implication du client, auront des retombées positives, peu importe le contexte», dit Claude Besner, professeur à l'UQAM et spécialiste de la méthode agile.
Les projets gouvernementaux gagneraient sans doute à recourir aux méthodes agiles ou à en intégrer certains principes. Toutefois, il ne faudrait pas y voir un remède aux projets actuellement en difficulté : «Qu'on puisse sauver un projet problématique en y intégrant des principes agiles relève de la pensée magique», prévient Dave Jacques, responsable de la pratique agile chez CGI.
AVEZ-VOUS DIT APPROCHE AGILE ?
Le client (ou l'utilisateur) est engagé dans le processus de développement et offre de la rétroaction aux développeurs tout au long du projet.
Le produit est livré en plusieurs parties fonctionnelles, de la plus importante à la plus futile.
Le développement commence sans attendre, tandis que la durée et les coûts du projet sont déterminés avec plus de précision à mesure que celui-ci progresse.
Les caractéristiques du produit peuvent être modifiées en cours de route en fonction des besoins du client.
Les pratiques évoluent tout au long du projet de manière à implanter celles qui sont les plus efficaces.
Popularisé dans les années 1990 aux États-Unis, le développement agile a été circonscrit pour de bon en 2001, lors de la publication du Manifeste agile par 17 sommités du secteur logiciel.
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