Accès Internet: la décision du CRTC pour les nuls

Publié le 16/11/2011 à 10:16, mis à jour le 16/11/2011 à 11:08

Accès Internet: la décision du CRTC pour les nuls

Publié le 16/11/2011 à 10:16, mis à jour le 16/11/2011 à 11:08

[Photo : Bloomberg]

BLOGUE. Si vous suivez un tant soit peu les manchettes technologiques, vous êtes certainement tombés sur une nouvelle traitant de la décision rendue mardi soir par le CRTC à propos de l'accès à Internet pour les fournisseurs indépendants. Et vous n'y avez probablement rien compris.

Tentons donc de résumer le dossier et les enjeux technologiques qui y sont liés.

Il importe d'abord de savoir que cette décision du CRTC (PDF) est d'abord et avant tout une révision d'une autre décision, prise en février dernier. Celle-ci avait été si impopulaire et suscité un tel tollé chez les internautes que le gouvernement conservateur avait demandé au CRTC de la réviser.

Le dossier touche les 6% d'internautes canadiens qui sont abonnés à Internet non pas via un fournisseur « direct » comme Bell, Vidéotron, Cogeco ou Telus au Québec, mais plutôt via une entreprise indépendante, qui « loue » en quelque sorte le réseau de ces grands opérateurs.

Le principe même de cette « location » de réseau existe depuis longtemps. Si on veut de la concurrence dans le domaine, il est essentiel. Bâtir un réseau comme celui de Bell ou de Vidéotron à partir de rien est à peu près impensable, d'un point de vue économique. Ce n'est guère mieux d'un point de vue pratique: imaginez s'il fallait que chaque résidence ait 10 fils de téléphones appartenant à 10 entreprises distinctes qui la relie à 10 poteaux différents dans la rue. Comme façon de détruire le paysage, il ne se fait pas mieux!

Il ne faut pas non plus oublier que ces grands opérateurs ont largement bénéficié de subventions et/ou de tarifs protégés par ce même CRTC pour bâtir ces réseaux.

Quantité ou capacité?

Le débat porte sur le tarif de location de ces grands réseaux. Évidemment, ces tarifs ont un impact direct sur le prix auquel les petits fournisseurs indépendants peuvent par la suite revendre l'accès à leurs clients.

La décision qui avait fait scandale en février accordait aux grands réseaux le pouvoir de facturer les fournisseurs indépendants, et donc indirectement les clients de ceux-ci, à l'utilisation. Exemple simple: vous téléchargez 10 Go, vous payez X$, vous en téléchargez 20, vous payez deux fois plus (ce qui n'est pas tout à fait exact puisqu'il y avait des frais de base).

Sur papier, ça semble parfaitement logique. Dans la pratique, c'est moins évident. Il n'y pas d'analogie simple et parfaite pour décrire la situation, mais la meilleure est peut-être celle des conduites d'eau.

L'exemple de l'eau

Oublions la valeur de l'eau elle-même et concentrons-nous sur son transport, puisque l'équivalent dans le cas qui nous occupe, les données, ne coûtent rien à Bell ou Vidéotron, qui ne se préoccupent que de leur transport.

Supposons qu'une municipalité installe un aqueduc capable de livrer 10 litres d'eau à la minute dans un quartier donné. Que les résidents dudit quartier consomment une moyenne de 2 ou de 9 litres d'eau à la minute, ça ne change rien aux coûts de la municipalité, hormis quelques grenailles. La conduite suffit.

Là où les coûts augmentent, c'est si en période de pointe, disons sur l'heure du souper ou du bain, la demande en eau dans ce quartier dépasse ce que la conduite peut acheminer, pour atteindre 12 ou 20 litres à la minute. À ce moment, la pression d'eau va diminuer et les résidents seront insatisfaits. La municipalité devra, éventuellement, installer une conduite plus grande.

Revenons aux données Internet. Ce que les fournisseurs indépendants ont fait valoir au CRTC, avec succès, c'est qu'il importe peu qu'un client ou qu'un ensemble de clients télécharge 10 Go ou 900 Go dans un mois. Ce qui importe, c'est la vitesse en période de pointe monopolisée par ce client ou ce groupe de clients.

Décision logique

Se rendant à cet argument, le CRTC a donc remplacé l'utilisation par la capacité dans son modèle de facturation. L'organisme offrira aussi aux grands opérateurs la possibilité de garder leur modèle de facturation original (avant la première décision) basé sur un tarif fixe pour l'accès illimité. C'est tout à fait logique.

Ce qui est aussi logique, c'est que parmi les différentes façons de calculer cette facturation, le CRTC a choisi celle qui impose aux petits fournisseurs, et non aux grands réseaux, de prévoir la capacité dont ils auront besoin en réservant à l'avance des plages de bande passante, par tranches de 100 Mbps.

Ceux-ci vont donc se retrouver en quelque sorte dans les mêmes souliers que les grands opérateurs de réseaux. À la longue, à force de vivre des situations similaires, on espère que les deux en viendront à mieux s'entendre.

Reste à voir l'impact qu'aura cette décision sur les prix et la survie des petits fournisseurs d'accès. Au-delà du principe de paiement selon la capacité, qui leur plaira assurément, il faudra voir si les tarifs par tranche de 100 Mbps décrétés par le CRTC leur conviennent. Seul le temps le dira.

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