Le Québec des filiales

Publié le 26/05/2012 à 00:00

Le Québec des filiales

Publié le 26/05/2012 à 00:00

Les filiales de sociétés étrangères sont des acteurs incontournables dans l'économie de la province. Pourquoi s'installent-elles chez nous ?

Un coup d'oeil à notre palmarès des 500 plus grandes sociétés du Québec permet de constater la forte présence des filiales d'entreprises internationales installées sur notre territoire.

À Montréal seulement, où les trois quarts se trouvent, les filiales fournissent 9 % du nombre total des emplois, soit plus de 165 000 emplois directs et 100 000 emplois indirects, selon une récente étude de Montréal International. Elles dépensent chez nous 26 milliards de dollars par an, ce qui génère des retombées fiscales de 4,1 milliards de dollars. Le coût de deux CHUM...

Sans surprise, il s'agit surtout de filiales d'entreprises américaines. Près de la moitié des sociétés étrangères de Montréal, soit plus de 1 000 établissements, ont leur siège social aux États-Unis. Les filiales de sociétés françaises suivent ; elles représentent 13 % de l'ensemble. Les autres pays d'Europe de l'Ouest, dont le Royaume-Uni, la Suisse et l'Allemagne, se partagent le reste. En ce qui concerne les filiales de sociétés d'autres régions du monde, leur présence est marginale. Seul le Japon compte 71 établissements, soit 3 % du total.

Cela dit, on ne peut pas ignorer le fait que six des dix plus importantes filiales (sur le plan du nombre d'employés) font partie des secteurs de la restauration et du commerce de détail. Ce sont les McDonald's, Walmart, Costco et Best Buy de ce monde.

La présence de ces géants au Québec engendre des retombées économiques, bien sûr. Target, qui a acheté les emplacements de Zellers, dépensera 1,5 milliard de dollars au Canada pour rénover ses magasins.

Pourtant, le premier ministre Jean Charest ne se déplace pas pour couper le ruban lorsqu'un nouveau Walmart ouvre ses portes à Longueuil. On le comprend. Les détaillants ne créent pas d'emplois qualifiés dans des secteurs de pointe et ne contribuent pas non plus à l'enrichissement d'une expertise locale.

Il en va autrement pour les filiales qui s'installent chez nous, non pas pour la clientèle, mais pour les talents.

À la recherche de talents

Les raisons qui poussent les multinationales à choisir le Québec sont multiples. «Elles viennent s'installer ici principalement en raison de la qualité de la main-d'oeuvre et de la qualité de la formation», dit Alain Cassista, directeur général de Pharmabio Développement, le comité sectoriel de main-d'oeuvre des industries des produits pharmaceutiques et biotechnologiques.

Toutefois, dans le cas des pharmaceutiques, la présence chez nous de chercheurs de haut niveau n'est pas garante de sécurité d'emploi. On l'a vu en 2012 : quand les grandes pharmaceutiques ont décidé de ralentir leurs efforts en recherche, ce sont les centres de recherche installés au Québec qui ont été atteints.

Depuis le début de l'année, l'américaine Johnson & Johnson, la française Sanofi et la britannique AstraZeneca ont toutes trois annoncé des mises à pied dans leur centre de R-D de Montréal, ce qui a entraîné la suppression de plus de 300 postes hautement qualifiés.

Une victoire a tout de même illuminé cet hiver déprimant. En effet, Montréal accueillera pour la première fois le siège social international d'une entreprise pharmaceutique d'envergure, celui de la multinationale Valeant. Ce n'est pas une petite prise. Cette société tentaculaire, qui a acquis Laboratoire Dr Renaud en 2009, a engrangé des revenus de 2,46 milliards de dollars en 2011 et emploie plus de 5 000 personnes dans le monde.

«Nous espérons que l'arrivée de Valeant inversera la spirale des mauvaises nouvelles ! lance Alain Cassista. C'est sûr qu'une société étrangère qui s'installe chez nous, c'est rassurant, car ce sont des entreprises stables.»

Le pouvoir des grappes

La grappe des pharmaceutiques dans la région métropolitaine a sans doute pesé dans la décision de Valeant de s'installer ici. Plus les grappes industrielles sont dynamiques, plus elles jouent le rôle d'aimants en attirant des entreprises étrangères qui ne veulent pas rater l'occasion d'être «là où ça se passe».

À Montréal, la plupart des filiales internationales font partie des trois grappes que sont l'aérospatiale, les sciences de la vie et les technologies de l'information et des communications (TIC). Dans la métropole, ces trois grappes représentent à elles seules près de 40 % de tous les emplois dans les sociétés étrangères.

«Dans le secteur de l'aérospatiale, dit Louis Clément, avocat et associé du bureau de Montréal chez Borden Ladner Gervais, l'écosystème de petites et moyennes entreprises tend à attirer des sociétés étrangères qui souhaitent se rapprocher des multinationales déjà présentes sur le territoire québécois, dont Bombardier et Pratt & Whitney. Par exemple, le désir de se rapprocher de Bombardier a incité la société belge Sonaca à acquérir, en 2003, la québécoise NMF, spécialisée dans la construction d'ailes et de panneaux d'avions.»

La ville de Québec aussi possède ses grappes : l'assurance et les services financiers, les sciences de la vie, les TIC et l'électronique, la transformation alimentaire et le bâtiment vert et intelligent.

«Quand nous cherchons des entreprises d'ailleurs qui pourraient s'installer à Québec, nous examinons d'abord notre écosystème d'affaires, explique Carl Viel, PDG de QI. Nous privilégions des sociétés qui pourraient être complémentaires à celles qui s'y trouvent déjà. Ce sont celles qui apporteront une valeur ajoutée à notre écosystème que nous voulons attirer en priorité.»

Le dernier bon coup de QI est d'avoir négocié ferme afin que le géant japonais Fujitsu ouvre un centre d'innovation à Québec. Fujitsu s'y est installée en 1997, après avoir acquis DMR. Elle emploie plus de 1 000 personnes dans la Capitale nationale. «Il nous a fallu deux ans de travail pour en arriver à la concrétisation du projet», raconte Carl Viel.

Cependant, ces efforts ont été récompensés. Inauguré en décembre dernier, le Centre d'innovation Fujitsu nécessitera un investissement de 20 millions de dollars dans l'économie de la Ville de Québec et créera une cinquantaine d'emplois.

«Quand j'ai assisté à l'ouverture du Centre, dit Carl Viel, j'ai rencontré une docteure en intelligence artificielle. C'est le genre d'expert qu'on verrait plutôt travailler dans la Silicon Valley, en Californie... Et pourtant, ils sont chez nous !»

Investissements étrangers

Les filiales fournissent plus de 165 000 emplois directs au Québec

Pays d'origine des filiales étrangères au Québec (selon le pourcentage d'emplois)

États-Unis 56,8 %

Illinois 9 %

New York 19 %

Californie 11 %

Connecticut 10 %

Reste des États-Unis 51 %

France 11,6 %

Suisse 3,9 %

Italie 1,4 %

Royaume-Uni 8,2 %

Allemagne 3,2 %

Belgique 1 %

Pays-Bas 2,3 %

Suède 3 %

Japon 2,3 %

Reste du monde 6,3 %

SOURCE : MONTRÉAL INTERNATIONAL

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