L'industrie automobile redémarre

Publié le 15/12/2012 à 00:00, mis à jour le 13/12/2012 à 10:45

L'industrie automobile redémarre

Publié le 15/12/2012 à 00:00, mis à jour le 13/12/2012 à 10:45

Les «minounes» ne sont pas éternelles. Les Américains sont prêts à acheter de nouvelles voitures après avoir reporté cet achat en raison de l'incertitude économique. Les investisseurs doivent-ils monter à bord?

L'industrie automobile se dirige vers un «âge d'or», rien de moins, affirme Dennis Desrosiers, président du cabinet de consultation Desrosiers Automotive Consultants. La demande est sur le mode du rattrapage, tandis que les Américains retardent l'achat d'un véhicule depuis la crise financière de 2008.

Les banques sont aussi moins frileuses pour accorder des prêts aux consommateurs désireux d'acheter un véhicule neuf. «Les mauvaises nouvelles sont derrière nous, soutient-il. Les ventes nord-américaines devraient atteindre un record en 2016, peut-être même en 2015.»

Le rattrapage a déjà commencé. Les ventes d'automobiles se dirigent vers une croissance de 12 % aux États-Unis en 2012, selon les estimations du Conference Board. C'est une troisième année de croissance supérieure à 10 %.

Chez nos voisins du sud, la voiture moyenne a 11 ans. Et près d'un véhicule sur cinq a plus de 16 ans, selon les données de la firme Polk. «Les ventes annuelles de véhicules avoisinent les 14 millions d'unités, souligne Michael Burt, qui dirige la recherche industrielle du Conference Board. La moyenne devrait être de 16 à 17 millions par année. Il y a encore un potentiel de croissance.»

Ford ou GM ?

Même si les perspectives s'embellissent pour les constructeurs automobiles, les investisseurs ne doivent pas se précipiter sur tous les titres du secteur. Parmi les trois grands de Detroit, General Motors (NY, GM, 25,45 $ US) a un léger avantage sur Ford (NY, F, 11,49 $ US). Des analystes qui suivent le titre, 79 % en recommandent l'achat, par rapport à 68 % pour Ford.

David Whiston, analyste de Morningstar, émet une note «cinq étoiles» pour les deux constructeurs. L'écart entre l'évaluation des deux titres est relativement semblable, note-t-il. En prenant la prévision moyenne des analystes pour l'exercice 2013, GM s'échange à 6,8 fois le bénéfice par action, et Ford se vend à 7,75 fois. En comparaison, Toyota s'échange à 10,53 fois cette prévision.

L'analyste admet une préférence pour GM. «Bien des investisseurs détestent GM en raison de toutes les difficultés qu'elle a connues, constate M. Whiston. Or, les investisseurs ne se rendent pas compte que l'entreprise est en train de changer. À l'opposé, le dirigeant de Ford, Alan Mullaly, a fait un travail fantastique et est très apprécié.»

Les investisseurs auraient donc intérêt à accorder une plus grande attention à GM. «Je suis très enthousiaste en ce qui a trait aux nouveaux véhicules, dit M. Whiston. Les véhicules utilitaires sport sont les produits les plus rentables, et GM sortira sa prochaine génération l'an prochain.»

Christopher Ceraso, de Credit Suisse, accorde lui aussi sa préférence à GM pour la même raison. Il émet une recommandation «surperformance» à l'égard de l'action de GM, comparativement à une recommandation «performance de secteur» pour Ford. «Nous croyons que GM offre un meilleur potentiel d'appréciation du capital, car elle entre dans la meilleure phase de son cycle de produits», soutient-il.

Les investisseurs doivent cependant prévoir un ou deux nids de poule avant d'accélérer, selon M. Ceraso. «Le quatrième trimestre [en cours] et le premier trimestre pourraient être plus faibles, au moment où la société prépare l'arrivée de ses nouveaux produits et qu'elle se restructure en Europe. La croissance devrait s'accélérer fortement à partir du deuxième semestre de 2013 et de 2014.»

Ford n'est cependant pas sans intérêt. Le cinquième constructeur en importance dans le monde a une bonne réputation, car il a évité la faillite durant la crise de 2008. Ses produits sont jugés comme étant de meilleure qualité, note M. Whiston.

Ryan Brinkman, de J.P Morgan, salue lui aussi la stratégie de Ford qui l'a rendu plus productif. Il a restructuré sa chaîne de montage en Amérique du Nord, vendu des actifs qui n'étaient pas liés aux activités principales et abandonné la marque Mercury. Il a de plus augmenté ses marges sur les modèles de plus petite taille. M. Brinkman réitère une recommandation «surperformance».

Dennis Desrosiers pense que Ford fera meilleure figure que GM grâce au talent de ses dirigeants. Mais les constructeurs américains ne figurent pas dans ses favoris. Ils profiteront de la vague, mais resteront en queue de peloton, selon ce consultant torontois. «Ce sera les Européens d'abord, les Japonais ensuite et finalement, les Américains, prédit-il. Au cours de la prochaine décennie, les Européens réussiront mieux en ce qui a trait aux ventes, en raison du regain de popularité des voitures de luxe.»

Toyota

David Whiston accorde une moins bonne note à Toyota (NY, TM, 86,05 $ US), soit «trois étoiles», mais l'action du constructeur japonais n'est pas nécessairement à écarter, selon lui. «Ça dépend de la préférence des investisseurs et de ce qu'ils cherchent. Le bilan de Toyota est plus sain que ceux de Ford et de GM. Toyota est moins touché par le ralentissement en Europe, qui ne représente que 9 % de ses ventes.»

La force du yen par rapport au dollar américain reste un obstacle important sur le parcours du constructeur. Le géant japonais, qui a grandement souffert du tsunami au Japon en 2011, a depuis effectué un retour en force et voit ses parts de marché augmenter, note Michael Burt, du Conference Board.

Passer son tour

Barry Schwartz, gestionnaire de portefeuille et vice-président de Baskin Financial, à Toronto, reconnaît aussi que la tendance est favorable pour l'industrie automobile. Cependant, les acteurs américains viennent avec un bagage, avertit-il. «Les constructeurs automobiles traînent un héritage lourd à porter. Le coût de leurs régimes de retraite est très élevé. GM a fait faillite, et Ford a frôlé la faillite. GM ne paie pas de dividende. Ford en paie un, mais son bilan est mauvais.»

Alain Chung, gestionnaire de portefeuille chez Claret, est prudent et passe aussi son tour. «Je ne dis pas que c'est un mauvais investissement en soi, mais il est difficile pour nous d'évaluer la valeur de ces entreprises selon leur historique, commente-t-il. Un jour, ils sont en faillite, quelques années plus tard, leurs bénéfices se chiffrent en milliards.»

Moyenne historique

Février 2007

Porté par une croissance économique vigoureuse, le secteur automobile enregistre un mois record avec des ventes annualisées de 16,82 millions d'unités.

Mars 2009

Frappé de plein fouet par la récession, le secteur automobile enregistre sa pire performance mensuelle avec des ventes de 9 millions de véhicules.

Novembre 2012

Pour la première fois depuis février 2008, le nombre de véhicules vendus (15,4 millions) a dépassé la moyenne historique de 15,3 millions d'unités des 15 dernières années.

Recommandations des analystes

GM (NY, GM, 25,45 $ US)

Achat : 19

Conserver : 4

Vendre : 1

Cible : 33,12 $ US

Ford (NY, F, 11,49 $ US)

Achat : 17

Conserver : 8

Vendre : 0

Cible : 14,93 $ US

Toyota (NY, TM, 86,05 $ US)

Achat : 19

Conserver : 7

Vendre : 1

99,49 $ US

Magna (Tor., MG, 47,46 $)

Achat : 12

Conserver : 5

Vendre : 3

Cible : 56,01 $

stéphane.rolland@tc.tc

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