Exportations : aller voir ailleurs !

Publié le 26/05/2012 à 00:00

Exportations : aller voir ailleurs !

Publié le 26/05/2012 à 00:00

Il aura peut-être fallu une crise financière pour que les exportateurs québécois comprennent qu'il y a un monde au-delà de nos voisins du sud...

Le 2 avril dernier, devant les membres de la Chambre de commerce du Grand Kitchener-Waterloo, le gouverneur de la Banque du Canada, Mark Carney, n'a pas pris de gants pour commenter l'état des exportations canadiennes.

«Lors des récessions précédentes, les exportations avaient contribué de façon importante à redresser la situation économique du pays, a-t-il déclaré, mais cette récession a été différente...»

Au cours des neuf mois de la grande récession de 2008-2009, les exportations canadiennes ont plongé de plus de 16 %. Elles restent toujours à 8 % du sommet atteint avant la crise.

La situation n'est guère plus gaie au Québec. Dans l'ensemble, la valeur totale de nos exportations a reculé de 7 % entre 2002 et 2011.

«La bonne nouvelle, c'est qu'elles ont augmenté l'an dernier», souligne cependant le directeur général d'Export Québec, Alain Proulx. En outre, l'an dernier, les exportations ont crû plus rapidement que les importations.

Qu'à cela ne tienne, une année ne fait pas une tendance. Pour les prochaines années, les entreprises exportatrices sont invitées à se retrousser les manches afin de maintenir cette nouvelle lancée.

Au coeur de ce vaste projet, un mot d'ordre semble rallier les experts de l'export : la diversification géographique. Nous devons nous imposer davantage dans les pays émergents.

«Cela demandera beaucoup d'efforts, et pendant longtemps. Nous pourrions ne pas voir de retombées significatives avant une dizaine d'années», dit Joëlle Noreau, économiste principale au Mouvement Desjardins. «D'autant plus que les pays émergents sont des économies qui changent rapidement, qui s'industrialisent. Dans cinq ou six ans, elles ne seront plus telles qu'on les connaît aujourd'hui. L'important, c'est d'être là, maintenant, pour voir les choses évoluer.»

La douche froide américaine

L'érosion des exportations québécoises au cours des dernières années est principalement due à l'effondrement du marché américain. Car le Québec est en grande partie tributaire de son immense voisin.

«Les États-Unis ont déjà représenté 80 % de nos exportations internationales», rappelle Simon Prévost, président de Manufacturiers et Exportateurs du Québec (MEQ). Aujourd'hui, ce chiffre n'est plus que de 67 %. «Cette dépendance face aux États-Unis n'est pas catastrophique quand l'économie américaine se porte bien. Avant la crise, nos exportations vers la première économie mondiale nous ont énormément favorisés.»

Simon Prévost reste par ailleurs optimiste face aux États-Unis. «Quand on examine en détail les États américains vers lesquels nous exportons, on se rend compte que nos exportations sont concentrées surtout dans le nord du pays. Mais nous sommes à peu près absents au Texas, par exemple, le troisième État d'importance économique. Il y a encore du potentiel aux États-Unis. C'est toujours la première économie mondiale. Il faut s'assurer d'aller chercher tous les bénéfices d'un pays dont la croissance économique est modeste, oui... mais dont le PIB est gigantesque !»

Cela dit, la part considérable qu'occupe l'Oncle Sam dans les exportations québécoises comporte sa part de risques. «Certaines entreprises se sont peut-être laissé aveugler par le marché américain, soutient Alain Proulx. La crise de 2008 nous a forcés à nous ouvrir les yeux et à considérer d'autres marchés.»

C'est précisément dans cette optique que l'organisation qu'il dirige, Export Québec, a été lancée en 2011. En tant qu'unité du ministère du Développement économique, de l'Innovation et de l'Exportation (MDEIE), Export Québec veut centraliser les efforts de développement des marchés internationaux du gouvernement du Québec.

L'organisation gère des programmes d'une valeur de 40 millions de dollars pour soutenir les entreprises exportatrices. Cette enveloppe a été bonifiée, dans le dernier budget Bachand, de trois millions de dollars, afin de soutenir spécifiquement le secteur bioalimentaire, et de trois millions de dollars supplémentaires pour le secteur forestier.

«Nous nous sommes donné pour objectif réaliste de doubler nos exportations dans les pays du BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine) d'ici 2015», dit Alain Proulx.

La Chine, numéro deux

Depuis 2002, les exportations québécoises vers les pays du BRIC ont bondi de... 264 %.

Gardons la tête froide, nous partions de loin. En chiffres, la valeur de nos exportations vers le BRIC est passée de 1,1 milliard de dollars en 2002 à 4 milliards de dollars en 2011. C'est encore des miettes par rapport aux 42,9 milliards de dollars des États-Unis !

Malgré tout, la Chine est devenue en 2011 la deuxième destination des produits québécois, avec 3,7 % de la valeur de nos exportations.

Le pays de Mao dépasse désormais la France, les Pays-Bas, le Royaume-Uni et l'Allemagne parmi les acheteurs de longue date de nos marchandises.

«C'est un événement majeur, souligne Alain Proulx. Cela montre que nos entreprises sont capables d'aller plus loin. La Chine est un marché immense et en forte croissance, il est rassurant de savoir qu'on peut le développer.»

Exporter autrement

Le développer oui, mais différemment. Les exportateurs savent que pour vendre aux pays émergents, il faut s'y installer. Des pays comme l'Inde ou le Brésil sont très protectionnistes. Ainsi, une entreprise qui veut vendre ses produits au Brésil sans les produire localement devra payer une taxe aux douanes de 35 % ! D'autres modes d'entrée dans les marchés étrangers s'imposeront au cours des prochaines années.

«Ne miser que sur l'exportation pour mondialiser son entreprise était la stratégie privilégiée par les dirigeants au cours des années 1960-1970», dit Dominic Deneault, associé principal chez Trebora Conseil. Il a récemment réalisé une étude pour la Caisse de dépôt et placement du Québec sur les facteurs de réussite des entreprises à l'étranger. «Depuis une décennie, le moyen le plus souvent utilisé pour mondialiser une entreprise, poursuit-il, est la création d'une filiale à part entière à la suite d'une acquisition. Désormais, on ne cherche plus seulement à inonder le monde de produits fabriqués chez soi et expédiés par conteneur...»

En chiffres, la valeur de nos exportations vers le BRIC est passée de 1,1 milliard de dollars en 2002 à 4 milliards de dollars en 2011

Principales destinations des exportations québécoises (2011, $ CA)

États-Unis 43 G$

Brésil 0,5 G$

Mexique 1 G$

France 1,4 G$

Royaume-Uni 1,2 G$

Allemagne 1,5 G$

Pays-Bas 1,4 G$

Russie 0,6 G$

Japon 0,8 G$

Chine 2,4 G$

Reste du monde 10,3 G$

SOURCE : INSTITUT DE LA STATISTIQUE DU QUÉBEC

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