Battu par le Portugal, giflé par Dubaï, snobé par la planète ?

Publié le 23/10/2010 à 00:00

Battu par le Portugal, giflé par Dubaï, snobé par la planète ?

Publié le 23/10/2010 à 00:00

En langage de hockey, on dirait que le Canada a longtemps joué " au-dessus de sa tête " avant de se faire brusquement rappeler qu'il n'est qu'un joueur moyen.

Marcel Côté, cofondateur de la firme Secor, ne mâche pas ses mots : pour lui, l'incohérence de la politique étrangère du Canada est en train de transformer le pays en Rodney Dangerfield de la scène internationale. Un bouffon. À preuve, la défaite que le pays vient de subir aux mains du Portugal pour obtenir un siège au Conseil de sécurité des Nations-Unies

Cette défaite est bien plus qu'une banale rebuffade. Le revers est d'autant plus douloureux, compte tenu des rivaux en présence. D'un côté se trouve le Portugal, dirigé par des dictateurs pendant la majeure partie du 20e siècle (jusqu'en 1974), qui traîne un lourd passé colonial et dont les finances publiques sont en mauvais état. De l'autre, le Canada, qui appartient au cercle des puissances mondiales (le G8), qui a traversé la crise sans trop de difficultés et qui s'est fait connaître pour son appui aux missions humanitaires des Nations-Unies. Et c'est le Portugal qui l'emporte ?

C'est dire à quel point le vent a tourné et à quel point le capital de sympathie dont jouissait le Canada s'est effrité. Entre nous, notre inclusion dans le G7 (maintenant le G8, avec la Russie) est due à ce capital, puisque le pays ne fait pas le poids par rapport aux États-Unis, à l'Allemagne ou au Japon... Si c'était à recommencer, on nous fermerait probablement la porte au nez. Heureusement, c'est le G20 - dont nous sommes membres - qui est en train de s'imposer comme tribune internationale de premier niveau.

Et si l'affaire des Nations-Unies a fait la manchette, la gifle que Dubaï vient de donner au Canada est tout aussi grave. Dubaï lui a ordonné de déménager sa base militaire et empêché l'avion qui transportait le ministre de la Défense, Peter McKay, de se poser sur son sol. Imaginez que le Canada fasse un jour la même chose, on entendrait des hurlements partout dans le monde ! De tels gestes diplomatiques sont rares. Mais c'est un autre signe révélateur de notre perte d'influence.

Il faut y voir à la fois une conséquence de gestes mal avisés et une cause probable de soucis à venir.

Les Mexicains digèrent mal que le Canada ait imposé des visas à leurs ressortissants en visite chez nous. Mauvais pour les affaires, au moment où nous cherchons à renforcer nos liens commerciaux avec cet autre pays signataire de l'ALENA.

Les pays arabes ne sont pas davantage contents de l'alignement inconditionnel du Canada sur la politique étrangère américaine, ni de nos liens très étroits avec Israël. La Chine nous regarde plus froidement depuis quelques années, alors qu'elle est devenue une superpuissance économique.

Le Canada devrait-il renier le dalaï-lama pour faire plaisir aux Chinois ? Devrait-il se distancer d'Israël pour gagner la faveur des Arabes ? Non. Mais tout est dans la manière. La politique étrangère du gouvernement canadien a toute la subtilité d'un éléphant.

Les soucis risquent de s'accumuler. On prêche depuis des décennies aux gens d'affaires l'importance de développer d'autres marchés que celui des États-Unis. Mais courtiser les Mexicains est devenu plus compliqué. Cela pourrait le devenir pour le Maghreb et l'Orient. Le refroidissement des liens avec Dubaï n'annonce rien de bon. Or, malgré leurs déboires économiques récents, ce sont des régions à fort potentiel de croissance.

Une multinationale comme SNC-Lavalin a consolidé son expansion internationale grâce à des contrats importants en Afrique du Nord et en Asie. On l'engage d'abord pour ses compétences, mais le drapeau canadien ne nuit pas. Il a même pu faciliter les choses par le passé. Dorénavant ?

Il ne faudrait pas qu'aient lieu aujourd'hui les élections qui ont permis à Montréal d'obtenir le siège d'organisations internationales comme l'OACI, l'Agence mondiale antidopage ou l'Institut de statistique de l'Unesco, et qui sont en bonne partie des concours de popularité. Les événements récents montrent que le Canada est en panne de popularité.

Le revers à l'ONU ne précipitera pas le retour à la récession, pas plus que la jambette donnée par Dubaï. Mais dans l'amphithéâtre du village global, on vient de nous signaler que nous n'avons plus notre place aux premières loges. Ce n'est pas seulement irritant, c'est aussi embêtant. Et pas seulement sur le front diplomatique, mais aussi potentiellement sur celui des affaires.

De mon blogue

www.lesaffaires.com/rene-vezina

Quebecor et la peur

Le conflit se poursuivra malheureusement, et on devine que PKP (Pierre Karl Péladeau) est de mauvaise humeur. Cela ne devrait pas empêcher les journalistes et chroniqueurs de faire correctement leur travail. La peur n'est pas une vertu en démocratie.

Vos réactions

" Est-ce que le présence de ruefrontenac.com nuit tant que ça aux ventes du Journal de Montréal ? J'en doute. Quebecor veut tout contrôler. À long terme, ils peuvent s'y perdre. "

- jad

" Bien que je n'aime pas particulièrement PKP, les mésaventures des syndiqués du Journal de Montréal ne me feront pas pleurer. Ils avaient des conditions de travail blindées, comme des vacances payées à temps et demi, et ils n'ont pas su s'adapter. Qu'ils en subissent les conséquences ! "

- Léon Bérard

" La journée où nous travaillerons tous au salaire minimum, notre système s'écroulera. Oui, il y a des abus syndicaux, mais il y a aussi beaucoup d'abus du côté du patronat. "

- Raven

rene.vezina@transcontinental.ca

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