Racontez-moi votre histoire!


Édition du 08 Mai 2024

Racontez-moi votre histoire!


Édition du 08 Mai 2024

Dans le monde des affaires et de l’emploi, la capacité à se vendre et à se mettre en valeur est un incontournable. (Photo: 123RF)

EXPERTE INVITÉE. Un bon conteur raconte une histoire en s’appuyant seulement sur ses connaissances et les images qui l’habitent. Sa voix doit exprimer autant les personnages, les situations, que l’ambiance. Si une image vaut mille mots, une bonne histoire se raconte autant avec le cœur qu’avec le corps.

Certes, tout le monde n’a pas le talent de Fred Pellerin ou la voix profonde, rassurante, et autoritaire de Morgan Freeman. Selon la psychologie cognitive, retenez qu’une histoire est 22 fois plus mémorable qu’un simple fait et vaut mieux qu’un long PowerPoint. Pour y arriver, il faut s’investir personnellement dans le récit, et tout cela avec émotion, afin de toucher l’auditoire. « On ne voit bien qu’avec le cœur, l’essentiel est invisible pour les yeux », écrivait Antoine de Saint-Exupéry.

En recrutement, pour entreprendre et mener une conversation qui s’inscrira dans la mémoire de l’interlocuteur, il faut s’assurer d’établir une connexion personnelle qui saura l’interpeller et susciter son intérêt. Tout commence par trouver un point en commun avec la personne pour faire résonner votre histoire au sein de sa propre expérience. C’est ce que les publicitaires nomment le « marketing relationnel », afin de tisser des liens émotionnels avec les consommateurs.

Avez-vous remarqué que les meilleures publicités mettent rarement les qualités du produit ou du service en premier plan ? Elles utilisent un personnage ou une situation pour créer un ancrage dans l’esprit des gens. La publicité émouvante de Budweiser lors du Super Bowl 2014 a été classée comme la publicité la plus populaire de toute l’histoire de l’événement phare de la NFL. Le clip de 90 secondes, intitulé « Puppy Love », dépeint l’amitié entre un chiot qui cherche à s’enfuir d’un chenil pour rejoindre un cheval. Il met en scène une intrigue qui culmine lorsque le cheval, avec l’aide de ses amis, empêche le propriétaire du chenil de le donner. Pour une annonce d’un brasseur, on est loin du bar où la bière coule à flots, mais plutôt dans un voyage émotif d’amitié, de courage et de solidarité.

Ce qui prime, ce n’est pas tant ce que vous dites, mais comment l’autre le ressent.

Dans le monde des affaires et de l’emploi, la capacité à se vendre et à se mettre en valeur est un incontournable. Au-delà des résultats financiers, de votre CV et de vos réalisations, maîtriser votre storytelling est une arme puissante pour changer la donne et convaincre le recruteur. Ce récit, lorsqu’il est articulé efficacement, non seulement différencie les individus dans un marché du travail compétitif, mais favorise également des connexions plus profondes avec les collègues, les mentors et les réseaux d’affaires.

Il faut construire votre narratif avec une histoire qui explique « comment » et « pourquoi » vous êtes devenu ce que vous êtes et en quoi cela a transformé votre carrière. Quand vous racontez des histoires personnelles qui reflètent vos expériences, celles de votre entreprise ou de vos employés, cela permet à votre auditoire de visualiser votre message et de s’y identifier. C’est l’art d’utiliser votre intelligence émotionnelle au bénéfice de l’intelligence rationnelle. Le savoir-raconter est de livrer votre récit avec humanité et humilité en utilisant votre voix, les silences, votre gestuelle et votre regard.

Tout l’art du storytelling réside dans quatre éléments qui devront résonner avec l’autre et l’amener à se projeter dans votre récit.

1. L’intrigue : expliquez le contexte dans lequel se situe votre histoire (période économique, politique, contexte d’affaires ou de leadership). C’est votre ancrage. N’hésitez pas à faire référence à un moment de vie que l’autre a vécu qui vous permettra de l’engager (effet miroir), car lui aussi a possiblement expérimenté une situation similaire. « Quand les dirigeants racontent des histoires personnelles qui reflètent les expériences des employés, ils contribuent à normaliser les défis communs », me confiait récemment une experte en coaching de dirigeants.

2. Le protagoniste : cela peut être vous, votre entreprise, votre division d’affaires. Reliez-le à l’intrigue pour illustrer de quelle manière le contexte le bouleverse.

3. Le but : expliquez le défi, le conflit ou le risque auquel il est confronté. Soyez clair et précis, mettez-y de la couleur et des détails forts pour captiver l’autre. Il faut y mettre de votre cœur en laissant découvrir votre part de vulnérabilité. Aviez-vous peur ? Étiez-vous affecté ou ébranlé par la situation ?

4. Le dénouement : concluez en laissant suffisamment de suspens pour créer un effet wow !

Un mauvais conteur peut massacrer les meilleures idées, tandis qu’un bon conteur peut présenter un concept intimidant avec soin et compassion pour son public. « Cela nécessite de la pratique, mais quand c’est bien fait, un bon storytelling peut avoir une répercussion majeure sur votre équipe, votre organisation et toute votre carrière » (Jeff Gothelf, l’auteur de Forever Employable. How to Stop Looking for Work and Let Your Next Job Find You).

J’ai hâte de vous entendre !

À propos de ce blogue

Nathalie Francisci est présidente exécutive pour le Québec chez Gallagher. Elle oeuvre en recrutement de cadres depuis 25 ans. Entrepreneure, experte en gestion des talents, elle est reconnue comme l’une des références au Québec. Femme d’affaires engagée, elle siège sur plusieurs CA. Conférencière et chroniqueuse, ses interventions font la différence par l’énergie et style direct qui s’en dégagent. Passionnée par nature, elle n’oublie jamais qu’elle travaille avec des gens, pour des gens. Elle partagera avec vous ses réflexions et expériences sur l’univers du recrutement et de la gestion des talents pour faire réfléchir autant les individus que les organisations. Nathalie Francisci a été Finaliste au Concours des Mercuriades en 2001, elle a reçu le Prix «Nouvelle Entrepreneure du Québec» en 2001 et «Entrepreneure – petite entreprise» en 2007 décerné par le RFAQ et elle a remporté le Prix Arista en 2008. Elle porte les titres de CRHA et de IAS.A.

Nathalie Francisci
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