Le sénateur John Fetterman a notamment promis d’essayer d’empêcher la mise en œuvre de l’accord. (Photo: Getty Images)
New York — Joe Biden a mis en garde jeudi contre le rachat du sidérurgiste américain U.S. Steel par le groupe japonais Nippon Steel, appelant à «un examen approfondi» en termes de sécurité nationale et de fiabilité de la chaîne d’approvisionnement.
Le président américain estime que «l’achat de cette entreprise américaine emblématique par une entité étrangère — même celle d’un allié proche — semble mériter un examen approfondi en termes […] de sécurité nationale et de fiabilité de la chaîne d’approvisionnement», a déclaré la principale conseillère économique de Joe Biden, Lael Brainard, dans un communiqué.
Il estime que U.S. Steel est «essentielle à notre sécurité nationale», a-t-elle souligné.
L’annonce lundi de ce projet de rapprochement a placé le président démocrate Joe Biden, candidat à un second mandat et qui se pose en défenseur de la souveraineté industrielle de l’Amérique, dans une position très délicate. Il ne peut en effet pas se mêler ouvertement des affaires d’entreprises privées.
Une enquête va désormais être menée par l’agence gouvernementale américaine chargée d’évaluer le risque des investissements étrangers, le CFIUS, auquel les deux groupes soumis leur projet de rapprochement, a indiqué U.S. Steel, jeudi à l’AFP.
«Le Japon est un allié important des États-Unis. Il s’agit d’un développement important pour l’acier américain, pour les emplois américains et pour la sécurité nationale américaine», a souligné le groupe.
Si le CFIUS considère qu’il existe un risque, il en réfère au président des États-Unis, qui prend la décision finale (validation, interdiction ou feu vert sous conditions).
L’administration Biden est «prête à examiner attentivement les conclusions de toute enquête […] et à agir le cas échéant», a dit la Maison-Blanche.
Joe Biden, qui affiche régulièrement son soutien aux syndicats, a reçu le soutien du syndicat des métallurgistes USW, opposé à ce rachat, et qui a dit dans un communiqué partager «beaucoup d’inquiétudes» exprimées par la Maison-Blanche.
«Mauvaise pour les travailleurs»
Les deux conseils d’administration ont approuvé à l’unanimité l’accord de rapprochement, qui reste soumis à la validation des actionnaires de U.S. Steel et à celle des autorités réglementaires. La finalisation est attendue, au plus tard, au troisième trimestre 2024.
Mais leur projet a immédiatement suscité des critiques au nom de la sécurité nationale et de la nécessité de maintenir le groupe américain fondé en 1901 entre des mains américaines.
Et Joe Biden subit une vive pression de la part d’opposants à cette acquisition d’US Steel par un groupe japonais, y compris dans son propre camp politique.
«Cette transaction est mauvaise pour les travailleurs et mauvaise pour la Pennsylvanie», a par exemple critiqué John Fetterman, sénateur démocrate de cet État de l’est des États-Unis, qui abrite de nombreuses usines sidérurgiques et le siège de U.S. Steel, et sera l’un des plus disputés lors de l’élection présidentielle l’an prochain.
Le sénateur de l’Ohio JD Vance et deux autres républicains ont demandé à la ministre du Trésor Janet Yellen de bloquer la transaction, estimant que la production nationale d’acier était «vitale pour la sécurité nationale américaine».
Nippon Steel compte débourser, au total, 14,9 milliards de dollars américains pour mettre la main sur l’aciériste américain.
U.S. Steel avait lancé une revue stratégique en août après avoir reçu plusieurs offres non sollicitées pour un rachat partiel ou total.
L’entreprise avait rejeté à l’époque une offre de son concurrent américain Cleveland-Cliffs qui valorisait sa cible à environ 10 milliards de dollars américains.
La saisine du CFIUS est souvent réalisée par les entreprises elles-mêmes lorsqu’elles veulent recevoir un blanc-seing pour une opération transfrontière dans un secteur susceptible d’être considéré comme crucial pour la sécurité nationale américaine.