MAUDITE JOB! Vos interrogations. Les solutions d’Olivier Schmouker.
Q – «La grande mode, c’est de dire qu’on est un leader humble. Mais je ne m’imagine pas une seconde dire aux autres que je vaux moins qu’eux ni m’effacer en réunion. S’il fallait me montrer humble, je perdrais vite ma job. Quand cette mode finira-t-elle par passer ?» – Laurent
R. – Cher Laurent, l’humilité n’est pas une mode, encore moins une faiblesse de caractère. Faire preuve d’humilité, c’est se tenir loin de l’autoglorification, c’est savoir faire taire son ego – son insatiable besoin d’impressionner, de rivaliser -, c’est arrêter d’être obsédé par son nombril. C’est réveiller en soi une puissance qu’on peine à imaginer : la racine latine du terme «humble» signifie «sol», si bien que l’humilité est ce qui nous permet d’être riche comme la terre, c’est-à-dire à la fois serein, sans prétention et fertile.
Est humble celui qui a confiance en lui-même, qui sait que ses intentions sont honorables, qui obtient aisément l’appui des autres. Car l’humilité est séduisante aux yeux des autres : on se sent bien avec quelqu’un qui est humble, et en retour, on a envie de travailler avec lui pour atteindre un objectif audacieux ou pour explorer une voie inédite. Car l’humilité, comme vous le voyez maintenant, est le propre des grands leaders.
Maintenant, comment devenir à votre tour un leader humble ? Dans son livre Just one thing, le neuropsychologue Rick Hanson préconise de travailler son estime de soi, en particulier de se montrer honnête avec soi-même et d’accepter de voir «ce qui nous » éloigne » de l’humilité». C’est-à-dire de considérer toutes les fois où l’on se montre trop sûr de nous-mêmes, prétentieux, ou encore arrogant. Puis, de faire l’effort de corriger le tir chaque fois que l’on ressent l’envie de surenchérir, de trouver à redire, de mépriser ou de dévaloriser autrui. «Dites-vous qu’il vous faut plutôt accompagner les autres, à ces moments-là : soyez modeste, ne cherchez pas en permanence à avoir raison, n’interrompez pas vos interlocuteurs, ne monopolisez pas la parole et attribuez-vous les seuls mérites qui vous reviennent vraiment», suggère-t-il.
À la clé, des relations plus simples et plus saines avec vos collègues, et par suite, l’occasion pour chacun de briller par ses talents particuliers là où, auparavant, vous les brimiez sans même le réaliser. C’est que, comme le souligne M. Hanson, l’«humilité apporte la paix et donne des fruits merveilleux».
Au secours, je m’ennuie !
Q. – «La faute au télétravail ? Aux collègues mous comme du Jell-O ? Aux tâches plus inutiles les unes que les autres ? Je m’ennuie, oui, je m’ennuie terriblement au travail…» – Sandrine
R. – Chère Sandrine, avez-vous noté, comme moi, cette croyance contemporaine selon laquelle «travailler doit nous rendre heureux» ? Aujourd’hui, la question que tout le monde se pose, c’est de savoir si notre travail nous permet de nous aimer «un peu, beaucoup, passionnément, à la folie ou pas du tout». Et on est tout naturellement malheureux quand on pige autre chose que «passionnément» ou «à la folie».
Le philosophe Alain de Botton y a réfléchi dans son livre Splendeurs et misères du travail, et il en est arrivé à la conclusion que «le travail, par sa nature même, ne nous accorde pas d’autres possibilités que de le prendre » trop au sérieux « ». Autrement dit, chère Sandrine, votre ennui est normal, en ce sens qu’il résulte de notre approche du travail, trop sérieuse, et donc propice au rébarbatif.
Que faire ? C’est simple, faire preuve d’une «belle légèreté», en prenant le temps de dénicher les aspects positifs de notre quotidien au travail, aussi menus soient-ils, et de déterminer la manière de les faire grandir, à l’image d’un jardinier qui, à force d’amour et de patience, parvient à mettre au jour des plantes magnifiques là où il n’y avait qu’un terrain vague. Dès lors, le travail est en mesure de devenir «une bulle parfaite dans laquelle investir nos espoirs de perfection».