Investissement socialement responsable et placements à risque
Institut de planification financière|Publié le 29 septembre 2023La philosophie de Warren Buffett pourrait vous inspirer dans votre stratégie de placements. (Photo: 123RF)
EXPERT INVITÉ. La jungle des placements est toujours aussi impardonnable face à nos comportements souvent trop émotifs. Il est donc important de bien réfléchir avant de mettre en place votre portefeuille de placements. Ce n’est définitivement pas un environnement où l’on construit l’avion en cours de vol… vous risqueriez de vous écraser tôt ou tard.
Au cours des dernières années, on a parlé de l’éthanol, de la cryptomonnaie, des viandes synthétiques ou encore, du cannabis. Est-ce que cela veut dire qu’il aurait fallu y investir? Avec les hauts et les bas que les entreprises de ces différents secteurs d’activités ont connus, il semble facile de répondre à cette question aujourd’hui, mais que faire de la nouvelle tendance de demain? On investit? Si oui, combien?
Il devient donc important de rédiger votre propre politique de placements. Normalement, une politique de placement est une entente entre l’investisseur ou l’investisseuse et la personne qui gère ses placements. Il s’agit d’un document qui découle du profil d’investisseur, mais qui est beaucoup plus précis, décrivant par exemple les objectifs, le rendement espéré, le degré de risque du portefeuille, les limites quant aux différents secteurs de l’économie, etc.
Dans votre politique, vous consignerez donc les types d’investissements avec lesquels vous êtes confortables et ceux avec lesquels vous ne l’êtes pas. Vous pourrez décider quel pourcentage d’actions et d’obligations est approprié pour vous. Vous pourriez même vous aider de sites neutres et crédibles pour déterminer votre profil d’investisseur, votre tolérance au risque en d’autres mots. Par exemple, l’Autorité des marchés financiers (AMF) a un très bon site.
Toujours dans votre politique de placement, vous déciderez du pourcentage maximum de votre portefeuille (10 %, par exemple) que vous accepterez d’investir dans des entreprises considérées comme représentant un risque important (par exemple les cryptomonnaies), pourcentage que vous ne changerez plus par la suite.
Vous pourriez aussi y inscrire vos propres règles afin de vous les rappeler au moment opportun, car, contrairement à vos autres placements, la patience pourrait ne pas être de mise avec les placements plus risqués. Il faut parfois reconnaître que vous avez fait le mauvais choix et vendre à perte avant de perdre tout votre investissement. C’est la règle # 4 de Warren Buffett : « The most important thing to do if you find yourself in a hole is to stop digging. »
Que les investissements soient à risque élevé ou non, il faut faire ses devoirs avant d’investir dans une entreprise afin de bien comprendre l’offre de service ou les produits offerts. À défaut, la règle # 9 de Warren Buffett doit être respectée : « Never invest in a business you cannot understand. », c’est-à-dire, que vous devriez investir seulement dans une entreprise dont vous comprenez l’offre de service ou les produits offerts. À titre d’exemple, les « blockchain » ou chaînes de blocs sont sans doute très à la mode, mais si vous n’y comprenez rien, restez loin de ce type d’investissement.
Toujours dans la rédaction de votre politique de placement, vous pourriez vous questionner sur votre position face à l’investissement socialement responsable (ISR). En effet, vous pourriez décider que le tabac et les pétrolières, ce n’est pas pour votre portefeuille, tout comme vous pourriez décider du contraire.
Pour bien faire vos devoirs face à l’ISR, l’AMF a une autre page sur son site qui pourra vous en apprendre beaucoup sur le sujet. Sur cette page, on explique ce que couvre l’ISR, car n’oublions pas qu’ISR ne signifie pas simplement « aucun pétrole ». En effet, le respect des employés, les droits de la personne et la gouvernance des entreprises ne sont que quelques exemples de ce qui fait partie de l’ISR.
Sur la page du site de l’AMF, on indique qu’actuellement, il n’existe pas encore de normes officielles précisant quels produits de placement, ou encore quelles entreprises, respectent les règles ISR. Ce n’est pas comme les règles ISO, tout reste à faire dans ce domaine. Il est donc important que vous définissiez dans votre politique de placement ce qu’est l’ISR pour vous. Autrement dit, il s’agit pour vous de déterminer vos choix de placements en fonction de vos valeurs.
Pourtant, plusieurs produits de placement se targuent de faire partie des ISR, mais, comme le mentionne l’AMF sur son site : « Certains peuvent avoir un ton exagérément promotionnel et ne donner qu’une information positive sur les facteurs ESG pris en considération par le fonds ».
Vous pourriez aussi attendre que des normes internationales soient mises en place, mais vous devrez être patient. Avant que l’ensemble des pays s’entendent sur des points aussi importants que ceux qui sont couverts par l’ISR, vous perdrez de nombreuses années de rendement puisque votre portefeuille ne sera pas investi.
Il faut donc prendre le temps de faire ses propres recherches avant d’investir dans une entreprise ou un produit d’investissement qui se prétend respectueux des principes de l’ISR. Comment? En se renseignant sur les activités de l’entreprise ou, pour un produit d’investissement comme un fonds commun de placement, en consultant son prospectus ou encore, la liste des entreprises dans lesquelles le fonds investit présentement.
Si vous constatez qu’une entreprise ne respectant pas les critères de votre politique de placement s’y retrouve, n’y investissez tout simplement pas. Évidemment, cela peut s’avérer fastidieux comme travail, mais cela en vaut la peine si au bout du compte, vous vous retrouvez avec un portefeuille de placement qui respecte vos valeurs.
Finalement, vous devriez aussi réfléchir aux opportunités d’investissements qui demanderont un certain recul avant de prendre votre décision. À titre d’exemple, qu’en est-il d’une entreprise qui se vante de respecter les critères ISR, mais dont la majorité de ses clients ne le font pas? En effet, devriez-vous investir dans la compagnie A si sa seule cliente, la compagnie B, est une pétrolière alors que vous ne souhaitez pas investir dans ce type d’entreprise?
Bonnes recherches et bonne rédaction de votre politique de placement!
Clément Hudon, Pl. Fin., FCSI, BAA, M. Sc.