La première étape pour les entrepreneurs sera de s’informer et de comprendre ce que sont les normes S1 et S2. (Photo: 123RF)
NORMES ESG: 2024 SERA UNE ANNÉE CHARNIÈRE. Démarrer un processus de décarbonation et de réduction d’émissions de gaz à effet de serre (GES) à partir de rien peut sembler être une tâche gargantuesque. Voici quelques conseils destinés aux entreprises à la recherche de solutions.
La première chose à savoir, rappelle le vice-président du Conseil des normes internationales d’information sur la durabilité (International Sustainability Standards Board ou ISSB), Jingdong Hua, est que l’arrivée des normes S1 et S2 ne signifie pas qu’une entreprise doit divulguer ses émissions au centième de tonne près demain matin.
« Notre message est que nous ne sommes pas à la recherche de la perfection à votre premier rapport, note-t-il. Nous voulons que les entreprises soient à l’aise de démarrer un processus de divulgation et, au fil des ans, qu’elles s’améliorent. Si vous commencez et n’avez pas la capacité d’effectuer une analyse quantitative détaillée, nous serons satisfaits avec une analyse qualitative au départ. »
Le degré de précision va varier en fonction des capacités des entreprises et va évoluer au fil des ans, concède le président du Conseil canadien des normes d’information sur la durabilité (CCNID), Charles-Antoine St-Jean.
« La petite PME ne sera probablement pas capable de fournir ces informations au début, mais avec le temps, on s’attend à ce que ses capacités se développent, avoue-t-il. L’important, au départ, est de comprendre d’où les informations nécessaires vont venir. »
Charles-Antoine St-Jean mentionne que d’ici quelques années, des systèmes vont se développer, de nouveaux logiciels vont apparaître sur le marché et des entreprises de fourniture de données vont pouvoir fournir des estimations aux entreprises sur leur propre consommation.
Marche à suivre
Le président du CCNID propose aux entrepreneurs une courte marche à suivre pour démarrer leur processus de décarbonation et de divulgation. La première étape sera de s’informer et de comprendre ce que sont les normes S1 et S2.
« Il faudra ensuite comprendre quelles seront les données qui seront nécessaires pour vos clients et vos fournisseurs, poursuit-il. Discuter avec eux pour voir quelles sont les données dont ils auront besoin et à partir de quand. »
Les entreprises doivent par la suite trouver la manière d’accumuler ces données. Charles-Antoine St-Jean pointe notamment du côté des fournisseurs d’énergie, qui commencent déjà à donner de bons estimés sur ce qu’est le tonnage en fonction de la consommation de leurs clients.
Sinon, on peut regarder si les informations sont déjà disponibles dans les systèmes de l’entreprise. Si elles ne le sont pas, existe-t-il des fournisseurs de données qui peuvent leur fournir de bons estimés de ce qu’ils produisent comme GES ?
Finalement, il suggère de relever quels sont les risques et les occasions liés aux changements à prévoir dans leurs façons de faire.
« Au final, ce qu’un investisseur veut voir, c’est la direction, tranche-t-il. D’année en année, y a-t-il une diminution et peut-on la mesurer ? »
Petits pas et investissements qui rapportent
La vice-présidente à l’environnement et au développement durable chez Pomerleau, Geneviève Roy, propose aux entreprises de déterminer où elles peuvent changer les choses. Elles doivent aussi dénicher des actions rapides et dupliquer les succès.
« Quels gestes puis-je poser pour changer ces choses ? explique-t-elle. C’est un peu la théorie des petits pas: commencer avec un petit projet pilote à une échelle qui est accessible. On l’implante et si ça fonctionne bien, est-ce qu’on peut l’étendre à d’autres opérations? Tranquillement, on accumule les petits gestes pour finalement se rendre compte qu’on peut atteindre nos objectifs. »
Elle suggère aussi de ne pas s’attaquer à quelque chose de trop gros qui peut devenir démobilisant pour les troupes en cas d’échec.
Le cofondateur et directeur financier de Clearsum, François Senez, rappelle quant à lui qu’avec tout investissement vient l’occasion de réduire les coûts.
« Il suffit d’y aller stratégiquement, affirme-t-il. On calcule le coût marginal de réduction des GES, puis on établit l’ensemble des actions possibles et on regarde le coût pour mettre en place une action comparativement à la réduction des GES. Une fois qu’on a déterminé tout ce qu’on peut faire avec les coûts et les réductions possibles, on fixe des cibles et on établit un budget pour planifier tes dépenses d’investissement. »
Outils récents
Le milieu financier québécois a pris le taureau par les cornes depuis le début de l’année pour offrir aux entrepreneurs de la province de l’aide en matière de divulgation extrafinancière des émissions de GES.
L’Université de Montréal a annoncé, en juin, la mise sur pied de l’Institut Michael D. Penner, qui se spécialisera dans la recherche sur les facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG). Finance Montréal, elle, a lancé en octobre le Réseau d’apprentissage en finance durable et actions climatiques, qui propose diverses formations aux entrepreneurs québécois afin qu’ils développent une expertise en finance durable et qu’il réalisent leur transition vers la décarbonation.
Il existe également des ressources comme Clearsum, une firme-conseil spécialisée en stratégie sur les changements climatiques au sein des entreprises.
« Nous aidons les entreprises à identifier leurs risques, leur capacité de mitigation et d’adaptation ainsi qu’à élaborer un plan de décarbonation, ce qui leur permet de bâtir leur plan de divulgation », précise François Senez.