Selon un sondage de l’American Association of Retired Persons, 80 % des 50 ans et plus trouvent que la publicité renvoie une image « stéréotypée » de leur génération . (Photo : 123RF)
MARCHÉ DES AÎNÉS. Il y a trois ans, Médicus a lancé un vaste chantier visant à revamper son identité et sa stratégie de marque. Tout y est passé : les succursales, les supports visuels, le site web, la manière de promouvoir les produits dans les publicités. Le fabricant et distributeur d’équipements de mobilité montréalais désirait adopter une image vibrante et positive, reflétant les grandes ambitions qu’il avait pour les années à avenir.
«Quand je suis entrée en poste, j’ai tout de suite réalisé que la publicité qui s’adressait aux aînés était un peu drabe, confie Alexandra Kovacs, chef marketing et expérience client de l’entreprise, qui a copiloté l’exercice de «branding». On mettait beaucoup l’accent sur les difficultés que vivaient les personnes à mobilité réduite. On avait aussi tendance à présenter des personnes diminuées, dans des positions peu avantageuses.»
La décision a été prise d’adopter un message résolument positif, qui met l’accent sur les solutions plutôt que sur les problèmes. Et qui fait miroiter des expériences positives que peuvent vivre les personnes à mobilité réduite lorsqu’elles acceptent d’utiliser les équipements requis.
Médicus s’est ainsi éloignée des publicités du type «I’ve fallen, and I can’t get up !» («Je suis tombé et je ne peux plus me relever !») popularisées par l’entreprise de système d’alerte médicale LifeCall pour adopter une imagerie qui inspire l’aventure et les expériences inédites. Le nouveau site web de l’entreprise met par exemple en scène un randonneur perché sur le sommet d’une montagne, muni d’une prothèse au genou et un septuagénaire en quadriporteur sur un chantier de construction.
Yanick Bédard, vice-président exécutif de la stratégie à la firme de communication Sid Lee, a eu l’occasion de piloter une étude ethnologique visant à mieux comprendre les perceptions, les freins et les attentes d’une clientèle cible de 70 ans et plus. Ce mandat lui a permis de faire quelques découvertes intéressantes, pouvant expliquer la pertinence de l’imagerie adoptée par Médicus.
«Une personne nous a dit : « Je comprends que tu me vois comme une personne âgée, mais ce n’est pas comme cela que je me sens. » Les personnes âgées ne se perçoivent pas comme des vieux. Ils se définissent comme un ancien machiniste ou un ancien professeur… En d’autres mots, leur expérience de vie transcende leur l’âge», explique le directeur publicitaire.
Groupe hétérogène
Quand Médicus a mené son exercice de repositionnement de marque, Alexandra Kovacs et son équipe ont défini des personas représentant les clientèles cibles à qui l’entreprise désirait s’adresser. Celles-ci ont toutefois été abandonnées en cours de route. «Un déambulateur peut aussi bien être utilisé par un accidenté de la route que par une personne âgée, explique la chef marketing. Nous avons plutôt décidé de concevoir nos publicités en fonction du média et des catégories de produits à promouvoir.»
Sans aller aussi loin que d’abandonner le concept de persona, Yanick Bédard constate que la catégorie «personnes âgées» présente une segmentation de profils comparable à celle observée chez les milléniaux ou d’autres tranches d’âge de consommateurs.
«Les aînés ne forment pas un groupe homogène. Quand on crée des personas pour une clientèle âgée, on retrouve la même variété de profils socioéconomiques, de langues, de cultures, de religions, d’intérêts personnels et d’expériences que dans la population en général», souligne-t-il.
Quand on s’adresse «aux aînés», on doit par conséquent mettre en valeur une diversité d’expériences et de cultures. Le directeur publicitaire salue d’ailleurs le projet de la banque de photos américaine Getty Images visant à revamper l’imagerie de cette tranche d’âge par une galerie de portraits saisissants montrant des aînés actifs, aux regards allumés et rieurs, donnant l’impression de mordre dans la vie.
L’initiative se voulait une réponse à un sondage de l’American Association of Retired Persons, révélant que 80 % des gens âgés de 50 ans et plus trouvent que la publicité renvoie une image «stéréotypée» d’eux-mêmes.
«Ils ont vu neiger, rappelle Yanick Bédard. Et on ne leur en passe pas facilement.» Quand on s’adresse aux aînés, on doit donc miser sur l’empathie… et sur une authenticité de tous les instants.