Dans les universités, les chercheurs sont absorbés par la COVID-19. (Photo: 123RF)
INGÉNIEURS. Au moins 273 projets de recherche en ingénierie liés à la COVID-19 sont en cours dans l’ensemble des universités canadiennes, chiffrait cet été un sondage réalisé pour le compte des Doyennes et doyens d’ingénierie Canada. Portrait des retombées à court et à plus long terme.
À l’Université de Sherbrooke, une équipe s’est lancée, au printemps, dans la fabrication d’un ventilateur bien particulier. Dirigée par le professeur de génie mécanique Jean-Sébastien Plante, en collaboration avec le professeur de médecine Yves Collin, l’équipe a réussi à construire avec succès un prototype fonctionnel en six semaines seulement. «Notre ventilateur a recours à un fluide magnétorhéologique, soit une huile avec des particules de fer qui change de viscosité lorsqu’elle est soumise à un champ magnétique, qui permet de contrôler le cylindre pneumatique qui envoie l’air aux poumons», explique Catherine Véronneau, doctorante en génie mécanique et l’une des cinq étudiants ayant participé au projet.
Leur prototype renferme des promesses de réels bienfaits pour les futurs patients. «Il reste du travail, mais la deuxième version du ventilateur est déjà conçue sur l’ordinateur. Nous attendons juste les subventions pour la fabriquer et la tester.»
Un profond problème de surface
À l’Université Laval, le professeur Gaétan Laroche s’est quant à lui attaqué au problème de la survie du nouveau coronavirus sur les surfaces solides. Le spécialiste en génie des matériaux a entamé un projet en collaboration avec Avmor, une firme de Laval qui propose des solutions nettoyantes, afin de modifier certains matériaux pour les rendre résistants au virus.
«L’idée était d’étudier la structure de la COVID-19 et de tenter d’attacher à la surface d’un matériel des molécules qui vont venir interagir avec la membrane du virus pour le faire éclater», explique-t-il. Ainsi modifiée, la surface du matériel en question deviendrait résistante au virus de façon permanente.
Comme cette technique est assez bien comprise par les scientifiques, le développement de surfaces commercialisables résistantes à la COVID-19 pourrait se faire à l’intérieur d’environ un an.
«C’est une technologie relativement facile à amener à l’échelle industrielle, que l’on parle de traiter des métaux ou des plastiques, souligne Gaétan Laroche. Alors c’est sûr que quand j’ai entendu que la COVID 19 survivait longtemps sur certaines surfaces, l’idée m’est venue de les modifier pour les rendre antivirales.»
Un masque prometteur
Son collègue du Département de génie électrique et génie informatique de l’Université Laval, Amine Miled, ne fait pas dans l’euphémisme pour décrire le nouveau type de masque qu’il est pour sa part en train de développer en collaboration avec la firme H2O Innovation, basée à Québec.
« Cette technologie, si on arrive à la développer, serait révolutionnaire, affirme-t-il. Un véritable “game changer”. » Pourquoi ? Le masque en question, dont la conception fait appel à des techniques issues de l’électronique, de la mécanique et de la fluidique, offrirait une protection active pour l’ensemble du visage.
« Nous n’avons pas encore de brevet, alors je ne peux pas donner beaucoup de détails, mais notre masque ne ferait pas qu’empêcher le virus de passer par le nez et la bouche, résume le professeur. Il viendrait le tuer et l’empêcherait d’infecter une personne par les yeux, par exemple. »
Il serait également abordable et réutilisable en plus d’être fabriqué au pays avec des composantes elles aussi toutes locales. « Les éléments de filtration sont produits ici au Québec, dit Amine Miled. On est donc entièrement indépendants de l’extérieur. »
Si ses recherches continuent d’aller bon train, le professeur espère pouvoir entamer les démarches de brevetage d’ici la fin de l’année. « Le problème est que cette pandémie nous a attaqués par surprise », fait-il valoir. Il estime cependant qu’avec le masque qu’il développe, la province serait beaucoup mieux préparée si jamais une situation similaire venait à se reproduire à l’avenir.
« Toute l’équipe est motivée à l’idée de développer un produit qui va nous rendre indépendants et de contribuer à protéger les gens, raconte Amine Miled. Ça m’a frappé, personnellement, de voir la souffrance humaine. C’était choquant et ça m’a donné envie de réagir vite pour trouver des solutions. »