(Photo: courtoisie)
GRANDS PRIX DU GÉNIE-CONSEIL. CATÉGORIE : ENVIRONNEMENT – Capter le gaz carbonique directement des cheminées industrielles, le purifier et l’utiliser pour nourrir des plantes en serre ? Une technologie novatrice développée par CO2 Solutions qui avait mandaté la firme de génie-conseil BBA pour concevoir et construire ce premier «poumon industriel», inauguré à Saint-Félicien en janvier 2019.
Une avancée incroyable pour ce procédé élaboré il y a une vingtaine d’années dans les laboratoires de C02 Solutions. «Dans le passé, les projets de capture de CO2 permettaient de récupérer le gaz pour l’enfouir sous la terre ou dans la mer. S’il existe quelques projets de recherche pour réutiliser ce gaz, ils sont encore rares», estime Lyne Ricard, ingénieure et directrice, Pétrole, gaz et biocarburants chez BBA.
Rare, mais prometteur, puisqu’à Saint-Félicien, cette technologie permet de capter les émissions de CO2 directement des cheminées industrielles de l’usine de pâtes et papiers de Produits forestiers Résolu (PFR). Les émanations sont ensuite purifiées. Le gaz carbonique est ensuite propulsé dans l’air des Serres Toundra pour favoriser la croissance de ses plants de concombres.
«Le CO2 sert de nourriture aux plantes. La plupart des serres vont faire brûler du gaz pour en injecter dans l’air», explique Mme Ricard. Le projet, lauréat du Grand Prix du génie-conseil québécois 2019 dans la catégorie Environnement, fait donc d’une pierre, deux coups. Il permet à PFR de réduire ses émissions et aux Serres Toundra de cesser de brûler du méthane pour produire du dioxyde de carbone.
Un défi pour la firme BBA, qui devait rendre opérationnelle la solution découverte par CO2 Solutions. «Ce qui était hors des sentiers battus, puisque le procédé utilise un enzyme, ce qui repousse les limites du génie conventionnel», soutient l’ingénieure. En effet, intégrer un composant «semi-vivant» à un procédé chimique se révèle une opération délicate. BBA devait donc concevoir des équipements qui offrent les conditions permettant de maximiser la durée de vie de ces enzymes.
Qui plus est, pas question d’augmenter l’utilisation d’énergie ou d’eau pour réussir le tout, ce qui aurait été à l’encontre de la philosophie du projet. «C’était loin d’être simple de trouver de l’énergie dans une usine déjà efficace, mentionne Mme Ricard. Il a vraiment fallu se montrer très créatifs pour aller chercher la moindre trace d’énergie résiduelle, de sources parfois même intermittentes, pour y arriver.»
Lorsqu’elles fonctionneront à plein rendement, les installations de Saint-Félicien permettront de capter près de 30 tonnes de CO2 par jour, ce qui équivaut aux émissions que produiraient 1 750 automobiles si elles parcouraient chacune une fois le tour de la Terre… Mme Ricard estime aussi que ce projet pourrait paver la voie à d’autres du genre, alors que l’idée de donner une deuxième vie aux émissions de GES n’en est encore qu’à ses balbutiements. Une histoire à suivre.