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Norda Stelo fait de son entreprise son plus grand projet

Sophie Chartier|Édition de la mi‑octobre 2023

Norda Stelo fait de son entreprise son plus grand projet

Alex Brisson, PDG de Norda Stelo, entreprise autrefois connue sous le nom Roche (Photo: courtoisie)

GÉNIE-CONSEIL. Norda Stelo cumule depuis quelques années les prix qui saluent sa gestion innovante. De quoi faire oublier qu’il y a seulement une dizaine d’années, elle s’appelait Roche et faisait partie des entreprises les plus citées à la commission Charbonneau. Portrait d’une transformation complète guidée par la saine gouvernance. 

« Dans une crise, on a deux choix : survivre ou mourir », dit Alex Brisson, PDG de Norda Stelo. En 2013, nouvellement nommé, le dirigeant, qui a récemment célébré ses 30 ans d’ancienneté au sein de l’entreprise, a décidé que la firme survivrait. Aujourd’hui, Norda Stelo a une certification B Corp et a été nommée parmi les entreprises canadiennes les mieux gérées en 2022. 

Pour parvenir à ce succès, il a fallu toutefois repartir de zéro. « Tout ce que l’on est aujourd’hui est né de quelque chose qui paraît super plate pour la majorité des ingénieurs : la gouvernance », ironise Alex Brisson. Plate comme une planche… de salut. 

D’abord, le comité de direction a fait appel à un groupe d’évaluation externe qui a rédigé un rapport de plus d’une cinquantaine de recommandations. « On a emmené des administrateurs externes, on a parlé avec un commissaire à l’éthique, on a mis différents comités de surveillance en place, on a créé des postes d’administrateurs indépendants dans le conseil d’administration, ainsi qu’un président qui venait de l’extérieur. La révolution était totale », se souvient le PDG. 

Les changements n’ont pas été célébrés par toute l’équipe et le patron a rencontré de l’incompréhension, parfois de l’hostilité. Des employés, des membres de l’équipe de direction, des administrateurs du CA sont partis. D’autres ont été mis à pied. « J’étais le méchant », dit Alex Brisson.

 

Une nouvelle identité

Une fois que les bases étaient installées, une nouvelle culture pouvait émerger. De nouvelles valeurs ont été choisies pour guider les actions de l’entreprise. De concert avec des employés issus de différents niveaux hiérarchiques, un grand remue-méninges a été lancé. Excellence, respect, innovation, confiance, adaptabilité et intégrité seraient désormais les principes fondateurs de Norda Stelo. 

Pour Jean-Philippe Couture, directeur de la stratégie et de l’excellence opérationnelle, le changement de gouvernance a eu des répercussions sur l’ensemble des relations de la firme. « Pour nous, ç’a changé nos façons de faire à l’interne, mais je considère également cette démarche-là comme fondatrice dans notre chemin vers la responsabilité sociétale. » L’entreprise réévalue de façon constante les six principes fondateurs pour s’assurer qu’ils sont toujours pertinents, souligne Jean-Philippe Couture. 

L’entreprise a repensé en profondeur son modèle d’affaires et s’est volontairement éloignée de plusieurs secteurs qui ne la représentaient plus. Elle a réorienté ses activités vers des « projets d’impact » qui s’intègrent dans la culture de saine gouvernance de Norda Stelo. Le nouveau mot d’ordre : la durabilité. « Le virage ESG [critères environnementaux, sociaux et de gouvernance] ç’a commencé pour nous par la gouvernance, dit Jean-Philippe Couture, mais à partir du moment où tu saisis que tu as le pouvoir d’apporter du sens à toutes les parties prenantes — pour le client, pour les employés, pour les partenaires —, tu prends conscience de ce que tu peux avoir comme impact au niveau social. »

La firme s’est ainsi spécialisée dans l’ingénierie « brownfield », une stratégie qui vise la revalorisation « des actifs manufacturiers, des installations, des bâtiments », explique Jean-Philippe Couture. « Le but est que ces actifs puissent durer dans le temps, et donc, limiter les ressources utilisées. » Une autre spécialisation, toujours axée sur la durabilité, a été approfondie, celle de l’identification et la mesure de l’impact social pour les communautés dans les projets d’ingénierie.

 

Un travail de tous les instants 

Appliquer les mécanismes d’évaluation, d’inspection et de reddition de compte relatifs à une saine gouvernance est un travail constant. « Il y a des suivis à faire et on parle à nos employés tous les jours, dit Alex Brisson. Les gestionnaires parlent aux équipes et ça remonte jusqu’à la direction. Tous les trimestres, on s’évalue. On a des suivis annuels avec le CA. On s’est donné un cadre très rigoureux. » 

Un cadre qui nécessite du temps et de la volonté, selon Alex Brisson. « C’est un travail de dix ans, ce n’est pas compliqué, il faut le prendre, ce temps-là. » Ce rigoureux appareil de surveillance interne permet d’éviter pour toujours que l’on retombe vers d’anciennes façons de faire, insiste Jean-Philippe Couture. 

Faut-il passer par le pire pour se rendre au meilleur ? Dans la tête d’Alex Brisson, cela ne fait aucun doute. « Si on n’avait pas traversé ce qu’on a traversé, on serait le même genre d’organisation d’ingénierie qu’auparavant, qui fonctionne de projet à projet, qui fait des devis, qui ne réfléchit pas trop à ses impacts sociaux, estime le PDG. Aujourd’hui, pour nous, le plus grand projet de notre organisation, c’est le projet Norda Stelo. »