Guy Cucumel, directeur du programme de MBA pour cadres de l’École des sciences de la gestion (ESG) de l’Université du Québec à Montréal. (Photo: Miguel Morelli)
FORMATION MBA POUR CADRES ET DIRIGEANTS. L’entrepreneuriat et la gestion peuvent-ils s’apprendre sur les bancs d’école ? Même si certains estiment que non, les universités font des pieds et des mains pour que leur programme de MBA conjugue théorie et pratique.
« Le danger, c’est que la carrière des enseignants se bâtit plus souvent sur la recherche que sur l’enseignement », fait valoir Guy Cucumel, directeur du programme de MBA pour cadres de l’École des sciences de la gestion (ESG) de l’Université du Québec à Montréal. « Mais il est important d’avoir un côté pratique à transmettre aux étudiants. » Selon lui, il faut donc faire attention de préserver un équilibre entre la théorie et son application.
C’est d’ailleurs pour cette raison que les étudiants au MBA de l’ESG sont invités à travailler sur des cas concrets. Mieux : comme les classes sont composées de gestionnaires en poste, les étudiants étudient des problématiques réelles que vivent leurs employeurs. « Ils agissent un peu comme des consultants, ce qui est très enrichissant non seulement pour eux, mais aussi pour les organisations qui ont accès aux recommandations des étudiants et de leurs professeurs », souligne M. Cucumel.
L’Université Laval a aussi adopté une philosophie de learning by doing (apprendre en faisant), explique Maripier Tremblay, professeure agrégée et responsable académique du programme de MBA en entrepreneuriat et gestion des PME. « Cette approche expérientielle permet de mettre les étudiants dans le bain, de tester leurs idées avec un filet de sécurité. » Des entreprises viennent par exemple en classe soumettre une problématique, puis les étudiants doivent leur recommander des solutions. Il leur faut composer avec les contraintes budgétaires des entreprises, rencontrer l’entrepreneur, lui proposer ses solutions, se montrer convaincant, composer avec les contraintes budgétaires, de temps ou même de ressources humaines, explique Mme Tremblay. Un exercice différent de ceux qu’ils retrouvent dans leurs manuels.
Les critères du travail de fin d’études leur permettent maintenant d’étudier les entreprises de plus petite taille. Ainsi, les étudiants peuvent se pencher sur leur projet d’entreprise ou de repreneuriat. C’est l’occasion d’étayer leur modèle d’affaires et leur stratégie pour ensuite obtenir les conseils de leurs enseignants, soutient Mme Tremblay. « Nous offrons également un cours sur la relève durant lequel les étudiants sont invités à s’asseoir avec leur parent et à poser des questions. » De cette manière, ils peuvent voir les choses différemment et surtout, aller chercher des outils concrets pour réussir cette transition.
Horizons multiples
À l’Université du Québec en Outaouais (UQO), les étudiants en fin de parcours travaillent avec un outil de simulation virtuelle d’entreprise qui leur permet de voir l’impact de leurs décisions en temps réel, explique Julie Bérubé, professeure en management et en entrepreneuriat et responsable du profil entrepreneuriat au MBA. « S’ils modifient la chaîne de production, ils peuvent par exemple voir quel impact ça aura sur le reste des fonctions de l’entreprise, illustre-t-elle. Cela leur permet de comprendre que l’organisation est un tout intégré et qu’on ne peut pas la gérer en silo. »
« Tout bouge tellement vite qu’on ne sait où on sera dans 5 ou 10 ans ; on ne sait même pas de quoi seront faits les emplois. L’enjeu pour nos diplômés sera de jongler avec des problèmes complexes, de savoir composer avec de l’incertitude et de l’ambiguïté », poursuit Maripier Tremblay. Les futurs diplômés doivent donc ouvrir leurs horizons pour s’adapter à ce contexte de changement. Les universités doivent également outiller les diplômés pour innover. C’est pourquoi il faut tisser des liens avec d’autres disciplines comme le génie ou le design, estime-t-elle.
En classe, il est possible de créer cette diversité synonyme d’ouverture en misant sur les travaux d’équipe et le partage d’expériences entre étudiants aux parcours académique et professionnel variés. « Beaucoup de nos étudiants qui gèrent une entreprise familiale apprécient avoir l’avis de leurs collègues qui ont une analyse différente d’eux », note M. Cucumel. Bref, « les cours deviennent un prétexte pour que les étudiants puissent avancer leur projet réel, conclut Mme Tremblay. [L’université] veut que ça colle à leur réalité, pour que leur formation leur soit vraiment utile. »