Benoit Tétreault: «Il ne faut pas avoir peur de l’automatisation»
Pierre Théroux|Édition de janvier 2020Pierre Cossette, Xavier Boilard et Benoit Tétreault (Photo: Sofia Villeneuve)
FOCUS RÉGIONAL ESTRIE. Un nombre grandissant d’organisations estriennes prennent le virage de la transformation numérique. Xavier Boilard, PDG d’Omnimed, Pierre Cossette, recteur de l’Université de Sherbrooke, et Benoit Tétreault, président de Waterville TG, ont fait part de leurs initiatives dans ce domaine lors d’une rencontre organisée par Les Affaires en novembre, qui a réuni à Sherbrooke une trentaine d’autres entrepreneurs, intervenants économiques et élus de la région.
Chez Waterville TG, une filiale du géant japonais Toyoda Gosei qui fabrique des systèmes d’étanchéité pour l’industrie automobile, la moitié des quelque 400 employés prendront leur retraite d’ici cinq ans. «Il était devenu urgent d’automatiser. À plus forte raison dans le contexte de pénurie de main-d’oeuvre», a affirmé M. Tétreault.
L’entreprise a donc amorcé sa transition vers l’usine 4.0 il y a deux ans, en achetant plusieurs robots pour automatiser davantage la production. «Nous en sommes au stade de travailler avec des robots collaboratifs», a indiqué le président. Les employés utilisent aussi une imprimante 3D qui permet le moulage de pièces en 72 heures au lieu des 8 semaines habituelles.
L’automne dernier, une trentaine de dirigeants d’autres usines du groupe japonais dans le monde se sont même déplacés afin de visiter leurs installations.
Une question de survie
Waterville TG s’affaire maintenant à numériser l’ensemble de ses activités. «On a une quantité phénoménale de données de production qu’il faut mieux valoriser , a souligné M. Tétreaut. Il ne faut pas avoir peur des robots et de l’automatisation. L’important, c’est de faire la transition un pas à la fois.» Il faut aussi mettre les employés dans le coup, a ajouté celui qui a rencontré les siens pour les informer du plan de développement de l’entreprise sur cinq ans. Il leur a alors expliqué que les travailleurs touchés seraient réaffectés. «Il y en a qui faisaient du travail manuel et qui sont maintenant à la supervision de la production», a-t-il illustré.
«C’est une transition qu’il faut faire en collaboration avec les employés», a renchéri Alan Kezber, PDG et fondateur de Kezber, qui offre des services informatiques et de développement d’applications à Magog.
Le défi d’Omnimed, qui développe des logiciels pour le secteur de la santé à Cookshire, est quant à lui de convaincre les médecins des cliniques de l’importance de s’informatiser. «La priorité de ce secteur, ce n’est pas la technologie, c’est de desservir le plus de patients possible. Les médecins ne sont pas prêts à mettre du temps pour numériser les données», constate son PDG.
Omnimed leur offre donc davantage que l’implantation du dossier médical électronique. «On leur propose d’améliorer les soins en utilisant les technologies de façon à assurer un meilleur suivi des patients et une collaboration entre tous les professionnels de la santé», a précisé M. Boilard.
Bon nombre d’entreprises ne sont pas encore prêtes à faire la transition numérique non plus, constate Martin Dufour, directeur général de Merkur, une firme de génie-conseil qui accompagne entre autres les entreprises industrielles dans le développement de l’ingénierie de systèmes et la gestion opérationnelle. «Elles ne doivent pas voir le 4.0 comme une fin en soi, mais comme une autre solution pour améliorer leur performance», croit-il.
À l’Université de Sherbrooke, «les technologies de l’information sont aujourd’hui notre plus important service», a révélé le recteur Pierre Cossette. L’institution a investi des millions de dollars ces dernières années dans des logiciels et des infrastructures de télécommunications pour améliorer, entre autres, la gestion de milliers de dossiers étudiants. «Il n’y a pas qu’une seule stratégie numérique, mais plusieurs stratégies distinctes pour s’assurer que les systèmes mis en place sont au service des utilisateurs», a-t-il souligné. Avant de préciser qu’il faut toutefois adopter une stratégie d’implantation par petits pas.
L’industrie touristique régionale doit elle aussi faire un virage numérique, estime Francine Patenaude, directrice générale de Tourisme Cantons-de-l’Est, car elle «se bat contre des géants comme Expedia et Booking.com, qui ont développé des plateformes très efficaces pour faciliter la vie des voyageurs».
Diane Nadeau est d’ailleurs arrivée au Spa Eastman il y a plus d’un an en tant que directrice marketing afin de participer à une restructuration des technologies destinée notamment «à revoir le site web et le système de réservation en ligne pour améliorer l’expérience client».