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Construction durable: deux chantiers pour s’inspirer

Emilie Laperrière|Édition de la mi‑mars 2024

Construction durable: deux chantiers pour s’inspirer

Le nouvel hôtel de ville de La Pêche, en Outaouais (Photo: courtoisie)

CONSTRUCTION. Les bâtiments durables et passifs ne sont pas légion au Québec. Ils constituent pourtant des réponses aux défis de demain, en atténuant les effets des changements climatiques tout en assurant le confort de leurs usagers. La preuve en deux exemples probants.

Les travailleurs s’activent sur le chantier du nouvel hôtel de ville de La Pêche, en Outaouais. La construction n’est pas comme les autres : l’édifice vise à respecter les normes rigoureuses de la certification Passivhaus. Il deviendra ainsi le premier bâtiment institutionnel certifié Passivhaus au Québec.

« Je pense qu’avec l’urgence climatique, on devrait tous faire le maximum possible. Cette norme est la plus exigeante et celle qui donne de loin les meilleurs résultats en matière d’efficacité », croit Dominique Laroche, architecte du projet chez BGLA.

Trois principaux éléments expliquent cette haute performance énergétique, selon le concepteur. « Les cibles d’étanchéité à l’air sont beaucoup plus strictes que dans un bâtiment traditionnel et elles sont testées à plus d’une reprise, ce qui n’est pas le cas des autres certifications », commence Dominique Laroche. Le bâtiment est également beaucoup plus isolé que d’habitude. L’orientation des ouvertures est aussi réfléchie.

« On a une longue façade orientée directement au sud, avec de grandes fenêtres qui vont capter la chaleur en hiver. Ça constitue d’ailleurs la principale source de chauffage. »

 

Des économies remarquables

Cette conception bien pensée permettra d’ailleurs des économies impressionnantes de chauffage et de climatisation. « Avec le code de l’énergie actuel, on parle de 65 % d’économie d’énergie », se réjouit Dominique Laroche, qui estime que tous les bâtiments devraient suivre le mouvement.

Le bois est à l’honneur tant à l’intérieur qu’à l’extérieur. « Même l’isolant se compose de panneaux de fibres de bois et de cellulose injectée, qui est grosso modo du papier journal recyclé. »

La structure du toit en dents de scie, qui rappelle les ponts couverts de la région, est une première en Amérique du Nord. « Avec les ingénieurs, on voulait pousser les possibilités des panneaux de bois massif lamellé-croisé, appelé aussi CLT », raconte Dominique Laroche.

Un peu comme le béton armé — mais sans ses effets sur l’environnement —, ce matériau offre une grande portée et peut être utilisé comme des poutres. Le deuxième étage, sans aucune colonne, permet de dégager la vue sur les collines tout en baignant les lieux de lumière naturelle.

 

Une construction qui passe l’épreuve du temps

Premier bâtiment certifié LEED Platine nouvelle construction au Québec, la Maison du développement durable (MDD) demeure une inspiration. Près de 13 ans après son inauguration, l’édifice n’a pas pris une ride.

« La performance énergétique est encore exemplaire, remarque son directeur général par intérim, Jean-Philippe Renaut. Plusieurs technologies qui ont été pensées pour le bâtiment sont encore aujourd’hui extrêmement innovatrices. »

La MDD servant de laboratoire en matière de technologies durables, certains paris ont été moins chanceux que d’autres. « On a par exemple misé sur une sorte d’éclairage qui n’a pas percé le marché. Chaque ampoule à remplacer coûte environ 300 $. On aurait dû opter pour des ampoules à DEL. »

Un bâtiment aussi innovant vient avec des systèmes complexes, qui ne rajeunissent pas. L’entretien cause donc parfois des maux de tête aux gestionnaires. « On a eu une panne Internet récemment. J’ai alors appris que la machinerie centrale est dans le nuage. Quand il y a eu un problème, tout s’est mis en veille, incluant le chauffage », illustre Jean-Philippe Renaut.

 

Des succès à souligner

N’empêche, les trois principales caractéristiques environnementales du bâtiment, soit le recyclage de l’eau, la géothermie et le mur végétal, sont des succès retentissants.

Ce dernier est toutefois fragile. « Il faut lui faire attention, convient Jean-Philippe Renaut. On a appris au fil des ans à l’entretenir. » Ce mur actif humidifie l’air, ce qui fait que l’humidificateur du bâtiment n’a jamais servi. En été, il rafraîchit aussi un peu les lieux.

Selon le directeur général, l’efficacité énergétique promise à la conception est au rendez-vous. « On n’est pas tout à fait dans les normes Passivhaus, mais on est encore dans les bâtiments les plus efficaces à Montréal. La géothermie fonctionne à merveille. Le souci du détail porté à l’isolation porte encore ses fruits. On ne chauffe que 60 jours par an. »

Jean-Philippe Renaut souligne en outre que la popularité de la MDD ne se dément pas. « Les tours de bureaux du centre-ville sont vides à près de 50 % depuis la pandémie, mais la MDD est tout le temps pleine. On a des listes d’attente pour des espaces de travail. » Il croit que ce succès tient à la qualité de vie et au confort offerts aux locataires.