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Dow Jones: reprise intéressante, mais le doute persiste

Jean Gagnon|Édition de la mi‑septembre 2022

Dow Jones: reprise intéressante, mais le doute persiste

(Photo: 123RF)

La BOUSSOLE BOURSIÈRE est une rubrique qui traite d’un événement marquant et de son effet sur le marché boursier en s’appuyant sur l’analyse d’experts. Cette analyse pourra être autant fondamentale que technique.


(Illustration: Camille Charbonneau)


Les investisseurs ont eu à faire face, de janvier à juin, à un recul important des marchés boursiers, le premier depuis la chute rapide qu’avait occasionnée l’arrivée de la COVID-19 il y a plus de deux ans.

Lors de cet épisode, en 2020, autant la chute avait été brutale, autant une remontée s’était amorcée rapidement, et les marchés avaient tout repris en l’espace d’à peine six mois. La situation actuelle semble toutefois très différente.

En 2020, l’indice Dow Jones avait mis à peine un mois pour perdre plus de 30 %. Cette fois-ci, il a fallu près de six mois à l’indice pour subir un recul d’environ 20 %. Alors qu’en 2020, la crainte que la pandémie n’entraîne une récession à l’échelle mondiale avait fait chuter le marché en ligne droite sans réelle tentative de reprise, cette année, l’indice a tenté une poussée à la hausse intéressante en mars, mais elle fut éphémère, et le marché a replongé encore plus rapidement pour atteindre un creux en juin.

Un certain optimisme s’est alors emparé des marchés boursiers en juillet lorsque l’idée que la hausse du taux d’inflation avait peut-être atteint son sommet et qu’une baisse de l’indice des prix à la consommation allait maintenant s’amorcer. Depuis ce temps, l’indice Dow Jones a amorcé un nouveau mouvement à la hausse qui l’a ramené au-dessus de 34 000 points. Mais pour certains, l’indice aurait alors atteint son sommet.

C’est ce croit Dennis Mark, analyste technique à la Financière Banque Nationale. Il constate que le rallye de l’indice Dow Jones s’est arrêté durant la troisième semaine du mois d’août lorsqu’il a atteint sa moyenne mobile de 200 jours. Celle-ci est le reflet de la tendance à moyen terme, et tant que le niveau de l’indice demeure en deçà de cette moyenne, la tendance se veut négative.

 

Les taux d’intérêt et l’inflation

Pour Jean-Paul Giacometti, vice-président, gestionnaire de portefeuille à Claret, la grande question demeure liée aux taux d’intérêt. Que feront-ils ? Ils affectent directement les évaluations boursières. Plus les taux d’intérêt sont élevés, plus basse est la valeur intrinsèque des titres boursiers. «Les Bourses s’écrasent lorsque les taux d’intérêt sont très élevés», dit-il.

Les banques centrales ont augmenté de façon significative leurs taux directeurs depuis l’automne dernier, l’inflation devenant un problème majeur évident. À la suite de ces hausses de taux, les risques de récession deviennent évidemment plus grands.

Le gestionnaire de portefeuille croit que ce n’est pas avant six mois que nous serons fixés sur ce qui nous attend au chapitre de l’inflation. Il reconnaît que les banques centrales pourraient être tentées de mettre fin dès que possible au cycle de hausses des taux d’intérêt. Mais ce serait une erreur selon lui, car cela relancerait l’inflation.

Que faire alors de son portefeuille ? De tout temps, les marchés ont eu à traverser des tempêtes, explique le gestionnaire. Parfois, elles sont plus longues. «Pour l’investisseur, ce n’est pas une partie à court terme, il faut y mettre le temps. Si vous n’avez pas ce temps, ne vous aventurez pas trop sur le marché boursier pour le moment», suggère-t-il.

 

Une affaire de multiples et de marges

La chute des marchés entre janvier et juin a fait en sorte que les titres boursiers étaient revenus à des niveaux beaucoup plus raisonnables en fonction des multiples d’évaluation, comme le ratio cours/bénéfice, explique Philippe Hynes, président et gestionnaire de portefeuilles à Tonus Capital.

Conjugué aux espoirs que l’inflation avait potentiellement atteint son sommet, cela fut suffisant pour attirer les investisseurs avides de profiter d’une reprise des marchés, ce qui a eu comme effet de gonfler à nouveau les évaluations. «Le marché est déjà beaucoup moins excitant qu’il y a deux mois», dit le gestionnaire.

Il faudra maintenant surveiller les bénéfices de près, selon lui. À cause de l’inflation, les attentes sont plus élevées, car les entreprises ont bien réussi pour la plupart à repasser les hausses de prix à leurs clients. «On se questionne à présent à savoir si elles pourront continuer de le faire et, surtout, à quoi ressembleront leurs marges bénéficiaires durant les prochains trimestres», ajoute Philippe Hynes.

Rien n’est certain de ce côté, selon lui. L’inflation ne devrait pas retomber de sitôt à 1 % ou à 2 %, comme le souhaiteraient les banques centrales. Si elle demeure à 5 % ou à 6 %, les taux d’intérêt demeureront élevés, ce qui aura comme conséquence d’étouffer l’économie.