ANALYSE. Pour Alimentation Couche-Tard (ATD.B, 84,74 $), satisfaire ses actionnaires trimestre après trimestre ...
ANALYSE. Pour Alimentation Couche-Tard (ATD.B, 84,74 $), satisfaire ses actionnaires trimestre après trimestre représente tout un défi. On ne lui accorde pas de répit. Il faut dire qu’avec les années, le réseau de dépanneurs a entretenu les attentes. L’entreprise a récemment présenté ses résultats trimestriels, les trois premiers mois de l’exercice 2020, et la hausse de 11,5 % du bénéfice ajusté, porté à 0,97 $ US par action, n’a su impressionner les analystes qui ont pointé la modération des ventes par dépanneur comparable. L’action est restée de glace la semaine dernière.
Ces ventes ont crû de 0,3 % à 2,5 % dans ses trois marchés, par rapport au rythme exceptionnel de 4 % à 7 % l’an dernier.
De surcroît, une grande part de l’amélioration du bénéfice provient de marges élevées sur l’essence à la pompe aux États-Unis, indique Keith Howlett, de Desjardins Marché des capitaux.
Encore une fois, les attentes à court terme propres à la Bourse jettent de l’ombre sur les perspectives fondamentales d’une entreprise championne du long terme.
Patricia Baker, de la Banque Scotia, ne craint pas un nouveau passage à vide en Bourse, comme ce fut le cas entre 2015 et 2018.
Toutefois, après l’envolée de 24 % depuis le début de l’année, une pause serait tout à fait naturelle jusqu’à ce que les prochains résultats rassurent ceux qui craignent qu’Alimentation Couche-Tard perde son élan après la relance de l’an dernier. L’évaluation du titre est aussi passée de 14 à plus de 18 fois les bénéfices prévus depuis 13 mois, une marque que l’entreprise doit mériter.
Les prochains trimestres diront à quel point le printemps froid en Europe et au Canada a temporairement nui aux ventes de sloches, de breuvages froids et de friandises glacées.
Les investisseurs suivront de plus près l’efficacité de la mise en marché sur les ventes comparables. La société doit trouver le juste équilibre entre la croissance et les marges au moment où elle peut difficilement répéter le rebond de 2019, explique Irene Nattel, de RBC Marchés des Capitaux.
Les ventes par dépanneur comparable devront accélérer de nouveau pour que les analystes relèvent leurs prévisions de bénéfices, dit-elle.
Couche-Tard a aussi promis de doubler son bénéfice d’exploitation d’ici cinq ans en s’appuyant également sur la croissance interne et les acquisitions, au lieu de la stratégie antérieure qui s’appuyait à 70 % sur les achats.
La croissance interne retient donc plus d’attention parce que le marché transactionnel est plus compétitif qu’avant, signale M. Howlett.
Les bons coups
L’exploitant de quelque 12 500 dépanneurs a une fois de plus démontré un bon contrôle des coûts, malgré d’importants investissements numériques.
Couche-Tard ajoute notamment le paiement mobile au programme de fidélisation Easy Pay et étend à plus de marchés la plateforme numérique Lift qui vise à stimuler les achats impulsifs en magasin.
Les frais généraux en proportion des revenus ont crû de seulement 1,7 % au premier trimestre, abstraction faite des dépenses pour la conversion de stations Esso au Canada, précise Baker.
L’optimisation des coûts demeurera une priorité dans les prochains trimestres, a assuré le chef de la direction financière Claude Tessier, par voie de communiqué.
Rien à redire non plus au sujet de la gestion du capital. Les flux de trésorerie libres ont financé le remboursement d’une dette de 300 millions de dollars américains et le rachat de 91,3 M $ de ses actions depuis le début de l’exercice actuel.
Le rachat d’actions et la diminution des frais financiers feront sans doute dire à certains que la croissance des bénéfices n’est pas de la plus haute qualité, mais ces deux pratiques témoignent d’une saine répartition du capital, en attendant de voir apparaître une nouvelle cible d’acquisition. M. Tessier a d’ailleurs mis en relief la hausse de 0,60 point de base du rendement du capital investi à 13,2 %.
L’achat de Holiday Stationstores, une chaîne du Midwest réputée pour ses bonnes pratiques d’affaires, n’a pas porté tous ses fruits non plus.
«Nous incorporons de 30 à 40 (de leurs pratiques) à notre réseau», a indiqué Brian Hannasch, le PDG pendant la téléconférence trimestrielle.
Le dirigeant a donné en exemple l’abonnement au service de lave-auto, la reconfiguration des magasins pour susciter l’achat impulsif et augmenter la facture moyenne, le programme de promotion en magasin, les politiques de prix, l’offre élargie d’aliments et le système d’optimisation de l’horaire des employés.
«Le système d’horaire sera implanté au troisième trimestre partout en Amérique du Nord. Nous ne dévoilons pas les économies annuelles, mais chaque projet doit procurer un rendement financier minimal», a ajouté le grand patron. M. Hannasch a d’ailleurs promu le vice-président de Holiday, Rick Johnson, à la vice-présidence de l’exploitation aux États-Unis.
Malgré des actionnaires exigeants dont les attentes ne diminuent pas trimestre après trimestre, Alimentation Couche-Tard continue de se concentrer sur se propres repères financiers. Ça ne met pas l’entreprise à l’abri des soubresauts de parcours, mais, à long terme, la stratégie reste le meilleur gage d’enrichissement.