Impacteur en chef

Offert par Les Affaires


Édition du 03 Décembre 2016

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Édition du 03 Décembre 2016

Prophète sénior, catalyseur principal, créateur d'occasions... Certains titres d'emploi, souvent autoproclamés, sont plutôt amusants. Mais ils sont parfois aussi symptomatiques de tendances profondes. C'est le cas du chief impact officer, ou «directeur de l'impact».

Ce titre tente de percer en anglais depuis plusieurs années, et à lire le reportage de notre chroniqueur Diane Bérard cette semaine, on peut s'attendre à le voir se répandre.

Plus fort que le développement durable, plus puissant même que la responsabilité sociale, on parle maintenant de l'impact, la dimension ultime de l'entreprise citoyenne.

Je n'ai pas trouvé de «chef de l'impact» dans les entreprises d'ici (il faut dire que l'équipe de soccer montréalaise complique la recherche !), mais plusieurs chief impact officer (CIO) aux États-Unis. Par exemple, un tel poste est actuellement ouvert chez Teach For America, une association pour l'égalité des chances en matière d'éducation dans la région de San Francisco. Sa mission : «aligner les équipes sur une vision, une stratégie et une exécution transformatrices». À Pittsburgh, une banque alimentaire recrute son CIO. Là aussi, le rôle n'est pas satellite, mais a pour vocation de faire converger toute l'organisation vers la même direction. Il chapeaute le directeur des partenariats, la nutritionniste, le directeur des relations gouvernementales et tout développement de nouveaux programmes. United Way, l'équivalent en anglais de Centraide, vient de recruter un CIO en Caroline du Nord, pour qu'il «contribue, à titre de haut dirigeant, à fournir un leadership unifié dans l'organisation». (À noter que Centraide du Grand Montréal lançait il y a un an son Projet impact collectif.)

Ces cas sont en phase avec le phénomène que Diane décrit, mais force est de constater qu'ils se limitent encore à des OBNL. Si de tels postes existent dans des entreprises privées, ils sont bien cachés.

Dommage, car une entreprise qui cherche à avoir un impact peut être la première à en bénéficier, notamment parce que ça l'aide à mobiliser ses employés. «Il n'y a rien de plus choquant pour une personne que de travailler sans savoir quelle est son utilité. Trouver un sens à son travail, c'est fondamentalement humain, m'a expliqué Estelle Morin, professeure titulaire au Département de management de HEC Montréal. D'ailleurs, on parle beaucoup d'efficacité. Or, l'étymologie du mot efficacité, c'est faire un effet [en latin, effectus signifie même "accompli"].» Alors que nous abordons cette année un creux démographique qui durera 10 ans, c'est bon à savoir. «Quand une personne a une solution de rechange et qu'elle voit que ce qu'elle fait n'a pas d'utilité, qu'elle est plafonnée ou qu'elle n'apprend plus, eh bien elle s'en va», dit Mme Morin.

Alors, êtes-vous prêt à créer un poste de directeur de l'impact ?

Julie Cailliau 
Rédactrice en chef
julie.cailliau@tc.tc

Suivez Julie Cailliau sur Twitter @julie140c

À propos de ce blogue

Julie Cailliau est éditrice adjointe et rédactrice en chef du Groupe Les Affaires, dont l’équipe de journalistes chevronnés publie le journal Les Affaires, le site lesaffaires.com et le magazine Les Affaires Plus. Elle est également présidente du conseil d’administration de la Fondation des prix pour les médias canadiens. Diplômée de l’École supérieure de journalisme de Lille, en France, Julie a pratiqué le métier de journaliste au sein de plusieurs publications françaises et québécoises. Dans une vie précédente, elle a œuvré à titre d’ingénieure en biotechnologies. Son « why », c’est d’apprendre et d’informer afin de nous permettre de faire les bons choix. La prise de conscience de l’urgence environnementale et l’émergence de l’entrepreneuriat social comptent pour elle parmi les tendances les plus réjouissantes actuellement.