C'est d'un bon gouvernement dont on a besoin, pas d'un mirage


Édition du 08 Septembre 2018

C'est d'un bon gouvernement dont on a besoin, pas d'un mirage


Édition du 08 Septembre 2018

Les altercations n’intéressent pas les électeurs, qui jugent les candidats et surtout les chefs de partis sur l’impression générale qu’ils dégagent en matière d’authenticité, de crédibilité et d’intégrité. [Photo: 123RF]

La présente campagne électorale n'y échappe pas. Les partis politiques rivalisent d'imagination pour séduire les électeurs par une avalanche de promesses, engageant de l'argent qui n'est pas le leur.

C'est un phénomène que toutes les démocraties subissent, mais celui-ci a des effets pervers dont devraient se soucier davantage les leaders et les stratèges des formations qui veulent former le prochain gouvernement. Ne faudrait-il pas imposer un plafond aux engagements financiers que prennent les partis au cours de cette période de surenchère et de prodigalité ?

Les conséquences économiques les plus importantes de cette pluie de promesses sont les coûts souvent élevés qui en résultent, leur impact sur l'effort fiscal des contribuables, l'endettement de l'État et sa compétitivité à l'échelle internationale. Un État trop lourd affaiblit sa capacité concurrentielle.

Sur un plan politique, cette giboulée d'engagements, qui sont parfois plus ou moins réalistes, crée des attentes susceptibles de décevoir les électeurs et d'accroître leur cynisme à l'égard de la classe politique. Alors que les électeurs les plus éclairés considèrent qu'on les prend pour des valises, d'autres sont incités à donner leur vote au parti qui leur en promet le plus à court terme. C'est normal, certes, mais c'est malsain.

Qu'attend-on d'un bon gouvernement ?

On attend des dirigeants politiques qu'on élit qu'ils aient une vision nette de l'avenir proposé au peuple qu'ils entendent diriger. Cet avenir doit être ambitieux, mais également réaliste. Or, les visions proposées ne sont pas toujours des modèles de clarté.

De la même manière qu'on le demande aux dirigeants des sociétés privées et des organismes publics, on attend aussi de nos dirigeants politiques qu'ils aient des valeurs auxquelles ils adhèrent réellement et qui se révélent par leur parcours professionnel et leur comportement personnel. Aucune concession ne doit être faite à ce sujet, puisqu'il en va de la crédibilité de leur parti et de l'équipe qui sera appelée à exercer le pouvoir. On a vu que certains n'étaient pas sans reproche à cet égard.

Compte tenu de leurs responsabilités particulières, les dirigeants politiques ne peuvent négliger les valeurs suivantes : l'intégrité, l'humilité, le respect des personnes et des engagements, l'empathie, la compassion envers les défavorisés, la civilité, la transparence, le sens moral. On les veut motivés par le sens de l'État, l'intégrité des institutions et l'intérêt général, plutôt que par la poursuite de leurs propres intérêts.

Les missions de l'État

Un bon gouvernement consacre la totalité de son énergie aux grandes missions de l'État : la protection et la sécurité des citoyens (santé, justice, droits et libertés), l'éducation des jeunes, l'égalité des chances, la justice sociale, la défense de l'État, la promotion de la démocratie, le développement ordonné de l'économie, la protection de l'environnement, la saine gestion des finances publiques et le maintien d'infrastructures dignes d'un pays développé.

Naturellement, l'exécution de ces missions exige de l'intelligence, du jugement, de l'indépendance par rapport aux lobbies de toutes sortes et même du renoncement quant à ses propres intérêts. Il en résulte nécessairement des arbitrages difficiles à faire, qui ne peuvent être menés à bien que si les dirigeants politiques ont acquis, par leurs actions passées, de la crédibilité auprès de leurs commettants. C'est le capital de confiance gagné au fil des décisions qui leur permet de conserver l'appui des citoyens.

La campagne en cours

Les partis promettent d'excellentes mesures, notamment pour l'éducation des jeunes, les familles et les aînés. Or, ces promesses paraissaient déjà trop nombreuses au moment d'écrire ce texte. Il s'en est sûrement ajouté depuis et il en sera encore de même pendant encore plusieurs jours, notamment pour la santé, l'enseignement supérieur et les transports.

Certains engagements sont très ambitieux : uniformisation de la taxe scolaire par la CAQ (700 M$), gratuité scolaire à l'université ainsi qu'accroissement d'impôts, de taxes et d'économies (12,9 milliards de dollars pour la seule année 2022-2023) par Québec Solidaire, une estimation qualifiée de « tentative comptable ».

Les invectives personnelles et les insinuations malveillantes sont aussi au rendez-vous, ce qui ne valorise pas leurs auteurs. Aucun doute que la campagne continuera d'être très âpre, l'enjeu de la souveraineté étant disparue.

Ces altercations n'intéressent pas les électeurs, qui jugent les candidats et surtout les chefs de parti davantage sur l'impression générale qu'ils dégagent en matière d'authenticité, de crédibilité et d'intégrité que sur les plateformes électorales. D'ailleurs, ce sont probablement ces facteurs, non quantitatifs, qui risquent le plus de compter dans le choix des 40 % d'indécis selon les derniers sondages.

 

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À propos de ce blogue

Tour à tour rédacteur en chef et éditeur du journal Les Affaires pendant quelque 25 ans, Jean-Paul Gagné en est l’éditeur émérite depuis 2007. En plus de publier un commentaire hebdomadaire dans le journal et de tenir un blogue dans LesAffaires.com, il participe à l’organisation d’événements et représente le journal dans les milieux d’affaires. Il est aussi appelé à commenter l’actualité dans d’autres médias et à prononcer des conférences. Jean-Paul Gagné a consacré sa vie professionnelle au journalisme économique. Avant son entrée aux journal Les Affaires, qu’il a contribué à relancer pour en faire la principale publication économique du Québec, il a passé une douzaine d’années au quotidien Le Soleil, où il était journaliste économique et cadre à la rédaction. Jean-Paul Gagné est diplômé en économie et en administration. Il a reçu de nombreuses marques de reconnaissance, dont les prix Hermès et Gloire de l’Escolle de l’Université Laval, le prix Carrière en journalisme économique de la Caisse de dépôt et placement et Merrill Lynch et le Prix du livre d’affaires remis par Coop HEC Montréal et PricewaterhouseCoopers. Il siège au conseil d’administration d’organismes sans but lucratif.

Jean-Paul Gagné

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