Crédit carbone: le fédéral signe un premier contrat avec Entropy

Publié le 20/12/2023 à 13:03, mis à jour le 20/12/2023 à 17:57

Crédit carbone: le fédéral signe un premier contrat avec Entropy

Publié le 20/12/2023 à 13:03, mis à jour le 20/12/2023 à 17:57

Par La Presse Canadienne

Le gouvernement fédéral avait promis d’introduire un cadre pour les contrats sur différence pour le carbone afin de donner une visibilité aux entreprises qui envisagent de réaliser des investissements en technologies de réduction des émissions. (Photo: La Presse Canadienne)

Calgary — Une entreprise albertaine spécialisée dans le captage du carbone a signé un accord d’écoulement de crédits carbone avec le gouvernement fédéral, le premier du genre. L’industrie croit que cet exemple pourrait encourager le secteur privé à investir dans des projets de décarbonation.

Le gouvernement a annoncé, mercredi, avoir signé un premier contrat avec Entropy, qui a développé une technologie modulaire de captage, d’utilisation et de stockage du carbone.

En vertu de l’entente, le Fonds de croissance du Canada investit directement 200 millions de dollars (M$) dans Entropy et lui fournira un cadre d’écoulement de crédits carbone à long terme.

Le Fonds de croissance du Canada a accepté d’acheter jusqu’à 185 000 tonnes de crédits de carbone auprès d’Entropy pour une durée de 15 ans à un prix initial de 86,50$ la tonne.

Le gouvernement libéral fédéral avait promis, dans son récent énoncé économique de l’automne, d’introduire un cadre pour les contrats sur différence pour le carbone afin de donner une visibilité aux entreprises qui envisagent de réaliser des investissements en technologies de réduction des émissions.

Les contrats sur différence pour le carbone réduisent le risque pour les entreprises qui investissent dans des technologies propres, en garantissant un seuil de prix du carbone pour une période déterminée.

Autrement dit, si le prix fédéral du carbone est renversé par un futur gouvernement ou n’augmente pas comme prévu, la mise en place d’un contrat pour la différence donne aux entreprises l’assurance que leurs investissements coûteux dans les technologies de décarbonation en vaudront toujours la peine.

«Lorsque vous avez un projet qui coûte des centaines deM$, il faut environ une décennie pour le rentabiliser, souligne le président et chef de la direction d’Entropy, Mike Belenkie, en entrevue. La taxe carbone n’est donc pas un instrument approprié pour encourager cet investissement.»

Il ajoute que la mise en place de contrats sur différence pour le carbone signifie qu’Entropy n’a plus à faire son pari de décarbonation uniquement en partant du principe que le prix fédéral du carbone continuera d’augmenter.

L’annonce de mercredi élimine suffisamment de risque d’investissement pour qu’Entropy puisse aller de l’avant avec sa proposition d’une deuxième phase de 49M$ pour son projet de captage et de stockage du carbone aux installations de Glacier d’Advantage Energy en Alberta, souligne-t-il.

«Pour nous, c’est la solution parfaite, réagit M. Belenkie. Nous avons une garantie de prélèvement de 15 ans… c’est plus que suffisant pour que nous sachions que, pour le service que nous fournissons, nous pourrons récupérer notre investissement.»

De nombreux groupes environnementaux ont avancé que ce type d’accord était, depuis longtemps, la pièce manquante qui permettrait d’encourager les investissements du secteur privé dans la décarbonisation.

Michael Bernstein, le directeur général de Clean Prosperity, estime que le concept est particulièrement important pour le captage du carbone, car il complète un crédit d’impôt à l’investissement déjà annoncé.

«Il n’y a pas de revenus directs issus du captage du carbone pour beaucoup de ces entreprises, explique-t-il en entrevue. En fin de compte, il faut tenir compte de la rentabilité.»

«Ces entreprises doivent savoir que, si elles investissent des centaines de millions de dollars de leur propre capital, il y a une rationalité économique à cela.»

M. Bernstein croit que, même si l’annonce de mercredi était potentiellement extrêmement importante, elle ne conduirait pas immédiatement à une vague de confirmations d’investissements. Le premier contrat est spécifique à Entropy, et M. Bernstein estime qu’il faudrait une version plus standardisée d’un contrat, qui serait largement applicable à d’autres entreprises.

«Nous avons vraiment encouragé le Fonds de croissance à adopter une approche plus systématique […] afin que les entreprises sachent dès le début ce qu’elles pourraient recevoir», raconte-t-il.

L’Alliance Nouvelles voies, un groupe comprenant les plus grandes sociétés d’exploitation canadienne de sables bitumineux, milite pour l’adoption de contrats sur différence pour le carbone. L’Alliance propose de construire un réseau de captage et de stockage du carbone de près de 16,5 milliards $ dans le nord de l’Alberta.

Le groupe ne s’est pas encore formellement engagé à lancer le projet.

Le porte-parole de l’Alliance Nouvelles voies, Mark Cameron, a répondu que l’organisation travaillait avec le gouvernement fédéral pour explorer la manière dont les contrats carbones pour la différence pouvaient être applicables à des projets à grande échelle comme celui proposé par son organisation.

«Il est encourageant de voir Ottawa agir pour contribuer à la nécessité de réduire les risques liés aux investissements dans les projets de réduction des émissions, grâce à des outils tels que les contrats sur différence pour le carbone», déclare M. Cameron.

«Nous applaudissons l’annonce d’aujourd’hui», ajoute-t-il.

Amanda Stephenson, La Presse Canadienne

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