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Qatar: des travailleurs dénoncent le non-paiement des salaires

AFP|Publié le 01 novembre 2022

Qatar: des travailleurs dénoncent le non-paiement des salaires

Le nombre de plaintes a «plus que doublé», atteignant 34 425 entre octobre 2021 et octobre 2022. (Photo: 123RF)

Doha — Le non-paiement des salaires constitue la «principale plainte» des travailleurs migrants auprès du ministère qatari du Travail, selon deux rapports de l’Organisation internationale du travail (OIT) mardi, à 19 jours du Mondial de football dans ce riche émirat du Golfe.

Le nombre de plaintes a «plus que doublé» (atteignant 34 425 entre octobre 2021 et octobre 2022) grâce au lancement d’une plateforme de dépôt en ligne l’an dernier, selon ces rapports qui exhortent le Qatar à «continuer à œuvrer pour le plein respect des normes internationales du travail».

«Les principales causes des plaintes concernent le non-paiement des salaires et des indemnités de fin de contrat, et les congés annuels non accordés ou payés», indique l’OIT, qui ajoute que 66,5% de ces plaintes ont été réglées à l’amiable et 30,7% devant la justice. Dans 84% des cas, «le juge a donné raison au travailleur».

Lire aussi: Mondial-2022: aller ou pas au Qatar? L’onéreux dilemme des commanditaires.

 

«Jusqu’en juillet 2022, 582 400 000 riyals qataris [environ 160 millions d’euros] avaient été versés [pour indemniser] plus de 37 000 travailleurs», ajoute l’agence spécialisée de l’ONU. «Ce montant est passé à 1 165 316 181 riyals [plus de 320 millions d’euros] au 30 septembre 2022. Cela démontre l’ampleur du problème des salaires impayés», aggravé par la crise du coronavirus, estime-t-elle.

Après avoir obtenu en 2010 l’organisation du Mondial-2022 (20 novembre-18 décembre), le Qatar a été régulièrement critiqué par des syndicats internationaux et des ONG pour ses manquements aux droits humains, notamment ceux des travailleurs migrants venus d’Asie et d’Afrique dans les secteurs de la construction, de la sécurité, de l’hôtellerie et du travail domestique.

 

«Impact positif»

Entre 2018 et 2020, l’émirat a entrepris des réformes qui ont eu «un impact positif» selon 86% des 1 036 travailleurs migrants sondés en mai et juin 2022 dans le cadre des rapports de l’OIT.

L’introduction en mars 2021 d’un salaire minimum a touché «plus de 280 000 travailleurs, soit environ 13% de la main-d’œuvre totale du secteur privé», selon l’OIT.

En août 2022, 67 128 entreprises étaient enregistrées dans le Système de protection des salaires mis en place en 2015 et 913 étaient en violation des règles, risquant des sanctions.

Ces rapports montrent aussi que le nombre de travailleurs soignés pour des problèmes liés à la chaleur a baissé depuis de nouvelles règles en 2021. Mais ils n’évoquent pas le nombre de morts dans des accidents du travail, que l’OIT avait évalué à 50 en 2020.

Des ONG accusent le Qatar de sous-estimer le nombre de décès sur les chantiers liés à la Coupe du monde et demandent que l’instance dirigeante du foot, la FIFA, mette en place un fonds d’indemnisation des travailleurs. 

Le pays «a montré sa détermination à faire avancer son programme de réforme», estime pour sa part l’OIT, saisie en 2014 d’une plainte de syndicats internationaux contre le Qatar et installée dans le pays depuis 2018.

Mais «il est universellement reconnu qu’il reste des défis dans sa mise en œuvre, ce qui n’est pas surprenant compte tenu de l’ampleur et du rythme des réformes entreprises», poursuit l’agence onusienne.

 

Visite allemande

Parmi les priorités, «les mécanismes permettant aux travailleurs de porter plainte et de récupérer leur salaire doivent être renforcés», indique-t-elle.

Elle pointe aussi «la nécessité de veiller à ce que tous […] puissent bénéficier des lois sur la mobilité de la main-d’œuvre», alors que plus de 348 450 personnes ont pu changer de travail entre le 1er novembre 2020 et le 31 août 2022, ce qui n’était auparavant pas possible sans autorisation de la part de l’employeur.

«Les droits des travailleurs domestiques doivent être mieux protégés», conclut l’OIT.

Alors que des ONG s’inquiètent de l’abandon des réformes après le Mondial, le gouvernement qatari souhaite «que l’OIT établisse une présence plus permanente à Doha» après 2023, est-il précisé dans ces rapports.

Leur publication intervient alors que la ministre allemande de l’Intérieur, également chargée des Sports, Nancy Faeser, et le président de la Fédération allemande de football, Bernd Neuendorf, sont en visite dans l’émirat.

Après avoir critiqué l’attribution du tournoi au Qatar la semaine passée, provoquant une tempête diplomatique entre Berlin et Doha, Nancy Faeser a annoncé mardi qu’elle sera de retour «pour le premier match de l’Allemagne», le 23 novembre, car «il est important de soutenir le Qatar dans ses réformes capitales pour l’avenir».