«J'manque de bras!» Attendez avant de vider votre portefeuille!

Publié le 14/01/2022 à 18:00

«J'manque de bras!» Attendez avant de vider votre portefeuille!

Publié le 14/01/2022 à 18:00

Par Catherine Charron

Eric Collard, directeur marketing et responsable de la marque employeur pour Flexpipe, et Frederic Kieffer, vice-président chez pour Raymond Chabot Ressources Humaines, filiale de Raymond Chabot Grant Thornton (Photos: courtoisie)

À chaque épisode de la balado Se tirer d’affaires, Les Affaires répond en moins de 10 minutes à de vraies questions que se posent des dirigeant.e.s de PME québécoises.

BALADO SE TIRER D’AFFAIRES. S’il y a bien un enjeu qui affecte tout le Québec inc, c’est la pénurie de main-d’oeuvre.

Au deuxième trimestre de 2021, 194 195 postes étaient à combler selon un recensement de Statistique Canada. Cette pénurie dans certains secteurs freine la croissance de nombreuses PME. C’est le cas de Flexpipe, une entreprise manufacturière de la Montérégie. Son directeur marketing et responsable de la marque employeur, Eric Collard, se demande : comment puis-je attirer les employés sans uniquement passer par les augmentations salariales?

Nous avons demandé conseil auprès d’un expert en la matière. Frederic Kieffer, vice-président en recrutement pour Raymond Chabot Ressources Humaines, une filiale de Raymond Chabot Grant Thornton. Il nous explique comment les PME peuvent tirer leur épingle du jeu, en identifiant et attirant les bons candidats sans avoir à vider leur porte-monnaie.

«Dans la dernière année, on est en croissance, on a dû à combler une dizaine de postes, dit Eric Collard. 

Bien qu’au cours des dernières années, la PME ait mis en place diverses initiatives pour veiller au bien-être de ses employés, elle a toujours de la difficulté à recruter. Surtout des assembleurs. 

«Parce que ce qui est arrivé, avec la COVID-19, on a dû faire des mises à pied parce qu’au début, c’est sûr que nos clients, ce sont de grandes manufactures ou des clients dans le secteur industriel, donc l’économie [était] au ralenti par rapport à ça, rappelle Eric Collard.  On a fait des mises à pied, mais là, avec le redémarrage, on est en croissance et puis on a dû embaucher une dizaine de personnes dans la dernière année. Ça fait que ça a été quand même un bon défi et ça continue de l’être en ce moment. Avec la pénurie de main-d’œuvre, on va passer beaucoup d’entrevues, il va y avoir des essais qui sont faits, et ça peut prendre un certain temps, justement, avant qu’on trouve le bon candidat qui va rester en poste, quelque chose qu’on ne vivait pas nécessairement dans le passé.» 

L’équipe de Flexpipe se demande comment une PME comme la sienne peut parvenir à recruter alors que tout le secteur manufacturier pige dans le même bassin restreint d’employés. 

«Je pense que les PME ont de beaux atouts, selon Frederic Kieffer. Tout d’abord, je pense qu’il faut démontrer dans le fond son ADN et être capable de parler de sa mission, de sa vision, de ses valeurs, bien sûr, mais de démontrer quels sont les avantages aussi de travailler des fois dans une organisation qui est un peu plus à taille humaine. Il y a beaucoup de gens qui aiment travailler avec des petites équipes, qui aiment avoir des relations beaucoup plus proches avec les coéquipiers, qui ont besoin d’être dans une organisation où ils vont sentir que c’est moins anonyme.» 

Ne pas offrir des salaires compétitifs peut parfois être un facteur qui rebute certains candidats. Si Flexpipe s’est permis d’augmenter le salaire de ses assembleurs, toutes les PME n’y parviennent pas nécessairement. 

«Je pense qu’il faut mettre l’emphase dans le fond sur d’autres attraits de l’entreprise, que ce soit des avantages sociaux, des congés, des vacances, qu’on peut ajouter des services aussi qu’on peut offrir, suggère Frederic Kieffer. À une époque, il y avait le fameux gym dans les organisations qui étaient très populaires. Maintenant on peut peut-être penser à d’autres types de services. On peut offrir des rabais aussi aux employés. Mais ce qui est très important, quant à moi, c’est de démontrer aussi aux gens que peut être en venant travailler chez nous, ils vont pouvoir se développer, ils vont peut-être être dans un environnement de travail qui est stimulant, qui est intéressant, qu’ils vont peut-être travailler sur des projets avec une technologie à la fine pointe. Il faut peut-être aussi de se corréler avec la mission sociale de l’organisation. Alors il y a un défi ici aussi pour les organisations de bien promouvoir, de vendre le poste au-delà évidemment du salaire et du titre.» 

Si votre PME mise sur sa marque employeur, non seulement vous pourriez fidéliser vos travailleurs, mais aussi en attirer d’autres. C’est d’ailleurs ce qu’a essayé de faire Flexpipe au cours de la dernière année. 

«On a quand même fait quelques initiatives, raconte Eric Collard. Première des choses, un petit peu en dehors du cadre, mais on a acheté une maison au Costa Rica. C’est une maison où les employés peuvent aller passer des vacances, mais ils peuvent aussi aller y faire du télétravail. Donc pour les employés de bureau, c’est quand même intéressant de pouvoir aller au Costa Rica là pendant un certain temps.» 

«L’autre chose après ça qu’on a faite, c’est qu’on a déménagé, donc ce qu’on a fait c’est qu’on a loué une nouvelle usine depuis le mois de juin à Farnham qu’on a réaménagé, explique Eric Collard. Une chose qu’on a faite aussi, un peu comme la majorité des entreprises, on a adopté le télétravail. Donc qu’est-ce qu’on fait? C’est que 2 jours par semaine, les équipes se regroupent pour venir travailler au bureau. On a ouvert ça à partir de cet été. Les 3 autres jours de la semaine, les gens vont pouvoir travailler de la maison ou encore du lieu qui leur convient.» 

«Quand on est dans la rareté de main-d’œuvre, comme on le vit aujourd’hui, c’est important de planifier aussi la main-d’œuvre, de faire ce qu’on appelle une planification de main-d’œuvre, afin de comprendre et de voir un peu quels seront nos besoins en termes de main-d’œuvre dans les prochains mois, les prochains trimestres, les prochaines années, et même essayer de démarrer assez rapidement dans le fond, le recrutement», signale Frederic Kieffer. 

Ce dernier croit «qu’il faut aussi être dans une vigie constante des talents et ça, je pense que ce sont de nouveaux réflexes que les gestionnaires doivent développer. Puis en même temps, je vous dirais, il faut surtout diversifier les stratégies de recrutement, diversifier aussi les bassins de candidatures, et ne pas penser que seulement de l’affichage de poste fonctionne, il faut être beaucoup plus proactifs. Il faut peut-être s’ouvrir aussi à des profils des fois qui sont un peu différents, des profils atypiques.» 

N’hésitez pas à user du réseau de vos employés ou même de vos fournisseurs pour dénicher vos prochains salariés. Si toutefois vous êtes à bout de ressources, vous pourriez toujours vous tourner vers l’extérieur des frontières. 

«Il y a une étude qui mentionne que d’ici 5 ans, d’ici 2026, on prévoit qu’il y aura 22% des employés dans nos organisations qui vont provenir de l’international. Alors je pense qu’il ne faut pas tarder, il faut tout de suite se tourner vers cette stratégie-là, en tout cas d’au moins l’évaluer, dit Frederic Kieffer. Et évidemment, compte tenu de la grande pénurie qui risque de continuer quand même, pour certains temps, je pense qu’il faut rapidement aussi revoir notre stratégie de recrutement, puis peut être aller de l’avant de façon donc plus proactive.» 

Frederic Kieffer observe qu’il manque souvent un atout parfois essentiel chez les PME qui peinent à trouver de la main-d’œuvre : un employé dédié au recrutement. 

«On va chercher des gens, des recruteurs internes, qui justement peuvent mettre en place les bonnes stratégies en lien avec le plan d’affaires de l’organisation pour aller chercher les talents et surtout travailler également à les retenir, expose Frederic Kieffer. Il y a quand même des frais associés à ça. On crée un nouveau poste, il y a différentes dépenses qui sont associées à ce poste-là. Des fois, on peut même penser — en fait, je le vois chez certains de nos clients — on partage la ressource à travers 2 ou 3 entreprises alors ça c’est peut-être une formule aussi intéressante.» 

Même si une PME doit rapidement pourvoir un poste, elle ne devrait en aucun cas négliger l’évaluation du profil comportemental d’un candidat. 

«Souvent, on embauche, on va valider en entrevue les compétences techniques, le savoir-faire, mais on néglige beaucoup le savoir-être. Et finalement, on va licencier les gens ou on va s’en départir, compte tenu justement du comportement, dit Frederic Kieffer. Et ça, y’a des solutions à ça, de valider les choses, évidemment en entrevue, et peut être aussi de faire, à l’occasion des tests psychométriques qui viennent justement donner un profil ou un éclairage complémentaire sur l’individu.» 

«Les choses aussi qu’on oublie de faire, c’est de prendre des références professionnelles, rappelle Frederic Kieffer. Des fois, c’est extrêmement valable d’aller consulter 2 ou 3 personnes qui ont déjà travaillé avec cette personne-là. On comprend mieux l’individu là qu’on est en train peut-être d’embaucher.» 

D’ailleurs, Frederic Kieffer met en garde les employeurs qui engagent un candidat qui quitte sa précédente organisation pour une meilleure offre salariale. 

«Ces personnes-là risquent peut-être d’être attirées par des postes chez vous, de s’en venir dans votre organisation pour quelques milliers de dollars de plus, mais elles risquent aussi peut-être dans quelques mois de quitter pour quelques milliers de dollars de plus. Alors tout le temps, l’énergie et l’argent que vous allez mettre à recruter, à intégrer cette personne-là et bien ça risque peut-être d’être un gaspillage. On n’est pas toujours obligé, vous savez, d’offrir des salaires très élevés au départ. Il y a peut-être des approches ou des stratégies à y avoir avec certains employés où on peut leur proposer une progression intéressante au niveau salarial, puis qui se ferait aussi dans un délai raisonnable. Il y a peut-être possibilité de faire certains aménagements au lieu d’offrir tout de suite un salaire qui est extrêmement élevé pour l’organisation.»

 

Ce balado produit par Les Affaires est animé par Catherine Charron et réalisé par Virage Sonore grâce au soutien de la Banque Nationale.

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