Cinq clés d’un bon plan de transfert


Édition du 12 Avril 2023

Cinq clés d’un bon plan de transfert


Édition du 12 Avril 2023

Dans le cas de Pizza Salvatoré, il n’a fallu qu’un an aux cinq frères et sœurs Abbatiello pour racheter l’entreprise de leur père Guillaume, qui avait lui-même poursuivi le travail entamé par son père Salvatoré. (Photo: courtoisie)

REPRENEURIAT. Céder son entreprise avec succès exige du temps, de la préparation et, dans la majorité des cas, l’appui de professionnels de différents horizons. Voici cinq clés d’un transfert réussi, selon les experts consultés par Les Affaires.

 

1. Ne pas attendre 

On ne cède pas son entreprise en criant « vendu ! » : un plan de relève doit se préparer idéalement plusieurs années à l’avance, mettent en garde les spécialistes du repreneuriat. L’échéancier peut varier selon la taille de l’entreprise à céder et le secteur dans lequel elle évolue, mais aussi en fonction du type de repreneur recherché, explique Louise Cadieux, professeure retraitée de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) et experte en transfert d’entreprise à Soluce fiscalité et comptabilité. 

Le transfert d’une entreprise à un repreneur externe peut prendre entre 12 et 18 mois, en incluant une période de transition de six mois, tandis qu’un transfert interne (employé clé, groupe d’employés) peut prendre jusqu’à cinq ans, indique-t-elle. « Dans ce cas, le transfert des actifs va se faire sur une plus longue période », précise-t-elle. Pour ce qui est des transferts familiaux, l’échéancier variera selon le contexte familial — est-ce que le fils ou la fille est déjà impliqué(e) dans l’entreprise ou non, par exemple. 

Dans le cas de Pizza Salvatoré, il n’a fallu qu’un an aux cinq frères et sœurs Abbatiello pour racheter l’entreprise de leur père Guillaume, qui avait lui-même poursuivi le travail entamé par son père Salvatoré. Ce transfert rapide qui s’est conclu en 2018 s’explique notamment par le fait que les repreneurs avaient déjà intégré graduellement l’entreprise dans les années précédentes. « Quand la vente a été faite, le transfert de responsabilités était déjà effectué. Nous étions déjà à l’aise », explique Élizabeth Abbatiello, vice-présidente aux communications et au rayonnement de l’entreprise.

 

2. Réfléchir à ses motivations 

Un dirigeant doit se demander à quel moment il souhaite céder son entreprise et dans quel but. « Dans un cas récent, l’entrepreneur était à une semaine de finaliser la transaction. Il a signé deux contrats importants avec de nouveaux clients et il a décidé qu’il ne vendait plus son entreprise. Dans sa tête, il n’était pas prêt à vendre », raconte Stéphane Bourgeois, directeur principal du Service de transfert d’entreprise à la Banque Nationale. 

« Il faut ordonner la réflexion avec des experts pour aller au fond des choses », résume Éric Dufour, vice-président et associé chez Raymond Chabot Grant Thornton, spécialisé en transfert d’entreprise. Celui-ci travaille avec une équipe de spécialistes en finances, en ressources humaines, en fiscalité ou encore en psychologie pour guider ses clients.

 

3. Ne pas regarder seulement les chiffres

Il est bien sûr essentiel de faire évaluer l’entreprise à céder à un moment ou à un autre, que l’expertise soit payée par le cédant ou le repreneur. « Il faut préparer l’entreprise pour avoir une valorisation qui convient à la retraite ou ajuster la retraite en fonction de la valorisation de l’entreprise », note Stéphane Bourgeois. « Les entrepreneurs sont souvent surpris lorsqu’ils apprennent la juste valeur marchande de leur entreprise, qui est souvent beaucoup plus faible que ce qu’ils avaient imaginé », remarque Louise Cadieux. 

La famille Abbatiello a fait évaluer Pizza Salvatoré de manière indépendante, mais le prix payé a finalement été celui offert au même moment par une multinationale qui voulait racheter l’entreprise. « On s’est dit qu’il n’y avait pas de prix plus juste que celui du marché », explique Élizabeth Abbatiello.

Il ne faut cependant pas s’arrêter aux colonnes de chiffres, souligne Éric Dufour. « Ce qui est déterminant aujourd’hui dans un plan de relève, c’est l’équilibre au sein de l’équipe de direction, la capacité de l’entreprise de retenir sa main-d’œuvre, etc. C’est pourtant ce volet humain auquel les cédants ne s’attardent pas assez. »

 

4. Trouver le « bon » repreneur 

Certains cédants veulent toucher le plus d’argent possible, d’autres priorisent plutôt le maintien du siège social et des emplois dans la ville qui les a vus grandir. Les deux objectifs sont légitimes, affirme Stéphane Bourgeois. « On pense souvent que l’objectif est de vendre au meilleur prix, mais ce n’est pas toujours le cas. Pour certains, l’objectif est de s’assurer que ce qu’ils ont bâti avec le temps va perdurer. » 

La recherche du repreneur qui correspond aux critères du cédant peut donc se faire rapidement… ou pas, constate Pierre Graff, président-directeur général du Regroupement des jeunes chambres de commerce du Québec (RJCCQ). « Au final, ça dépend d’un coup de cœur entre deux humains. Ce n’est pas mécanique. C’est un processus qui peut prendre du temps. » 

Par exemple, lorsque Dawn-Marie Turner a arrêté son choix sur le Groupe Meloche en novembre 2021 pour vendre son entreprise Aérospatiale Hemmingford, les dessins d’enfants d’employés affichés sur les murs des bureaux du repreneur ont lourdement pesé dans la balance. « J’ai senti qu’on avait des valeurs similaires, pour ce qui est de la famille et de la croissance », raconte-t-elle. 

« Quand on a des valeurs similaires comme entrepreneurs, ça facilite l’intégration, ajoute Hugue Meloche, président et chef de la direction du Groupe Meloche, qui en était à sa deuxième acquisition. Quand on achète une entreprise, on achète surtout les compétences des employés, pas seulement des machines. »

 

5. Faire le ménage 

Avant de céder son entreprise et, surtout, avant de la faire évaluer, il faut s’assurer de ne rien laisser traîner dans sa comptabilité, conseille Stéphane Bourgeois. « Faites le ménage ! » lance-t-il. L’abonnement à un groupement d’affaires qui coûte quelques centaines de dollars par année à l’entreprise a sans doute été utile, mais il gonfle peut-être inutilement la colonne des dépenses. Et ces comptes en souffrance, vaut mieux les retirer de son portefeuille pour présenter son entreprise sous son meilleur jour.

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