Brian McManus quitte Stella-Jones l'esprit tranquille


Édition du 24 Août 2019

Brian McManus quitte Stella-Jones l'esprit tranquille


Édition du 24 Août 2019

Par Stéphane Rolland

« À presque 52 ans, si je veux passer à un autre chapitre, ça doit arriver bientôt, explique Brian McManus. C’était important pour moi de partir à un moment où l’entreprise se trouve dans une position forte. » (Photo : Christian Blais)

Les marchés ont beau réagir négativement à l'annonce de son départ, Brian McManus, PDG de Stella-Jones (SJ, 39,94 $), assure que le fabricant de traverses de chemin de fer et de poteaux se trouve dans une bonne posture. Le dirigeant, qui quittera ses fonctions en octobre, veut maintenant passer à une nouvelle étape de sa carrière.

«À presque 52 ans, si je veux passer à un autre chapitre, ça doit arriver bientôt, explique le dirigeant en entrevue avec Les Affaires. C'était important pour moi de partir à un moment où l'entreprise se trouve dans une position forte.»

M. McManus quittera le 11 octobre prochain après avoir passé 18 ans à la tête de Stella-Jones, a annoncé la société le 15 juillet dernier. C'est Éric Vachon, chef des finances, qui assurera l'intérim. M. Vachon occupe des postes de direction au sein de l'entreprise depuis 2007. «Ils sont entre de bonnes mains», dit M. McManus au bout du fil. Le conseil d'administration a formé un comité spécial pour évaluer les candidatures internes et externes en vue de trouver un successeur au PDG.

L'action corrige

Les investisseurs ne sont pas pour autant rassurés. Depuis qu'ils ont appris le départ du dirigeant, le titre a reculé de 17,4 %. Il faut dire que M. McManus, à qui l'on attribue le succès du redressement de Stella-Jones au tournant des années 2000, jouit d'une excellente réputation auprès des analystes et des investisseurs. Le dirigeant a d'ailleurs été nommé PDG de l'année 2016 par le journal Les Affaires. Le choix a été fait par un jury indépendant qui n'avait pas de liens avec l'auteur de ces lignes. Depuis l'entrée en fonction de M. McManus, la valeur de l'action a été multipliée par près de 70 fois.

Le PDG sortant et les membres de la direction restent confiants pour la suite des choses malgré des résultats au deuxième trimestre inférieurs aux attentes. La direction maintient ses prévisions pour 2019.

Aux prises avec des difficultés depuis 2016, Stella-Jones voit l'horizon s'éclaircir, selon M. McManus. «Le vent a commencé à tourner. Ce n'est pas un vent de dos à 100 %, mais ce n'est plus un vent de face. Je suis content de laisser ma place à un moment où des choses positives s'en viennent», dit le dirigeant, qui évoque des projets de croissance. Signe de sa confiance, il affirme vouloir conserver ses actions. Le dirigeant détient près de 10 000 actions dans un régime d'actionnariat et près de 50 000 en propriété directe, selon des documents réglementaires. Cela représente un actif d'environ 2,6 M$. «J'ai vraiment confiance en l'équipe et l'entreprise.»

Une pause de six mois

Pour le moment, M. McManus ignore toujours quelle sera la prochaine étape de son parcours professionnel. «Je n'ai rien de prévu pour le moment, répond-il. J'ai promis à ma femme que je ne ferai rien pour six mois à partir d'octobre. Elle a déjà commencé à planifier des voyages.»

Sa décision de partir n'est pas en lien avec la vente d'une participation de 31 % des actionnaires fondateurs, Tom Bruce Jones et Gianni Chiarva, au cours de l'été 2018, assure le dirigeant. La Caisse de dépôt faisait partie des acquéreurs d'une partie de cette participation. Elle détient plus de 10 % des actions en circulation et est le plus important actionnaire.

S'il reconnaît que le métier de PDG est exigeant, il assure que la fatigue n'a pas joué de rôle dans sa décision après avoir mené le train de vie effréné qu'impose le travail de PDG. «Je suis chanceux, je fais de l'exercice et j'essaie de me tenir en forme. C'est sûr qu'il faut voyager beaucoup. Il faut être disponible 24 heures sur 24, ça met de la pression, mais en même temps, ça vient avec la job. Mon annonce n'a rien à voir avec un burn-out ou quelque chose du genre. J'ai juste pris la décision que ce chapitre devait finir et qu'un autre devait commencer.»

Le marché est-il trop nerveux ?

Si le marché est nerveux après le départ de ­Brian ­McManus, la majorité des analystes invitent les actionnaires à ne pas se laisser gagner par la crainte. La direction anticipe un revirement positif en deuxième moitié de l’année et les analystes adhèrent à cette thèse.

Benoit ­Poirier, de ­Desjardins ­Marché des capitaux, juge que la réaction du marché est « exagérée ». Le titre avait perdu 7 % au moment de son commentaire, quelques heures après l’annonce du départ. Cette perte est montée à 17 % au moment de mettre sous presse. « ­Même si M. McManus était un contributeur important au succès de l’entreprise, nous constatons qu’il a réuni une forte équipe autour de lui. »

M. Poirier juge que les fondamentaux de l’entreprise sont solides et que son bilan lui donne la flexibilité nécessaire pour créer de la valeur pour les investisseurs. Il estime que le titre est « peu cher avec un rendement des flux de trésorerie de 5,8 %, une solide croissance interne et la possibilité de réaliser des acquisitions ».

­Stella-Jones perd son ­PDG à un moment où elle tente de regagner un certain rythme. Les résultats du deuxième trimestre ont également été perturbés par « des éléments ­non-récurrents ». Des délais de livraison ont plombé les ventes de traverses de chemin de fer et la météo peu clémente a nui aux ventes du bois résidentiel dans l’Est canadien.

Malgré tout, la direction maintient ses prévisions pour l’année 2019. Hamir ­Patel, de ­CIBC ­Marchés mondiaux, croit aussi que la deuxième moitié de l’année sera plus vigoureuse. L’offre de traverses de chemin de fer ne satisferait qu’entre 75 % à 80 % de la demande des transporteurs ferroviaires, selon un article du ­Hardwood ­Weekly que cite l’analyste. « ­Avec la disponibilité réduite de traverses, nous croyons que ­Stella-Jones sera en mesure d’augmenter ses prix », ajoute M. Patel.

Seul analyste sur huit à bouder le titre, ­Mark ­Neville, de ­Banque ­Scotia, préfère attendre avant de parier sur un changement de cap en deuxième moitié d’année. Il juge que les résultats décevants observés dernièrement devraient inciter à la prudence.

Le succès de la thèse optimiste passera principalement par les acquisitions, croit ­Walter ­Spracklin, de ­RBC ­Marchés des capitaux. L’analyste pense que le calme sur ce front a été responsable de la ­sous-performance du titre. Il interprète l’optimisme de la direction quant aux possibilités d’acquisitions comme un élément positif.

Une opinion que partage ­Hamir ­Patel. « ­Le marché va avoir besoin d’un signe clair que les occasions d’acquisitions restent nombreuses pour attribuer un multiple plus important à ­Stella-Jones », ajoute l’analyste de ­CIBC ­Marchés mondiaux. L’action s’échange à 14,9 fois les prévisions de bénéfices des 12 prochains mois, contre une moyenne de 15,17 pour l’industrie, selon une recension de ­Reuters.

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