Les dividendes élevés vous attirent? Attention!

Publié le 04/06/2012 à 13:24, mis à jour le 04/06/2012 à 15:02

Les dividendes élevés vous attirent? Attention!

Publié le 04/06/2012 à 13:24, mis à jour le 04/06/2012 à 15:02

BLOGUE. Dans un environnement où les taux d’intérêt sont très bas, plusieurs investisseurs ratissent les marchés boursiers pour dénicher des titres qui leur procureront des dividendes élevés. Ils sont souvent attirés par des titres qui offrent des rendements en dividendes de 6 %, 7 %, voire 10 %... et il en existe plusieurs sur le marché canadien.

Quelques exemples? Groupe Colabor, qui procure présentement un rendement en dividende de 9,3 %, Wajax, qui procure un rendement de 6,5 % ou Liquor Stores, qui donne 6,0 %. De fait, il y en a une pléthore, en particulier parmi les anciennes fiducies de revenus. Ces sociétés qui versaient la majeure partie de leurs profits sous le régime des fiducies ont dans bien des cas poursuivi cette pratique une fois qu’elles ont été converties en corporations.

Mais avant d’acheter de tels titres aveuglément, les investisseurs devraient examiner quelques facteurs de près. En premier lieu, quel pourcentage de ses profits l’entreprise verse-t-elle en dividendes? Prenons l’exemple de Colabor (« GCL », Toronto), un grossiste et distributeur de produits alimentaires de Boucherville. En 2011, la société a dégagé des profits nets de 6,8 M$ alors qu’elle a versé des dividendes de 24,8 M$; en 2010, ses profits nets se sont élevés à 10,1 M$ et les dividendes versés à 25,2 M$. On parle ici d’un ratio de couverture du dividende négatif.

Plusieurs diront avec raison que ce ne sont pas les profits qui comptent mais plutôt les fonds autogénérés par l’exploitation (les « cash flows »). Sur cette base, la situation de Colabor est plus saine puisque ces derniers se sont chiffrés à 47,3 M$ en 2011 et à 39,1 M$ en 2010, ce qui a couvre largement les dividendes versés.

Deuxièmement, le bilan de l’entreprise lui procure-t-il un coussin de sécurité en cas de pépin passager? La société a-t-elle réellement les moyens de verser de tels dividendes? Ou, est-ce que le fait de verser des dividendes importants augmentent sensiblement sa dette et l’oblige à émettre de nouvelles actions pour les financer? Au 31 décembre, la dette de Colabor totalisait 167 M$ par rapport à un avoir des actionnaires de 176 M$, pour un ratio dette-avoir relativement élevé de 0,95, ce qui, à mon avis, procure un coussin de sécurité plutôt mince.

Finalement, le secteur de l’entreprise se prête-t-il au versement de tels dividendes? Une entreprise oeuvrant dans un secteur stable comme les services publics ou même celui des banques peut généralement se permettre de verser des dividendes élevés. Mais je ne crois pas que celles qui sont actives dans des secteurs cycliques devraient le faire. Tôt ou tard, ces sociétés pourraient faire face à une situation plus difficile et pourraient être forcées de diminuer sensiblement leur dividende. Par exemple, Wajax est un distributeur d’équipements et de produits industriels utilisés principalement par des industries reliées aux secteurs des ressources naturelles, secteurs qui seraient certainement affectés advenant un ralentissement économique. Dans le cas de Colabor, son secteur, l’alimentation, est relativement stable mais elle n’est tout de même pas à l’abri d’un accident de parcours tel que la perte d’un client.

En bout de ligne, le dividende d’une société devrait être secondaire pour l’investisseur. Ce qui devrait toujours primer sont les profits d’une société, leur potentiel de croissance dans le temps et l’évaluation de son titre par rapport à ces profits. Recevoir des dividendes peut être enrichissant mais encore faut-il que ces dividendes ne mettent pas la société dans laquelle on a investi en difficulté.

Philippe Le Blanc, CFA, MBA

À propos de ce blogue : Philippe Le Blanc est gestionnaire de portefeuille chez COTE 100 (www.cote100.com) et éditeur de la Lettre financière COTE 100 (www.lettrecote100.com).

À propos de ce blogue

Philippe Le Blanc est gestionnaire de portefeuille chez COTE 100 et éditeur de la Lettre financière COTE 100+. Il est également l’auteur du livre Avantage Bourse et coauteur de La Bourse ou la Vie.

Philippe Leblanc
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